Je me souviens encore de ses sanglots sur la tombe de sa fille dans "Crossing guard". Nicholson fait souvent l'imbécile, mais quand il se met à prendre son job au sérieux, il y en a peu qui lui arrivent à la cheville. Je suis curieux de voir "Tout peut arriver", qui me semble de la même veine que "Pour le pire et le meilleur".

Après des années de cabotinage honteux, Nicholson est aujourd'hui le seul acteur U.S. ayant passé la soixantaine, capable de se régénérer et d'étonner encore. Il était fabuleux en névrosé bourré de TOC dans "Pour le pire et pour le meilleur" (ce titre !!!), en vengeur ravagé dans "Crossing guard" et surtout en flic en bout de course dans le très sous-estimé "The pledge". J'attends avec impatience ce "Monsieur Schmidt".

Seulement, Monsieur Schmidt vient de prendre sa retraite et doit faire face au constat de sa vie, à la fois inutile et vaine. Le regard qu’il porte sur sa propre vie du coup nous touche et nous interpelle, conférant ainsi au personnage un intérêt suffisant pour qu’on le suive dans sa petite vie de retraité.

Toute la première partie qui développe à la fois ce thème et ce ton est la plus belle du film. Elle même est relayée par une idée sublime : Monsieur Schmidt accepte de devenir parrain (contre 20 dollars par mois) d’un petit africain dans la misère à qui il écrit des lettres. Le procédé permet d’humaniser le personnage et de faire sourire par le décalage entre la vie qu’il raconte et celle qu’il vit. Un vrai régal.

Finalement, on a un peu l’impression que les auteurs ont créé un beau personnage mais qu’ils n’ont pas su quoi en faire.

Monsieur Schmidt est joué par un Jack Nicholson fidèle à lui-même, maîtrisant totalement et peut-être un peu trop tous les muscles de son faciès. Ses grimaces et autres postures peuvent soit séduire, soit lasser selon chacun, mais il faut reconnaître qu’il est parfaitement à l’aise dans ce personnage antipathique mais humain, si humain. Le couple qu’il forme (pour de trois rares scènes) avec Kathy Bates sont particulièrement efficaces et savoureuses.

Le film propose une nouveauté (?) ou d’une moins une rareté : \Jack Nicholson en train de pleurer…

Bon film. Mais quelle déprime ! De quoi faire changer d'avis tous ceux qui manifestent pour les retraites en ce moment… D'un réalisme total, sans concession, il présente pour la première fois Nicholson comme un vieil homme, marié à une petite bobonne de 65 ans. Plus ou moins présenté comme une comédie, le film n'a rien de drôle mais va au bout d'une logique désespérante, sans dévier d'un pouce. C'est du cinéma d'auteur pur et dur et on ne peut qu'admirer Nicholson de s'accepter ainsi en retraité ventripotent, chauve, à la démarche de pantin. Quel acteur !