Nom : Viktor Profession : tueur à gages Profil: rapide, efficace et surtout ultra-silencieux Signes particuliers: tombe amoureux de la compagne de l'homme qu'il vient d'éliminer…

Résumé comme ça, on croit qu'on a affaire à un banal polar de série, conventionnel et routinier.Mais ce serait occulter plusieurs paramètres:

• la mise en scène quasi chirurgicale de Mennan Yapo, aiguisée comme un scalpel.

Chaque scène est découpée avec une extrême rigueur, pensée en termes d'efficacité et de rapidité. Cela nous vaut quelques scènes à suspense bien senties (un tueur, sanglé sous le lit d'un mourant, attend son heure…) Peu de scènes d'action finalement, mais celles-ci sont traitées sans fascination pour un spectaculaire facile: elles sont silencieuses, quasiment feutrées…

• scénario en béton armé, très inspiré par Melville : fascination flic/tueur qui se

transforme en admiration réciproque, love story vouée à l'échec (en apparence), froideur dans le déroulement du script. Nouveauté : un dénouement qui séduit par son amoralisme .

• interprétation impeccable de Joachim Kroll: aux antipodes du tueur romantique à la John Woo, il séduit par son côté banal, humain.

Résultat : un grand polar, rapide, efficace (comme Viktor). Comme quoi on peut encore réaliser un polar en suivant des règles éprouvés, sans tomber dans le cliché. Yapo montre en un film (son premier) qu'il a bien assimilé les règles ,tout en se forgeant une solide personnalité à l'intérieur d'un genre ultra codé. Cette démarche intègre fait plaisir à voir quand on est submergé par la nouvelle vague des polar british qui cultivent la dérision facile, le cynisme gratuit et finalement un grand dédain pour le genre traité…