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Avec la collaboration de Mauriac lui-même !


De Impétueux, le 4 février 2013 à 20:00

Je ne suis pas extrêmement féru de Mauriac, mais vous en soulignez si bien les fêlures que je regarderai sûrement Thérèse Desqueyroux.


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De Tamatoa, le 4 février 2013 à 15:19
Note du film : 5/6

François Mauriac, c'est d'abord et avant tout l'austérité. Même sa poésie s'en ressentait. Dans ce petit corps chêtif, étriqué, mille personnalités habitaient l'écrivain Bordelais, hanté par le péché, la méchanceté et une immense solitude. Eternelle obsession de l'académicien, a jamais éprouvé par une éducation catholique pure et dure. En clair, Mauriac, aussi talentueux soit-il, était un tordu.

Thérèse Desqueyroux est un reflêt, sinon parfait, du moins très fidèle de l'âme de l'écrivain. Thérèse Desqueyroux est un mélange de Madame Bovary et de Sagan qui aurait renoncé à la cocke et à l'alcool. C'est une immense traversée du désert, comme la vie de Mauriac même si il fut célèbre, reconnu et mille fois honoré. Thérèse Desqueyroux, c'est une lenteur entre mille hésitations, avec pourtant une rage d'exister dans un monde miroir aux alouettes. Emmanuelle Riva est parfaite dans ce rôle. Mais ne nous y trompons pas. Ce n'est pas Thérèse Desqueyroux, le sujet principal du film éponyme. Mais assurément son mari, Philippe Noiret. Il est bel et bien la laideur bourgeoise incarnée. La lâcheté qui va de pair avec ce petit côté monstrueux que possèdent tous les hommes de mauvaise volonté. Il aurait mille fois mérité, de par son attitude veule devant sa femme et sa condition qu'il protège avant tout, de finir empoisonné pour le compte. Et là, je rejoins Pm Jarriq pour dire que je ne vois pas quel autre comédien aurait pu endosser ce costume de pusillanime avec tant de brio. Il est petit, apathique, de façon magistrale ! Tout en remords de ce qu'il est, il ne se dépare jamais d'une contenance des plus ridicule. Il est un roi sans couronne. Il en a honte mais se doit de rester le gardien d'un temple infligé par un milieu qui se veut supérieur.

Mais là où réside la magie de ce film, c'est que le tragique latent de Mauriac s’accommode parfaitement avec le grâce, l'irréalité, la rêvasserie de Franju. Immense surprise ! Qui pouvait croire que le cinéaste et l'écrivain pouvaient un jour cheminer ensemble ? Et même si les palombes, indissociables de l’œuvre générale de Franju, sont ici moins aériennes parce que prisonnières des filets landais et de leurs coutumes, elles signent encore la recherche du fantastique dans le cerveau troublé de Thérèse Desqueyroux. Le cinéaste a suivi à la lettre le roman de Mauriac et n'a pas cherché à y apporter autre chose que les écrits premiers. Mais il a su parfaitement donner au film ce ton si particulier qui est le sien. Et Thérèse Desqueyroux se nourrit du malaise mauriacien, pesant, et de la divinité, de l'élégance du cinéma de Franju. Et cette alchimie, que l'on aurait pu croire vouée à l’échec, se révèle un breuvage pareil au vinaigre de cidre de pommes. L'acidité est bien là sans jamais être agressive puisque le cidre doux englobe le tout. Les immenses Landes et leur silence éternel, à peine entrecoupé de quelques chants d'oiseaux passants, symbolisent bien la personnalité de cette femme, toute vouée à une méditation constante, à peine dérangée par une obsédante envie d'exister ailleurs qu'en elle même..Et le visage diaphane ajouté à l'indolence d' Édith Scob, qui se voudrait tendre répit près de Thérèse, ne font qu'accentuer ce malaise feutré.

Et des acteurs merveilleux, très lentement, à pas comptés, nous racontent l'histoire de cette femme inconsolable devant un monde bourgeois qu'elle croyait être un Eldorado et qui se révèle un univers désespéré, habité de gens accablés d'être ce qu'ils sont..


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