Duel dans la sierra est un western réalisé en 1958 par George Sherman. Le scénario accuse certaines limites (les thèmes développés le sont simplement correctement), mais le film n'est pas inintéressant pour autant.
Ce long-métrage a pour intérêt d'avoir été tourné dans des décors naturels du Mexique (à une journée et demi de cheval du Rio Grande nous explique-t-on), essentiellement ruraux (montagnes et plaines). Sherman utilise habilement la profondeur de champ pour intégrer les personnages au sein d'un vaste décor, s'étalant à perte de vue en profondeur et en largeur (aspect magnifié par le cinémascope). Les haciendas en ruine issues de la conquête espagnole, perdues au milieu de la nature verdoyante confèrent à ce Mexique une dimension étrange et sauvage, presque fantomatique, à l'écart du Temps. Les peones y sont portés par un mysticisme religieux plus ou moins inquiétant ou bien versent dans la délinquance et agressent le voyageur, couteau ou arme à feu à la main. Les institutions régulatrices (l'armée, l'administration ou la justice,…) semblent absentes de cette contrée…
Ce territoire semble être un jardin d'éden mystérieux, obéissant à des règles qui lui sont propres, générant une inquiétude sourde pour le voyageur qui s'y aventure (ce récit insiste lourdement sur le fait que les deux aventuriers qui s'y sont risqués avant le héros y ont trouvé la mort). Le héros américain du récit traduit son ressenti en demandant à la jeune femme mexicaine qu'il observe se baigner nue dans la rivière : "vous n'avez pas peur de vous baigner seule et nue dans la rivière ?". Celle-ci lui répond procéder de la sorte depuis toute petite… L'aventurier américain se représente un monde faits de dangers multiples, le Mexicain perçoit au contraire un univers paisible.
Duel dans la sierra contient une série d'éléments visuels et sonores relativement bien pensés et assemblés permettant de constituer une atmosphère, un climat, entourant un intrigue dramatique. Il est sans doute également porteur d'une vision assez caractéristique de la civilisation mexicaine vue par les Américains des États-Unis à la fin des années 1950.
The last of the fast guns date de 1958 et peut être qualifié de western crépusculaire, aux côtés de L'homme de l'ouest par exemple, réalisé la même année. Le titre originel (peut-être), le fait que le héros soit un tueur aux motivations pas très claires (certainement), l'entrée en matière autour d'un cimetière, mais aussi un ciel souvent couvert et menaçant, sont des éléments qui peuvent le rapprocher de cette tendance qui émerge dans le cinéma américain d'alors.
King Hu (1931-1997), natif de Pékin, fuit le régime communiste pour entrer dans le monde du cinéma à Hong-Kong au début des années 1950 comme dessinateur et décorateur. Il gravit les échelons des studios, pour réaliser en 1966 et 1967 deux gros succès publics, L'hirondelle d'or et Dragon Inn. Ces deux titres assurent sa notoriété et donnent ses lettres de noblesse au genre dit "Wuxia". Deux opus se caractérisant par une réalisation de grande qualité, à base de plans élaborés, reposant sur des combats à l'épée rigoureusement chorégraphiés, et l'emploi de décors sophistiqués, intérieurs et extérieurs. De nombreux personnages y compris secondaires, à la psychologie affirmée, une héroïne combattante au premier plan, sont sa marque de fabrique.
En 1971, Hu réalise A Touch of Zen, oeuvre de trois heures, à la fois admirable sur un plan artistique, et délicate à exploiter en salles en raison de sa durée. Le cinéaste, soucieux d'indépendance, crée alors son propre studio de production et met en chantier en 1977 deux films tournés simultanément en Corée, dans des décors similaires : Legend of the Mountain et Raining in the Mountain. Ce seront des échecs publics, rapidement retirés des salles, à leur sortie en 1979. Legend of the Mountain contient des séquences splendides mais souffre d'un scénario incohérent. Raining in the Mountain s'affirme en revanche comme le possible chef d'oeuvre de la carrière du cinéaste.
On ne dévoilera aucun élément de nature à compromettre la découverte de Raining in the Mountain. Revu ces jours-ci en dvd (une réédition bluray 4K est à venir), avec un jugement revu en forte hausse. Disons que King Hu présente un spectacle flamboyant, quelque peu déconcertant par sa structure narrative atypique. L'héroïne "Renarde blanche" glisse au sein d'un immense temple accompagnée de son compère, coachée par un mentor aux lourdes responsabilités. Dans une interview accordée à la presse française, King Hu explique avoir voulu produire une réflexion sur la nature du pouvoir, s'interrogeant sur le fait que le pouvoir est peut-être un moyen pour acquérir des privilèges (notoriété, aisance matérielle) ou une finalité en soi (se conjuguant avec une obsession maladive pour l'exercer, sans limite temporelle, renonçant à dérouler une vie simple et confortable).
Multiplicité des points de vue exprimée par les personnages, mais aussi réflexion proposée par le cinéaste sur les points de vue subjectifs portés au regard des observateurs. Récit abouti, chef d'oeuvre incontestable, mais qui se mérite. Derrière les apparences de film de genre, un film d'auteur à décrypter. La suite de la carrière de King Hu sera quelque peu erratique, avec des projets avortés, et quelques réussites comme All the King's Men. Hu meurt en 1997 à Taïwan, nous laissant une oeuvre originale et de forte envergure, redécouverte par chaque nouvelle génération cinéphilique.
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