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grandiose


De Steve Mcqueen, le 11 juin 2016 à 17:19
Note du film : 5/6

Je partage tout à fait l’excellente analyse de Nicoco. Andrew Dominik abandonne l’esthétique clinquante de son précédent film, Chopper, pour livrer une œuvre qui est comme écrasée sous une chape de plomb, nimbée d’une lumière fantomatique, d’une lenteur hypnotique. C’est un western démythificateur où les personnages sont crûment décrits comme des êtres rongés de pulsions incontrôlables, qu’elles soient sexuelles ou de mort. Pas de romantisme ici, simplement des hommes qui vivent et meurent dans un râle de souffrance, qui semblent attendre la mort comme une délivrance. Les paysages, sublimes et démesurés, ne font que renforcer la petitesse des hommes. Une tension sous-jacente parcourt tout le film, les métastases de la violence semblant contaminer chaque image.

L’assassinat de jesse james par le lâche Robert Ford déroule une élégie contemplative nimbée de panthéisme, comme si la nature recélait en son sein des beautés cachées aux yeux des hommes. La violence, rare, y éclate comme on crève un abcès, sèche et sanglante. Elle n’a plus rien d’héroïque, c’est simplement le seul moyen d’expression d’être frustres et brutaux, qui semblent y éprouver un mélange de fascination et de répulsion.

Jesse James est incarné par un Brad Pitt en état de grâce, qui n’a jamais été meilleur que dans le rôle de ce bandit psychotique, imprévisible, faisant mine d’égorger Robert Ford (Casey Affleck, excellent, avec sa voix nasillarde et son regard fuyant) pour mieux partir dans un grand éclat de rire. Le film présente en effet de nombreux personnages, tous complexes et torturés, en proie à des pulsions ataviques. Comme le note Nicoco, la séquence du chemin de fer est anthologique, avec les éclairages du train qui dessinent des stries de lumière sur les visages encagoulés des hommes de James, semblant trouer l’obscurité abyssale.

Les paysages et les hommes sont écrasés sous un ciel lourd de nuages (« L’ampleur du ciel, l’architecture mobile des nuages » comme l’écrivait Baudelaire) à travers lesquels filtre une lumière diffuse. A noter que Nick Cave a également composé la musique (et écrit le scénario) de The Proposition de John Hillcoat, un autre très grand western de récente mémoire, qui partage avec le présent film un goût commun pour un style contemplatif zébré de brusques éclairs de violence.

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford n’est pas un film facile d’accès, mais il hante le spectateur longtemps après la projection, on a l'impression d'avoir vu un western réalisé par Terrence Malick


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De Nicoco, le 12 mars 2012 à 21:28
Note du film : Chef-d'Oeuvre

L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford n'offre pas beaucoup de surprise dans son scénario, le titre à lui seul est suffisamment évocateur. C'est un western contemplatif ce qui en soit peut dérouter les amateurs, dont je fais partie, des classiques du genre.

L'action n'y a pas vraiment sa place, le réalisateur joue là sur le terrain de l'esthétisme. La qualité de l'image est magnifiée par la beauté des paysages, par exemple ceux sous la neige dans la froideur d'un hiver qui glace le refuge de la bande de Jesse James. Ou encore les champs de blés à l'automone balayés par le vent et qui servent de terrain de cache cache aux comploteurs et futurs assassins de Jesse James.

Plusieurs scènes du film sont absolument magnifiques et relèvent, à mon sens, d'une certaine forme d'art. Le spectateur est happé par l'image qui se déroule sous ses yeux au rythme d'une musique envoûtante composée par le ténébreux et talentueux Nick Cave, chanteur du groupe The Bad Seeds.

On assiste terrifié et impuissant à cette lente décomposition d'un des plus célèbres bandit, gagné par la peur et la paranoïa, loin, très loin de l'image et de la crainte qu'il a pu susciter à cette époque. C'en est presque pathétique, surtout que Robert Ford, son plus fidèle confident, le dernier qui possède encore la confiance de Jesse James, est un pauvre homme, chétif, timide, peureux, qui ne vit qu'à travers son idole.

Parmi les scènes magnifiques, peut-on citer la scène de l'assassinat de Jesse James, point d'orgue du film. Cette scène se met en place comme s'il s'agissait d'une pièce de théâtre (d'ailleurs des représentations théâtrales de l'assassinat seront assurées par les frères Ford devenus subitement célèbres puis conspués pour avoir tué lâchement le hors la loi) : Jesse James comprenant que sa fin est arrivée, décide de se laisser tuer, pose ses armes sur une chaise, tourne le dos à ses bourreaux en feignant de nettoyer un tableau poussiéreux. La musique mélancolique de Nick Cave accompagne l'exécution. C'est poignant et absolument terrifiant.

De tels moments de grâce, le film en recèle bien d'autres (l'attaque du train, les frères Ford complotant dans les champs contre Jesse James, l'épilogue du film en forme d'apothéose…)

Les acteurs sont brillants, Casey Affleck avec sa voix nasillarde si agaçante, mais aussi Brad Pitt qui a obtenu un prix à la Mostra de Venise pour son rôle ; sa performance dans ce film est à saluer. Mais l'acteur qui crève l'écran est à mon sens un second rôle : il s'agit de Sam Rockwell qui joue le frère de Robert Ford et qui joue sa partition avec une touchante et incroyable justesse.

Du grand, du vrai cinéma. Un chef d'oeuvre. Je recommande vivement ce film.


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Avis


De Freddie D., le 2 février 2008 à 21:21
Note du film : 3/6

On peut être très dérouté par cet anti-western, qui enfonce le clou du réalisme, que ce soit dans la description de la vie au Far West, ou dans l'étude de la personnalité d'une légende populaire comme Jesse James. Sous les traits de Brad Pitt, le hors-la-loi est un psychopathe paranoïaque et maniaco-dépressif, dangereux, aussi peu fascinant que possible, évoquant ce que faisait l'acteur dans Kalifornia, et sa relation avec son futur assassin Bob Ford, peut renvoyer à celle de John Lennon et de son meurtrier.

Le film est très très lent, il traîne un cafard terrible, un mal-être total, accentué par une photo en quasi noir et blanc, et de sinistres paysages enneigés et sans végétation. Jesse James avait déjà été sérieusement démythifié par Philip Kaufman et Robert Duvall, mais ici c'est une époque tout entière, qui est exposée, sans son folklore habituel. Un peu assommant, mais pas inintéressant.


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