En effet, il n'y a pas d'enquête policière ici. Le sujet ? Un jeune homme désespéré (Richard Baseheart) s'installe sur la bordure d'un gratte-ciel et menace de se suicider. C'est l'Italien des roses avec vingt ans d'avance.

On retrouve toutefois l'esthétique -superbe- des meilleurs films noirs de la Fox : photo noir et blanc, format 4/3, décors, extérieurs, costumes, etc…

Avec ce genre de sujet minimaliste étiré sur une heure et demie, on peut craindre l'ennui mais la mise en scène en scène de Henry Hathaway utilise à merveille les contraintes de l'unité de lieu et de temps, notamment le caractère spectaculaire des "buildings" new-yorkais. Le suspense est bien dosé et les deux acteurs principaux, Richard Basehart et Paul Douglas, dans le rôle du flic qui tente de le ramener à la raison, sont très attachants.

La qualité du scénario fait également qu'on ne voit guère les 90 minutes s'écouler. Car le récit s'intéresse non seulement au héros suicidaire mais aussi aux badauds qui passent devant le gratte-ciel. On a un éventail de la société américaine des années 50 avec des passants curieux, des journalistes à sensation, un prédicateur illuminé… Le plaisir du cinéphile naît du fait que bon nombre de ces badauds sont incarnés par de jeunes acteurs et actrices destinés à une brillante carrière : on reconnaîtra ainsi Debra Paget, Jeffrey Hunter, Brian Keith, John Cassavetes et surtout Grace Kelly, dans un joli rôle d'épouse qui refuse au dernier moment de divorcer, bouleversée par les événements auxquels elle assiste.

Le seul tort du film ? ressembler un peu trop au Gouffre aux chimères de Billy Wilder, lui aussi tourné en 1951. On peut aimer l'approche humaniste de Hathaway mais on peut aussi préférer la profondeur et le mordant de Wilder. A chacun de se faire son opinion…