ATTENTION SPOILERS

Un polar magistral, confondant de noirceur, duquel ne filtre aucun espoir.

"Rahul et Shalini, les parents de Kali, 10 ans, sont divorcés. La fillette vit désormais avec sa mère et son beau-père, Shoumik, responsable d’une brigade de la police de Bombay. Un samedi, alors que Kali passe la journée avec son père Rahul, elle disparaît…" (résumé allociné)

A partir de ce canevas simplissime, Anurag Kashyap construit un film implacable, baignant dans une atmosphère poisseuse de brutalité et de malaise psychologique. Rarement un film aura montré des protagonistes aussi retors et pervers, le kidnapping n'étant finalement qu'un prétexte pour décrire une Inde qui pourrit de l'intérieur, un pays phagocyté par la misère sociale, par la pauvreté, un pays dont les strates sont corrompues au plus haut degré. Shoumik est un policier sadique, qui tabasse 'Rahul pour se venger d'un affront futile qui remonte à ses études à la fac. Il considère sa femme Shalini comme une chose qui lui appartient, il régente son univers, espionne en permanence ses conversations téléphoniques avec ses amies.

Rahul, le père de la fillette, est un acteur sans contrat, qui s'enfonce inexorablement dans l'illégalité pour retrouver Kali, allant même jusqu'à commettre un braquage pour réunir la somme réclamée par les ravisseurs. Quant à Chaitanya, le meilleur ami de Rahul, il pousse le vice jusqu'à se faire passer pour le ravisseur afin de toucher la rançon.

Le réalisateur joue avec les nerfs du spectateur avec une rare maestria, dilate les moments de tension, filme une violence sèche et sans complaisance. Il sonde l'âme de ses personnages pour en extraire les dernières parcelles d'humanité déchue, agence les rebondissements avec un sens inné du rythme, aidé en cela par un scénario sans la moindre faille.

Du premier plan, qui voit Shalini se mettre un pistolet dans la bouche, à la dernière séquence, d'une beauté morbide insoutenable, Ugly est un véritable électrochoc. On ressort du film essoré par ce concentré de noirceur accablante, par ce malaise palpable qui imprègne chaque image et marque durablement la rétine, comme un cauchemar sans fin.

Magistral.

Glaçant et sûrement véridique ; dire qu'il y a des gens qui promettent à l'Inde un destin important ! (ceux-là aussi disaient la même chose du Brésil il y a quarante ans).