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Forum : La Bataille d'Alger

Sujet : intelligent, redoutablement efficace et émouvant:


De belgo, le 2 septembre 2004 à 22:50

Quelle découverte pour moi! Comme quoi il n'est jamais trop tard pour redécouvrir de vrais chefs-d'oeuvre. Les débuts de la guerre d'indépendance de l'Algérie dans Alger: le terrorisme et la répression comme si vous étiez… Mais en fait, aujourd'hui, on y est si souvent…


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De Arca1943, le 3 septembre 2004 à 13:22
Note du film : 6/6

Dans les retombées du massacre du 11 septembre, quand ils réfléchissaient aux moyens de contrer la menace terroriste, c'est ce chef-d'oeuvre de Gillo Pontecorvo que les hautes autorités de Washington ont visionné en petit comité. Cette anecdote a pour moi la valeur d'un aveu : pour la rêverie rassurante, rien ne vaut Hollywood. Mais quand il faut de la réalité brute et crue, de la représentation sans fard de la réalité historique, c'est évidemment à la porte de Cinecittà que l'on vient tambouriner, penaud ! Ha ! Et étant donné l'avanie irakienne, nos amis auraient peut-être aussi bien fait, un coup de parti, de visionner La Peau

Arca1943


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De Arca1943, le 20 novembre 2005 à 18:48
Note du film : 6/6

Dynamique et implacable, ce film n'a pas pris une ride. Et c'est une très belle réédition, ce qui ne gâche rien. Une des forces de La Bataille d'Alger, c'est ce réalisme qui évite les grandes phrases. Dans le contexte d'une victoire sur le colonialisme qui vient d'être remportée, on aurait pu s'attendre à un film triomphaliste, un film de propagande pure et simple, comme certains films soviétiques, par exemple. Une chose qui serait vite devenue irregardable. Heureusement, il n'en est rien, même si Pontecorvo est clairement d'un bord et pas de l'autre. D'une sobriété exemplaire, La Bataille d'Alger s'efforce d'abord de présenter clairement les enjeux, les forces en présence, les stratégies, dans un style sec, précis et efficace, mais qui ne craint pas d'être aussi un grand spectacle. C'est un film historique construit comme un suspense à haute tension, selon les conceptions qui font florès en Italie à l'époque avec Main basse sur la ville ou La Bataille de Naples et plusieurs autres. Aussi, je ne connais pas Alger, mais je constate que ce n'est pas une ville horizontale : on monte et on descend tout le temps. Les auteurs ont su exploiter cet aspect du décor réel avec un rare bonheur. Les acteurs, tant français qu'algériens, sont tous convaincants; certains, je crois, revivent leurs aventures devant la caméra – tradition néoréaliste oblige. La musique d'Ennio Morricone (et Pontecorvo) est inoubliable.

Bref c'est un chef-d'oeuvre à voir absolument !


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De Impétueux, le 21 novembre 2005 à 12:02
Note du film : 6/6

Je n'ergoterai pas sur le caractère idéologiquement engagé de cette Bataille d'Alger dont l'inspiration valut au film, lorsqu'il fut présenté en France, de très nombreuses manifestations hostiles, mais je vous chipoterai sur une apparente méconnaissance cinématographique qui me surprend, venant de vous : c'est bien avant l'œuvre de Pontecorvo que vous pouviez constater qu'Alger la blanche était en pente…. c'est tout simplement dans Pepe le Moko où tout est bâti sur cette particularité de la ville !


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De vincentp, le 17 mai 2010 à 23:12
Note du film : Chef-d'Oeuvre

Le point de vue algérien de la bataille d'Alger (1957), ses origines, ses développements. Un aspect quasi-documentaire, ethnographique, porté par de très grandes qualités cinématographiques : scénario, interprétation, mise en scène (un air de Rome, ville ouverte), de bout en bout exemplaires. L'emploi de la musique, renforçant des idées ou des émotions, est remarquable, car étant le parfait contrepoids de l'aspect clinique de ce récit. Les auteurs de celui-ci sont à la fois proches des personnages, tout en adoptant un point de vue distancié. On ne peut à ce sujet que louer leur prise de recul, évitant tout manichéisme, montrant l'ambigüité des acteurs de ce conflit : sur ce lieu de combat, les actions des uns et des autres vont à l'encontre de leur personnalités profondes. L'humanité des protagonistes s'efface. Impressionnant à ce sujet Jean Martin, dans le rôle du chef des paras à la tête de ses troupes, sourire aux lèvres, mélange de force implacable et de douceur emphatique, sûr de sa victoire militaire à venir… Mais ce conflit ne pouvait être gagné par la force et aurait du être réglé par les politiques de l'époque…

Sans surprise, ce film de Gillo Pontecorvo fut couvert de récompenses internationales à sa sortie en 1967 (Lion d'or à la Mostra de Venise 1966,…). Un film impressionnant et à découvrir absolument.


