En 1976, je n'étais qu'au collège, mais le film – pour lequel j'éprouve une certaine tendresse – me rappelle souvent mes années lycée (au point d'avoir pensé – à certains moments – qu'il avait été tourné dans mon propre lycée).
Cela dit, dans mon lycée à moi, nous étions beaucoup plus sages, à l'image de ces lycéens décrits par Annie Ernaux dans "Les Années" (2008) :
Les jeunes étaient raisonnables, pour l'essentiel ils pensaient comme nous. Ils ne chahutaient pas au lycée, ne contestaient ni les programmes, ni le règlement, ni l'autorité et ils acceptaient de s'ennuyer pendant les cours.
Abstraction faite de trois voyous qui chahutaient la pauvre prof d'espagnol, c'est ce que j'ai connu au tout début des années 80.
Le "Voglio una donnaaa !" de Romain Duris, je l'ai connu, mais lors d'une sortie scolaire avec la prof d'Histoire (qui nous avait emmenés voir Amarcord pour nous mettre dans l'ambiance de l'Italie des années 30… c'était en des temps où il était possible de voir des films à Paris trèèès longtemps après leur sortie).
J'ai l'air de découvrir le monde et de faire mine d'ignorer qu'au milieu des années 70 le ver avait largement commencé à boulotter le fruit, jusqu'à parvenir jusqu'à aujourd'hui. Aujourd’hui où il y a longtemps que les pépins et le trognon ont été dévorés et où les gens un peu sérieux placent leurs enfants dans des établissements sélectifs à 100 % de mentions (94,5 % de Très Bien à Stanislas). Alors que de mon temps la mixité sociale était largement plus réelle.
Après avoir déversé toute cette bile noire, qu'est-ce qui me reste à dire sur ce qui fut primitivement un téléfilm, dont le succès aboutit à le faire passer sur les écrans et à recueillir un certain succès ? Succès plutôt justifié, au demeurant, parce que tout cela ne manque pas de rythme ni de drôlerie et que si on veut bien mettre de côté l'aspect sociétal désastreux, Le péril jeune fonctionne plutôt bien, porté notamment par de jeunes acteurs talentueux qu'il allait à peu près révéler : Romain Duris, Vincent Elbaz et les désormais bien en retrait Élodie Bouchez et Hélène de Fougerolles. Les péripéties avec les parents, les frères et sœurs, l'administration du lycée sont traditionnelles mais bien racontées. Et l'époque décrite obligeait presque qu'on fît un détour dans un squat pourri où l'élaboration de toutes les mixtures hallucinogènes possibles et imaginables est tenue pour un des beaux-arts. Depuis More de Barbet Schroeder en 1969, la drogue était sortie des cénacles plutôt confinés, composés d'anciens coloniaux, d'artistes ambigus et de loques humaines explorés dans Razzia sur la chnouf. En 1976, elle se posait comme un moyen original de dire Zut au monde entier ; c'était un piège si bien fait que Tomasi/Duris s'y laisse glisser. Une autre solution était le suicide à la suite de la prise de conscience que ce même monde ne se change pas (Mourir à trente ans (1982) de Romain Goupil qui conte la mort de son ami Michel Recanati en 1978).Un peu de patience : en 1981, c'était le camarade SIDA qui allait venir faire son marché dans la jeunesse. Y'a pas à dire, Mai 68 c'était formidable !
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