Peut-être parce qu'il a compris plus tôt que l'ancien mentor de la bande d'amis marxisants que la seule Révolution qui vaille est intérieure et spirituelle. Ce mentor, c'est Cesare (Roberto Vezzosi) qui convie tous ses amis et disciples pour leur annoncer la nouvelle : il va se convertir et demander le baptême. Les amis sont un peu interloqués, évidemment ; mais que peuvent-ils répondre devant la vacuité de leur propre vie ? Parmi eux, il y a Saverio (Marco Messeri) qui, après une rupture amoureuse s'est enfermé dans une sorte de rejet du monde, ne sort plus de chez lui, ne veut plus voir personne. Il y a Andrea (Vincenzo Salemme), incarcéré depuis cinq ans, soupçonné de terrorisme. Il y a Gianni (Dario Cantarelli), libraire souriant qui cache des vices honteux. Et d'autres encore. Mais personne sur qui puisse s'appuyer Giulio, finalement.
D'autant que la nouvelle paroisse ne va pas fort : rien que de normal, au demeurant. Si elle est délaissée par les fidèles de la bourgade, c'est que le précédent desservant, Antonio (Eugenio Masciari), s'est défroqué, a épousé une charmante jeune femme avec qui il a eu un bel enfant. Et paraît rayonner de bonheur. Vieille question du mariage des prêtres, pont-aux-ânes récurrent qui ne connaît pas, à mes yeux, de réponse satisfaisante, puisque des clercs ont été mariés jusqu'aux alentours de l'an Mil, en Occident et que beaucoup d'Églises orientales (mais rattachées à Rome) n'imposent pas le célibat. Il n'en demeure pas moins que la sexualité est un souci pour Giulio, sexualité omniprésente dans ce qu'il rencontre. Outre le bonheur charnel éclatant de son prédécesseur, il apprend que son vieux père est éperdument amoureux d'une jeune femme amie de sa sœur Valentina et va vivre avec elle et que Valentina, enceinte, désire avorter ; et puis les fiancés qu'il prépare au mariage posent des questions, des chansons offrent des tentations érogènes. Pauvre prêtre mal à l'aise, d'un caractère difficile et quelquefois cassant qui connaît en plus des vicissitudes : agressé, sur la contestation d'une place de stationnement, par un père et ses trois fils, presque noyé dans une fontaine, menacé par des voyous violents qui lui mettent le couteau sous la gorge, la lourdeur de sa tâche finit par l'user. Heureusement une rencontre au confessionnal avec un Franciscain qui a passé vingt ans de sa vie dans la violence du vent du détroit de Magellan va lui ouvrir la porte de sa vocation particulière…Rien de bien aventureux là-dedans : la vie quotidienne, banale, un peu grise, un peu lassante, sans grand horizon. Et au total un film attachant, fragile souvent et souvent mal fichu. Mais qui mérite d'être vu.
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