Un gros, gros 4. J'aurais vraiment bien peu à ajouter au commentaire éloquent d'Impétueux. Sinon qu'Edward Scaife est un chef opérateur qui mériterait plus de renom ! Les images de ce film sont vraiment splendides, les couleurs et la texture ont ce caractère d'enluminures que les auteurs, je le présume, souhaitaient obtenir. La musique de Georges Delerue est fort belle mais peut-être pas très historique. Si la jeune Anjelica Huston est un choc (et il paraît que le tournage fut pour elle une terrible épreuve), son partenaire est plus convenu, fils de général ou pas.
On espère toujours qu'un film aussi rare – ici ramené à la surface dans une édition plus que convenable – soit un chef-d'oeuvre. Eh bien, ce n'est pas le cas, mais c'est un très beau film. Son caractère épisodique – annoncé par le titre il est vrai – fait parfois vaciller l'intérêt. Mais c'est court, alors on n'a guère le temps de s'ennuyer. Enfin, tout n'est pas à hauteur égale, disons. Mais plus on approche du finale, mieux c'est. Du vrai bon Huston, simple, poétique et direct. Et puis le manque de moyens ne correspond-il pas fort adéquatement, au fond, à l'humble austérité de cette époque fruste et frugale ?
Beau film grave, souvent en forme de parabole, d'illustration imagée de la difficulté d'aimer au milieu des incertitudes et des haines qui s'engage comme un récit picaresque, non dénué d'épisodes presque comiques, et en tout cas grinçants, sarcastiques (le vendeur de fausses reliques, la secte illuminée et doloriste), se poursuit par des séquences cruelles et désespérantes, pleines de mort et de fureur, et s'achève sur l'harmonie presque sereine des deux jeunes gens qui viennent de se donner le sacrement de mariage et, presque apaisés, entendent, après s'être aimés, arriver leurs assassins…
Ce qui m'a semblé être une certaine étroitesse du budget n'est en rien gênant : la qualité de la photographie, la capacité de John Huston à saisir ici et là, par l'originalité des plans ou l'équilibre des compositions, la représentation qu'il souhaite donner, sereine ou sauvage, suffisent à conférer à Promenade avec l'amour et la mort de la force tout autant que du charme.Si la très jeune alors (16 ans) Anjelica Huston est aussi lisse et attachante que le veut le rôle, je suis plus réservé sur le jeu d'Assi Dayan (paraît-il fils de Moshé, héros israélien de la Guerre des Six Jours), trop beau mec, à l'allure ici trop assurée, là trop niaise. À noter une étonnante (mais très brève) composition de John Huston lui-même, dans le rôle d'un vieux seigneur sceptique, lucide, désabusé…
L'édition DVD (VOST uniquement) est de bonne qualité et bénéficie d'un commentaire de Michel Ciment qui couple Promenade avec l'amour et la mort et Gens de Dublin, dernier film de Huston ; commentaire qui souffre toutefois à mes yeux d'un trop vif engagement marxisant et tente d'enrégimenter le réalisateur sous la bannière de la lutte des classes ; il ne m'a pas paru que le film militait dans le sens des uns ou des autres qui ravagent le pays ; il y a moins, me semble-t-il, une prise de position que le regret du bouleversement d'un ordre du monde apaisé où les amoureux pourraient s'aimer…Qui sait, à force de nous lamenter sur l'invisibilité de ce film de John Huston, peut-être notre cri de détresse sera-t-il entendu ?
Je me joins à vos votes. Je ne l'ai jamais vu et c'est un des seuls Huston que j'ai raté avec – et c'est encore plus grave, je crois – son tout dernier, "Les gens de Dublin".
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