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De Arca1943, le 18 mai 2010 à 02:28
Note du film : 6/6

« Ainsi que la prise de recul des auteurs par rapport au sujet, évitant tout manichéisme. »

Sans qu'on puisse évidemment mettre les deux choses égales sur les plateaux d'une balance avec le ramdam que provoqua ce film en France, j'aime à faire remarquer que ce film suscita aussi un peu de controverse parmi ses sponsors et son public algérien de l'époque, mais si mais si, à cause de la scène où l'on voit mourir un enfant français dans un attentat à la bombe du F.L.N. Et pour accompagner la mort d'un enfant algérien comme d'un enfant français, d'autres avant moi ont fait remarquer que la prenante musique d'Ennio Morricone est rigoureusement la même : umanismo all'italiana.

À mon avis, c'est un vrai coup de génie qu'ont eu ces nationalistes algériens de faire appel à des étrangers pour tourner leur film – se montrant en fait, sur ce coup-là, plus patriotes que nationalistes.


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De vincentp, le 19 mai 2010 à 23:10
Note du film : Chef-d'Oeuvre

Avec quelques jours de plus de réflexion, il me semble que Pontecorvo et ses collaborateurs ont réussi à produire un spectacle qui dépasse le cadre du simple conflit algérien : une réflexion puissante sur les ressorts d'une révolte collective face à un pouvoir oppressif. Ce n'est pas particulièrement un film pro-FLN ou marxiste (il est susceptible de toucher la sensibilité d'un public varié). On peut ainsi remarquer que le colonel Mathieu est décrit comme un individu ayant résisté à titre personnel face au nazisme : il manifeste du respect vis à vis de ses adversaires, bien qu'employant la force à leur égard, car s'étant retrouvé jadis dans la même situation qu'eux.


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De Impétueux, le 21 avril 2012 à 22:18
Note du film : 6/6

Je me demande bien pourquoi une bande d'excités (dont j'étais, il est vrai…) a prétendu faire interdire, en 1970, la diffusion en France de La bataille d'Alger, parce qu'elle estimait que c'était une œuvre partiale, agressivement antifrançaise et démesurément favorable aux fellaghas tueurs. Pour toute ma génération, l'Algérie est une blessure qui se cicatrise bien mal.

Qui pouvait penser, en 56, 57, 58 que l'Algérie n'était pas un des plus beaux fleurons de la capacité française à assimiler des peuples très divers, comme elle l'avait fait des Bretons, des Alsaciens, des Basques, des Corses ? Quelques altermondialistes exaltés, des agents de Moscou et le visionnaire Général de Gaulle. Pour l'opinion publique, les trois départements, français depuis 1830, c'est-à-dire trente ans avant Nice et la Savoie, étaient irréversiblement attachés à la métropole.

Cinquante ans après l'indépendance, acquise en 1962, je ne me suis toujours pas remis de la tragédie, mais je ne puis que constater et me rendre compte que la coupure était irrémédiable et impossible à empêcher. C'est bien de cela que rend compte le film de Pontecorvo. Nullement œuvre de propagande, mais constat froid et désolant de l'inéluctabilité des choses.

La bataille d'Alger est une chronique du désastre, avec toute la logique de tous les désastres, de toutes les mécaniques qui s'enclenchent fatalement. Au terrorisme répond le contre terrorisme. Aux attentats aveugles répondent les tortures.

Et c'est bien facile, lorsqu'on est assis dans son fauteuil, dans des sociétés à peu près apaisées, de juger les événements avec toute la jactance morale des donneurs de leçon. Pour sensibiliser le monde au sort de mon pays, il faut qu'il y ait du sang, partout du sang et beaucoup de sang. Et je place une bombe dans un bistrot, et je sais que des tas de gens qui ne sont pour rien, ou pas grand chose dans ma querelle, qui n'y sont peut-être même pas hostiles vont exploser. Comment faire autrement ?

Et je sais que celui-là que je détiens, que j'ai entre les mains, a placé une bombe quelque part. Ou peut me dire où est la bombe. Et je veux le faire parler pour sauver des vies qu'il veut perdre. Qu'est-ce qu'on fait, lorsqu'on sait que quelqu'un sait ? Et jusqu'où va-t-on pour savoir ?

