Forum - Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia - La sauvagerie sent mauvais
Accueil
Forum : Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia

Sujet : La sauvagerie sent mauvais


De Jarriq, le 27 mai 2003 à 16:30
Note du film : 6/6

Le film le plus barje, le plus glauque, le plus déjanté de la filmo. de Peckinpah (et des seventies en général, d'ailleurs) mérite d'être découvert en DVD. Dans un cadre de polar, de thriller, le réalisateur signe une oeuvre aussi iconoclaste que celles d'un David Lynch. Warren Oates qui s'est fait sciemment le look de Peckinpah, campe l'anti-héros le plus total jamais vu dans un film U.S. de cette époque et si on avait accusé "bloody Sam" de glorifier la violence dans "Wild Bunch", il a rectifié le tir avec "Alfredo Garcia" : ici la sauvagerie sent mauvais, attire les mouches et n'a rien d'héroïque.


Répondre

De david-paul, le 13 mars 2005 à 11:26
Note du film : 5/6

Je l'ai vu il y a longtemps et le film mérite la réédition ! Agrémenté des bonus qui vont bien !


Répondre

De vincentp, le 26 août 2006 à 19:28
Note du film : 6/6

C'est aussi une charge particulièrement forte contre le capitalisme, avec ses business men clones de Nixon, de véritables tueurs à gage, qui exploitent sans vergogne leur homme des basses besognes, le formidable Warren Oates, qui réalise ici une énorme performance. Il y a aussi pour étayer cette vision de la société capitaliste un descriptif en arrière plan particulièrement réussi de la société mexicaine, avec son riche propriétaire terrain, sans aucun sens moral, et ses traine-savates, qui se baladent dans des autos de fortune.

Le film accorde une importance considérable aux détails de la vie quotidienne, à partir desquels émerge la sauvagerie humaine. Ceci étant très caractéristique de Peckinpah (Guet apens, partant lui aussi dans des méandres à priori dénués d'intérêt, qui mettent en évidence le côté sordide et pathétique des personnages). Un aspect sordide qui atteint des sommets quand il s'agit de déterrer un mort pour lui couper la tête (on est ici loin de John Ford, avec son personnage si emblématique priant sur la tombe d'un proche).

On peut dire aussi que ce film est tout particulièrement réussi dans la mesure ou cette violence physique et morale des individus, qui est le simple écho de la sauvagerie de la société humaine, va crescendo tout au long du film, pour se terminer par des séquences paroxystiques.

On est d'accord avec toi, PM Jarrig, pour le qualifier de chef d'oeuvre incontournable et le conseiller à nos amis internautes.

Nb : lire également le beau dossier de Positif (Aout 2006) sur le Hollywood des années 70, avec outre des analyses pointues, une interview particulièrement intéressante de William Friedkin, qui décrit bien l'état quelque peu anarchique dans lequel s'est trouvé ce cinéma américain à cette période. Un désordre (certes relatif) allié à des moyens financiers considérables ont permis de faire émerger toute une génération de metteurs en scène particulièrement doués et productifs.


Répondre

De Freddie D., le 26 août 2006 à 19:52
Note du film : 6/6

Bien qu'il ait été fait il y a 32 ans, c'est le film le plus nihiliste et désespéré jamais sorti de l'imaginaire d'un réalisateur américain. Oates est un descendant des anti-héros de Le trésor de la Sierra Madre (d'ailleurs, quand on lui demande son nom, un des tueurs dit s'appeler Fred Dobbs, qui était le nom de Bogart, dans le film de Huston), encore moins reluisant. Le film est inconfortable, mais on ne peut s'empêcher d'y revenir encore, et encore. Comme tous les grandes réussites de Peckinpah, d'ailleurs.


