3,5/6. David Lean a 76 ans quand il réalise La route des Indes. On sent que cette oeuvre d'une durée de 2h35 minutes (interminables) est le fait d'un cinéaste âgé, et plus tout à fait dans le coup, qui n'arrive pas à exprimer ce qu'il veut dire. Certains moments du film sont ridicules (l'arrestation du docteur Aziz, le départ de Mme Moore vers l'Angleterre, par exemple) et d'une façon générale l'intrigue mélodramatique ne convainc guère, et semble bien artificielle. Les figurants indiens censés porter une révolte ont l'air très contents d'être figurants…
Heureusement pour le spectateur courageux, la magie du cinéma opère par moments. Il y a des séquences très réussies (parfaite concordance des idées, des plans et de la musique de Maurice Jarre) comme celle qui voit la jeune femme monter vers sa chaise de témoin lors du procès, et la suivante consistant à produire le témoignage. Des aspects visuels très réussis également (plans fixes contemplatifs fixant la beauté et le mystère des paysages de l'Inde). Côté acteur, James Fox, pas forcément très bien entouré, est très bon du début à la fin, et sauve les meubles.
Superbe évocation de l’Inde coloniale que cette Route des Indes adaptée du fameux roman de E.M. Forster, écrivain britannique ayant lui-même vécu dans ce pays et connu personnellement ce qu’il raconte. Alors que ses autres romans traitant avec acuité et ironie des comportements de Britanniques dans leur pays ou à l’étranger ont été mis à l’honneur pour le septième art par James Ivory (Chambre avec vue, Maurice, Retour à Howards End…), c’est cette fois Sir David Lean qui s’y colle, et son film, fort fidèle au roman, ne dépare pas parmi ses autres chefs d’œuvre à grand spectacle que furent Le pont de la rivière Kwaï, Lawrence d’Arabie, Le docteur Jivago ou La fille de Ryan. Comme toujours la reconstitution historique est impeccable, la moindre image superbement composée (il faut dire que les paysages et la lumière s’y prêtent), et la musique (de Maurice Jarre) particulièrement envoûtante.
La distribution est elle aussi parfaite, aussi bien pour les sujets britanniques plus ou moins guindés (James Fox, Judy Davis…) que pour les indiens, dont un surprenant Alec Guinness en professeur hindou plus vrai que nature !
Le film traite des relations difficiles entre les colonisateurs anglais regroupés en une nouvelle caste se considérant comme supérieure, vivant autant que possible entre eux et comme en Angleterre malgré le climat et les spécificités locales, et les indigènes du pays qu’ils occupent, considérés le plus souvent avec condescendance voire mépris… Au mieux avec distance.
Le pire est de constater que même les meilleures intentions de rapprochement et de tentatives de compréhension mutuelles se soldent non seulement par des échecs mais par des difficultés et des drames, tel le procès pour tentative de viol du pauvre docteur indien qui a essayé de se montrer amical avec une jeune anglaise un peu plus ouverte et curieuse que les autres… L’incident se muant en véritable procès de la présence britannique en Inde. Nous sommes en 1928 et tout cela ne pourra pas durer, l’indépendance se profile et on pourra se reporter à ce sujet au très beau film sorti sur nos écrans cette année : Le dernier vice-roi des Indes.
Ce qui est frappant au regard de ce film, c’est aussi de constater combien l’Inde elle-même demeure irrémédiablement mystérieuse et incompréhensible aux étrangers, au point que les moments de contact les plus poignants de ceux-ci avec cette culture si différente ne provoquent pas une meilleure compréhension du pays mais une révélation de leurs propres désirs ou craintes demeurés jusque-là refoulés. C’est ainsi particulièrement le cas dans les scènes clés montant la jeune Adela troublée jusqu’au malaise par les sculptures érotiques d’un temple en ruine enfoui dans la végétation, puis face à elle-même dans la profondeur obscure et vide des grottes de Marabar…
Cette rencontre parfois violente avec soi-même par le biais d’un voyage exotique, au-delà des éternels rapports de force des humains entre eux au nom de la patrie ou religion que le hasard leur a donné, s’avère finalement le vrai sujet du film, et un thème récurrent chez David Lean, dont il s’agit de la dernière réalisation, une œuvre superbe et aboutie qui clôt sa carrière avec brio.
A noter : si La route des Indes est depuis longtemps disponible en librairie (notamment chez 10/18, un roman plus récent et complémentaire signé Damon Galgut et intitulé L’été arctique raconte la vie et les voyages de l’écrivain E.M. Forster, et permet de mieux comprendre son cheminement intime et littéraire. Paru en France en 2016 aux éditions de l’olivier, incontournable pour les amateurs…
Aucune date n'est particulièrement donnée, mais on peut penser que l'intrigue de La route des Indes se situe au début des années Trente. Quinze ans plus tard, en 1947, ce sera l'indépendance ; une colonisation britannique qui n'aura guère duré que 150 ans mais qui a marqué, au moins superficiellement, l'esprit de cet étrange pays contradictoire. On sent dans La route des Indes, monter l'exaspération des Indiens et on voit le désarroi des Britanniques qui comprennent, plus ou moins bien, que leur temps est révolu. Voilà le meilleur du film.
Ce qui va moins bien, c'est l'intrigue assez lourde, portée vers le mélodrame et l'emphatique. Le procès d'Aziz, accusé de tentative de viol d'Adela, lors d'une excursion dans les médiocres grottes de Marabar est particulièrement insatisfaisant et la fin n'offre qu'un bien médiocre coup de théâtre : l'humaniste Richard Fielding (James Fox) n'a pas épousé Adela, comme on le pensait depuis longtemps, mais la demi-soeur de Ronny, qu'on avait depuis longtremps oublié dans sa médiocrité.Près de trois heures pour en arriver là, c'est sûrement un peu excessif.
Avis entièrement partagé avec notre ami Impétueux ! J'ai été très très long avant de m'engager à voir le film que, pour bien faire, j'ai vu en français !…
Ce qui va moins bien, c'est l'intrigue assez lourde, portée vers le mélodrame et l'emphatique. Le procès d'Aziz, accusé de tentative de viol d'Adela, lors d'une excursion dans les médiocres grottes de Marabar est particulièrement insatisfaisant et la fin n'offre qu'un bien médiocre coup de théâtre : l'humaniste Richard Fielding (James Fox) n'a pas épousé Adela, comme on le pensait depuis longtemps, mais la demi-soeur de Ronny, qu'on avait depuis longtremps oublié dans sa médiocrité.
Près de trois heures pour en arriver là, c'est sûrement un peu excessif.
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