Le film de Pontecorvo est admirable en ceci qu'il pose ces vraies questions, sans angélisme et sans niaiserie. Le parti pris est clair, mais le constat est froid. Ali la Pointe (Brahim Haggiag), dont le film relate l'histoire n'est pas présenté comme un héros immaculé de légende, mais bien pour ce qu'il a été : un petit délinquant illettré, qui a mis des filles sur le trottoir, mais qui trouve son épopée, sa hauteur et sa justification dans le combat qu'il adopte presque par hasard.

Les événements grandissent les hommes – ou les abaissent -, les mettent en situation, les placent devant leurs responsabilités et leurs nudités : ici et maintenant, qu'est-ce que je fais ?

Ensuite, l'Histoire décide. Sur le point de l'Algérie, elle a tranché : tant pis pour ceux qui sont morts du mauvais côté, Pieds-Noirs, Harkis, soldats de carrière ou du contingent. C'est bien dommage, mais c'est ainsi. Je suis sûr que le colonel Mathieu du film (en fait le colonel Gardes), admirablement interprété par Jean Martin, réagirait ainsi aujourd'hui, avec cinquante ans de recul…

L'Algérie, fallait peut-être pas y aller. Mais quand on voit ce que c'est maintenant, on peut se demander si en partir a arrangé les choses…

Une coïncidence me fascine : vient de paraître, chez Flammarion, une Lettre à Zohra D. de Danielle Michel-Chich ; Zohra Drif est une de ces trois jeunes filles qui, vêtues à l'européenne, déposent leurs bombes, le 30 septembre 1956, dans deux cafés de la ville européenne et à l'agence d'Air-France, comme le film le relate fort bien. Danielle Michel-Chich est une des victimes ; elle avait cinq ans et elle mangeait une glace avec sa grand-mère ; elle a perdu une jambe dans l'attentat, et sa grand-mère est morte. Tout n'est pas simple.


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De vincentp, le 22 avril 2012 à 13:16
Note du film : Chef-d'Oeuvre

La question de l'indépendance de l'Algérie reste d'actualité aujourd'hui (idem pour le film de Pontecorvo). Elle se pose pour la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, et le Nouvelle-Calédonie (voire pour la Corse, mais dans une moindre mesure). Les flambées de contestation y fleurissent régulièrement, comme ce fut le cas pour l'Algérie. Pour le moment, les problèmes sociaux ou économiques de ces contrées sont traités par des subventions (ou des promesses de subvention) publiques ; l'enrichissement économique, éducatif des autochtones constitue un moyen de perpétrer un système d'origine colonial, aujourd'hui fragile. Ce problème algérien n'est pas seulement lié au passé, au travail de deuil lié à la perte de territoires…

Pour en revenir au film de Pontecorvo, sa grande force est aussi d'avoir été tourné sur les lieux même de l'action, avec de gros moyens. Regardez à titre comparatif Alexandrie, pourquoi ? tourné avec quelques ficelles de mise en scène, et vous comprenez pourquoi La bataille d'Alger a un tel impact.


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De Impétueux, le 22 avril 2012 à 18:26
Note du film : 6/6

Comment pouvez-vous comparer, Vincentp ? (La question coloniale) se pose pour la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, et le Nouvelle-Calédonie (voire pour la Corse, mais dans une moindre mesure). Les flambées de contestation y fleurissent régulièrement, comme ce fut le cas pour l'Algérie. Comment pouvez-vous imaginer que quelques jacqueries, émeutes, manifestations violentes dans les départements d'outre-mer puissent être comparées à ce que fut une guerre qui s'enlisait, au point d'obliger le socialiste Guy Mollet à faire participer le contingent ? Quel rapport… Ce qui se passe à la Guadeloupe, de temps en temps, ressemble davantage à des éruptions comme nous en avons connu en banlieue, en dernier lieu en 2005, et comme on devrait en voir de plus en plus, hélas…

La Nouvelle-Calédonie est plus semblable, tout au moins il y a vingt cinq ans, au moment d'Ouvéa… Ça ressemble… mais avec la différence fondamentale que les Caldoches sont plus nombreux que les Canaques…

Quant à la Corse, je pense vraiment qu'il n'y a aucun rapport… Je ne méconnais pas la force du sentiment identitaire insulaire (peut-être encore plus fort au pays basque), mais c'est la même civilisation, le même mode de vie… Rien à voir avec la tragique différence non-intégrable qu'il y avait en Afrique du Nord…


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De vincentp, le 22 avril 2012 à 19:59
Note du film : Chef-d'Oeuvre

Derrière les "jacqueries" comme vous dites, il y a des questions politiques. Les "collectivités d'outre-mer" sont dépendantes financièrement, économiquement de la métropole, plus tournées vers celle-ci que vers des pays qui leur sont proches, avec un problème de coût des produits de la vie ordinaire. Les descendants des colons y tiennent souvent aujourd'hui les leviers économiques. On souhaite à ces territoires de surmonter leurs difficultés de manière pacifique… Mais ce sujet sur les colonies anciennes ou encore existantes sous d'autres formes est sans doute un puits de discussion sans fin…

Sur les questions coloniales, de nombreux films existent bien sûr, mais ceux qui me viennent spontanément en-tête sont : La dernière vague, Le dernier des mohicans, Le grand passage, African queen, au risque de se perdre, Zoulou, Casablanca, guerillas, Pepe le moko et La bandera


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De Impétueux, le 22 avril 2012 à 22:53
Note du film : 6/6

Que les jacqueries témoignent de situations économiques particulières, c'est évident ; imaginez-vous un instant ce que peut être le développement économique de territoires qui bénéficient du RSA, de la CMU, des Allocations familiales, de tous les avantages sociaux que notre pays offre à ses citoyens. Et qui ne peuvent rivaliser avec les territoires sans la moindre charge sociale dont ils sont entourés… pour produire quoi, au juste ? Vous imaginez une usine de construction d'automobiles ou d'avions à la Martinique ?

Mais une jacquerie n'a vraiment pas de rapport avec une guerre révolutionnaire : dans les jacqueries, on casse les vitrines et on pille les magasins. Une guerre révolutionnaire a une tout autre dimension, plus austère et plus sanglante.

Mais revenons au film et ne réfléchissons pas avec l'anachronisme habituel.

Oui, revenons au film ; le seul bémol que je pourrais y donner est l'absence de toute perspective, de tout point de vue pied-noir… Mais, compte tenu des conditions de tournage, ça n'a rien d'étonnant. C'est néanmoins un film grave, nuancé, solide, intelligent, que je suis bien content d'avoir découvert quarante ans après…


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De Arca1943, le 22 avril 2012 à 23:48
Note du film : 6/6

Je serai toujours perplexe devant le colonialisme, qu'il s'agisse des Arabes en Sicile ou des Français en Algérie. Ils s'attendent à être aimés, quoi ? Les briseurs de lois de l'Inde (comme les appelait le conservateur Edmond Burke) tombent des nues d'être tenus pour des envahisseurs, des prévaricateurs ?

L'Algérie chronologiquement partie de la France avant Nice et la Savoie, bon. Une question toutefois que je me pose – dans mon ignorance de touriste en fauteuil – c'est le découpage de la carte électorale française, disons après la chute du régime de Napoléon III jusqu'en 1960. L'Algérie faisait alors partie de la République française, m'explique-t-on. Bien. Les Algériens d'alors étaient des Français. Parfait. Bienbienbienbien. Alors, elle était divisée en combien de circonscriptions électorales, cette région-là de la France ? Sous les différentes moutures de la République de 1870 à 1960, ces citoyens français qu'étaient – toujours si j'ai bien compris – les Algériens, ils envoyaient combien de députés à la Chambre ?

Mais si d'aventure la réponse est : mais non Arca, tu te gourres, ces Français arabes, ces Français musulmans n'étaient pas citoyens, ils étaient tenus pour Français tout en n'ayant pas le statut de citoyens, eh bien alors tout s'explique ! Je vois mal comment d'aucuns peuvent se surprendre, jouer les étonnés de ce qui arriva. Pardi : ces Français-là n'étaient pas citoyens ! Tout est là, voyons. Ça saute aux yeux. La citoyenneté – et non la nationalité – est la clé de voùte. Sans elle, sans ce principe, rien de durable ne peut être construit, rien de constructif ne peut être envisagé, aucune concorde n'est pensable, on court forcément à l'injustice, à l'anarchie, au chaos, au désastre. Et c'est ce qui arriva, c'est l'aboutissement de cette erreur que décrit La Bataille d'Alger.