Répondre

De Impétueux, le 8 octobre 2011 à 22:24
Note du film : 6/6

Et à l'extrême fin de Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia, on a vaguement l'idée de se demander si le déluge de balles à quoi on vient d'assister n'est pas légèrement exagéré et si Sam Peckinpah ne répète pas avec trop de complaisance la scène ultime de La horde sauvage. Et puis finalement non, on se dit que les deux séquences ont leur absolue pertinence et conviennent à merveille au propos du cinéaste, la lassitude alcoolisée de participer au monde, avec plus de scepticisme sarcastique dans La horde, plus d'exaspération furieuse dans La tête.

Dans les deux films, en tout cas, on est plongé d'emblée dans un merdier insupportable, un Mexique éloigné des images de cartes postales et qui semble abandonné de Dieu. Lourdeur du soleil, aridité du paysage, sensation qu'on respire de la poussière. Paradoxalement Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia s'ouvre sur une mélodie chaude, tendre, et les plans charmeurs d'une rivière où nagent paisiblement des canards, d'une jolie jeune fille rêveuse qui baigne son pied nu dans l'eau. Mais l'ennui est que cette jeune fille est enceinte. Voilà qui fait tâche immédiatement : il n'y aura plus ensuite que des images violentes ou sordides.

Il y a quelques rares exceptions, les scènes où Bennie (Warren Oates, excellent de bout en bout) et sa compagne Élita (Isela Vega) admettent que, quelles qu'aient été leurs chiennes de vie, ils s'aiment vraiment et veulent vivre ensemble à l'avenir. C'est bien loin d'être serein, apaisé, harmonieux et le souvenir de l'aventure qu'Élita a eue avec le défunt Alfredo fouette avec constance l'esprit et la rage de Bennie. Mais c'est une belle histoire, émouvante, fragile. J'ai vu qu'Isela Vega, qui a tourné, au Mexique, un très grand nombre de films, était surtout connue pour des rôles déshabillés. En tout cas, là, elle est drôlement bien, anxieuse, attentive, résignée, confiante…

Une des forces du film est la cohabitation dans le même espace temporel de la modernité de 1974 et des aspects qui paraissent les plus archaïques d'une sauvagerie généralisée. Une société mexicaine qui est moins capitaliste que féodale, ou même tribale, avec subordination absolue au Chef, absence de toute considération envers tout ce qui n'est pas du clan et liens absolus de réciprocité. Un système qui fonctionne en vase clos avec une terrifiante efficacité, qui a règles, normes, interdits intégrés par tous et qu'il n'est pas même question de discuter. C'est admirablement décrit par Peckinpah dès la scène où le patriarche arrache à sa fille chérie le nom du père du bâtard et offre un million de dollars à qui lui rapportera la tête haïe de ce chien galeux d'Alfredo Garcia. On sent une scène à la Goya, toute la pesanteur rigoriste de l'austère Espagne.

Tout de suite après, départ des chasseurs à la poursuite d'Alfredo Garcia, avions rugissants, lourdes limousines, place des Trois Cultures à Mexico, exploration des moindres endroits où le scélérat pourrait être connu. Le bar où joue et survit mal Bennie. Superbe scène de sa rencontre avec les deux tueurs yankees (Robert Webber et Gig Young), dont l'homosexualité est à peine suggérée, et dont la cruauté souriante fait froid dans le dos.

Mais des scènes très fortes, il y en a plein d'autres : le presque viol d'Élita par deux routards goguenards, la décollation du cadavre d'Alfredo dans un cimetière désolé, la haine meurtrière de Bennie pour les assassins de sa femme et de l'arme déchargée sur l'un d'entre eux Pourquoi je fais ça ? Parce que ça me fait un bien fou !, les mouches qui s'agglutinent sur la tête gluante et pourrie et, bien sûr, les dix dernières minutes qui ne sont que chaos et haine…

Un grand film grave, agressif, venimeux…


Répondre

Installez Firefox
Accueil - Version bas débit

Page générée en 0.0057 s. - 5 requêtes effectuées

Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter