Accueil
Voici les derniers messages de ce forum :

Critique


De dumbledore, le 2 mai 2005 à 00:26
Note du film : 3/6

Les biographies de peintres contemporains commencent à se faire de plus en plus nombreuses. De mémoire, on peut citer Pollock ou bien encore Frida. Il était bien naturel que le peintre anglais, Francis Bacon y est droit aussi. Sa vie dissolue, son style visuel très puissant qui inspira notamment Bernardo Bertolucci dans Dernier Tango à Paris, dont il disait que Bacon réussissait à mettre sur les visages, les viscères, les boyaux – autrement dit la noirceur que l'homme peut avoir. Le peintre et la peinture étaient tellement forts qu'on devait bien se douter qu'ils finiraient exposés sur grand écran.

Le réalisateur-scénariste John Maybury a choisi de prendre une tranche de la vie de Bacon, celle de sa rencontre avec un voleur, Dyer, qui devient son amant. De leur relation presque sado-masochiste va naître le style si propre à Bacon.

Ici, comme souvent, trop souvent peut-être, l'on cherche à expliquer le style artistique par les relations sexuelles. Freud et la psychanalyse ne diront sans doute pas le contraire, mais au résultat cela donne toujours – mis en cinéma en tous cas – une impression de simplification à l'extrème. « Ah bon sang, mais c'est bien sûr », il faut être tordu pour faire ce genre de peintures tordus.

Dans Love is the devil, on n'évite nullement ces clichés : relations homosexuelles sado-maso, parents malsains (mère surtout), proches pervers, etc, etc.

Du coup le tout paraît finalement réducteur de l'œuvre ou du talent du peintre dans une suite de clichés et d'absence de surprises.

L'autre grand défaut des adaptations cinématographiques des peintres, c'est cette tentation-tentative à laquelle tout le monde ou presque cède : faire avec la caméra les tableaux, autrement dit inscrire dans la réalité les univers visuels des peintres. On avait eu droit à ça dans Frida, dans la jeune fille à la perle, etc. Ici, on n'y échappe pas. Le réalisateur utilise grands angles, objectifs déformants. Il fait du Bacon… sans être Bacon.

Outre le fait qu'intellectuellement, ce n'est pas très ingénieux, que visuellement c'est pas très réussi, c'est sur le sens qu'on aura le plus de réserve : qu'est-ce que cela veut dire ? Que le monde est ainsi (déformé, visceral, etc) ? Non. Ce n'est pas vrai et toute la peinture contemporaine vous le diront avec fermeté : les peintures ne représentent pas le monde mais tout au mieux un regard sur le monde, une interprétation. Il aurait fallu alors – au minimum – que ces images déformées, ces pseudo-bacon, passent par des points de vue de Bacon lui-même. Il n'en est rien.

Minimum avons nous dit car on pourrait aller plus loin dans les processus de création en disant que la peinture n'existe pas seulement dans le regard du peintre, mais qu'elle n'existe, qu'elle naît que dans l'acte même de peindre. Du coup, faire des pseudo-bacon même dans les points de vue du personnage est un raccourci…

Même si Love is the devil n'est pas encore le film de fiction qu'on attend sur la peinture, il reste deux choses qui peuvent séduire : d'abord le personnage lui-même que le grand public ne connaît peut-être pas et que le film propose de découvrir. Ensuite, il y a Derek Jacobi, le comédien qui joue Bacon et qui est absolument formidable.


Répondre

Installez Firefox
Accueil - Version bas débit

Page générée en 0.0024 s. - 6 requêtes effectuées

Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter