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Critique


De vincentp, le 29 juillet 2010 à 00:18
Note du film : Chef-d'Oeuvre

Note : entre 6/6 et chef d'oeuvre (j'ai hésité). Une peinture sans concession de l'aristocratie britannique -ses moeurs, comportements, étiquettes, sont hachés menus-, doublée d'une réflexion sur l'arrivisme, le processus de création artistique, et le passage du temps. Le peintre de ce récit (personnage principal) porte un regard sans complaisance sur le monde artificiel qui l'héberge tout en retirant un bénéfice social et matériel de celui-ci.

La photographie -travail sur la perspective, la lumière- est magnifique, les dialogues -multipliant les périphrases assassines- de haute volée, l'emploi de la musique est remarquable, et la mise en scène d'un brio étourdissant. Quelques ombres avançant sur le sol pour manifester l'écoulement du temps, mais bien d'autres trouvailles, en particulier des "plans-balançoires" (travelings latéraux) qui ressemblent à ceux de Vivre sa vie pour suivre les dialogues des personnages. Relevons aussi un humour caustique, très britannique, qui n'est pas sans rappeler celui des Monty Python. Mais la principale qualité de ce long-métrage me semble être un dosage parfait d'élements contradictoires : expérimentation formelle et classicisme narratif, par exemple.

Un chef d'oeuvre de Peter Greenaway (avec peut-être simplement quelques scènes d'un intérêt moindre vers les 90 minutes), mais pouvant être d'un accès un peu difficile pour le cinéphile néophyte, comme le fait remarquer Dumbledore.

Nb : la restauration numérique produisant un résultat de très grande qualité, l'intérêt des bonus -notamment l'intro de Greenaway- du dvd édité chez MK2 justifie la place de ce dvd dans une bonne médiathèque !


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De dumbledore

L'intérêt du cinéma de Peter Greenaway, c'est qu'il se situe à la frontière entre le cinéma narratif et le cinéma expérimental. Peter Greenaway, prend une histoire « normale », classique même, et par sa mise en scène dédramatise l'histoire, crée une distance entre le spectateur et le film auquel il assiste. Un peu comme le faisaient les « nouveaux » romans de Robbe-Grillet par exemple. Ce rapport entre le film et le spectateur est devenu naturellement un des thèmes de prédilection de son cinéma, et de Meurtre dans un jardin anglais en particulier.

La mise en abyme est au centre de cette composition cinématographique. Le terme de composition issue de l'art moderne est ce qui décrit le mieux cet objet cinématographique tant la mise en scène est non-conventionnelle. Très peu de mouvements de caméra, les personnages toujours ou presque filmés frontalement alors que les décors eux (quand ils sont vus par la « machine » du peintre) sont proposés avec une perspective appuyée, plans très longs avec beaucoup d'air en tête et queue de plan, etc… L'effet que tout cela procure est un peu le même que celui que doit avoir le dessinateur lui-même : d'être spectateur distant d'un monde à part, l'aristocratie.

Seulement la composition va s'effriter peu à peu : le dessinateur essaye d'entrer dans le monde qu'il décrit et devient lui-même objet de peinture. Mangé par le miroir, il devient lui-même reflet à travers la vision des autres, à travers les idées des autres. Il perd dès lors son identité.

Cette analyse est bien sûr réductrice tant le film est le produit d'un réalisateur particulièrement intelligent et cultivé. Plein d'autres thèmes sont abordés : le rapport de l'art et du pouvoir (le dessinateur peut-être généralisé en n'importe quel artiste), le statut du dessin au XVIIème siècle et son souci de réalisme qui ne va pas durer très longtemps, etc…

Une grande œuvre, complexe mais peut-être un peu difficile d'accès, qui mûrit avec le temps.

A souligner la magnifique musique de Michael Nyman.


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