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De Impétueux, le 23 avril 2012 à 22:27
Note du film : 6/6

Mais qui vous dit le contraire, Arca ? J'ai mis des litres d'eau dans mon petit verre de vin depuis 1962 et j'admets bien volontiers, comme Montherlant (dans Le maître de Santiago) que Les colonies sont faites pour être perdues

Il était inéluctable que la France quittât l'Algérie, faute soit d'avoir donné la citoyenneté à tous ses habitants… ou de les avoir massacrés, comme l'ont fait, au 8ème siècle, les Arabes envahissant les Berbères, puis, mille ans plus tard, les Australiens massacrant les Aborigènes, ou les Étasuniens se débarrassant des Indiens…

Un beau roman, Fort Saganne, tiré d'un roman de Louis Gardel, et qui a donné lieu à une adaptation tournée par Alain Corneau, le dit, avec une certaine crudité : Ces gens-là ne sont pas comme nous, Saganne : il faut les massacrer ou s'en aller….

Je n'ai pas dit que j'avais la solution. Je dis et je redis qu'on voit un bien beau film, avec La bataille d'Alger : un film où chacun a sa logique. Ensuite, l'Histoire tranche. Elle a tranché. Ça va. Mais ça n'empêche pas la nostalgie d'Alger la blanche ni la tristesse devant tant de morts pour arriver à la situation d'aujourd'hui, entre la folie des islamistes et la corruption des gouvernants.

Le monde n'a rien de moral. Tenons honneur au cinéma de nous en faire quelquefois saisir la complexité.


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De Arca1943, le 30 octobre 2012 à 17:08
Note du film : 6/6

« Mais ça n'empêche pas la nostalgie d'Alger la blanche ni la tristesse devant tant de morts. »

Je crois que cette controverse – que je ranime des lunes plus tard, sans motif particulier – tient au fait que vous me parlez sentiments alors que je vous parle politique. Je dois dire que l'irrationalité (non la vôtre mais celle de la France à une autre époque) a le don de me faire grimper aux rideaux. Le désastre dont vous parlez n'était sans doute pas inéluctable – ou alors, l'indépendance de l'Algérie était sans doute inéluctable mais ne se serait pas faite de manière aussi sanglante et chaotique – n'eût été de cette mesure absurde, bizarre, à l'envers du bon sens le plus élémentaire, prise au XIXème siècle: à savoir, bien précisément, que les Algériens nouvellement conquis étaient officiellement tenus pour des nationaux français, mais aucunement citoyens de la République française ! Mais bon sang de bois, mais tabarnac, qui est donc le fieffé imbécile qui a introduit cette recette du chaos ?

Vous me citez Fort Saganne, et «Ces gens-là ne sont pas comme nous». Bon. Alors oui, bien évidemment, la civilisation arabe est une chose et la civilisation française une autre : alors, donc, en effet, les Arabes n'étant «pas comme nous» (nous les Français) et les Français n'étant «pas comme nous» (nous les Arabes), les Algériens n'étaient donc pas du tout des nationaux, à l'évidence ! C'est vous-même qui le confirmez en ayant recours à cette citation ! Par contre, la CITOYENNETÉ, elle – fait politique, juridique et administratif – n'implique aucunement une affaire d'identité nationale. Si ces dirigeants Français du XIXème siècle avaient eu ne serait-ce que pour deux doigts de bon sens, de respect pour la réalité, ils auraient décrété bien évidemment le contraire de ce qui fut décrété : à savoir, que les Algériens nouvellement conquis n'étaient certes pas des nationaux (vu que "pas comme nous" et vice-versa), mais que suite à la conquête militaire de leur pays par la France, ils étaient désormais des citoyens de la République française. Et là, ça aurait pu se tenir à la rigueur.

Ce qui m'enrage le plus dans cette histoire, c'est que – ais-je découvert à ma grande surprise – ces législateurs mal avisés du XIXème siècle comprenaient parfaitement, eux, de façon tout à fait claire, la distinction entre citoyenneté et nationalité dont nous aurions tant besoin à notre époque où la confusion entre les deux est de plus en plus grande (et périlleuse). Mais voilà, ayant cette distinction si utile très claire à l'esprit, ils l'ont appliquée à l'envers, décrétant ces nouveaux Français comme nationaux mais pas citoyens, alors qu'ils auraient dû être tenus pour citoyens mais pas nationaux. Voilà.


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De Impétueux, le 30 octobre 2012 à 18:17
Note du film : 6/6

Cher Arca, je suis absolument d'accord avec vous : la France, en Algérie, a multiplié les sottises, les impropriétés, les errances et les humiliations…

Il y a quelque chose que vous ne citez pas, mais qui est, en plus d'une honte, une idiotie absolue : le décret Crémieux de 1870 qui a accordé la citoyenneté française aux 35.000 Juifs d'Algérie, eux aussi installés depuis des siècles sur ce territoire. Cette disparité de traitement portait en germe toutes les erreurs de la suite…


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