Forum - La Route des Indes - Extrêmement inégal, malheureusement...
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Forum : La Route des Indes

Sujet : Extrêmement inégal, malheureusement...


De vincentp, le 29 décembre 2013 à 23:21
Note du film : 3/6


3,5/6. David Lean a 76 ans quand il réalise La route des Indes. On sent que cette oeuvre d'une durée de 2h35 minutes (interminables) est le fait d'un cinéaste âgé, et plus tout à fait dans le coup, qui n'arrive pas à exprimer ce qu'il veut dire. Certains moments du film sont ridicules (l'arrestation du docteur Aziz, le départ de Mme Moore vers l'Angleterre, par exemple) et d'une façon générale l'intrigue mélodramatique ne convainc guère, et semble bien artificielle. Les figurants indiens censés porter une révolte ont l'air très contents d'être figurants…

Heureusement pour le spectateur courageux, la magie du cinéma opère par moments. Il y a des séquences très réussies (parfaite concordance des idées, des plans et de la musique de Maurice Jarre) comme celle qui voit la jeune femme monter vers sa chaise de témoin lors du procès, et la suivante consistant à produire le témoignage. Des aspects visuels très réussis également (plans fixes contemplatifs fixant la beauté et le mystère des paysages de l'Inde). Côté acteur, James Fox, pas forcément très bien entouré, est très bon du début à la fin, et sauve les meubles.


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De DelaNuit, le 14 août 2017 à 15:17
Note du film : 6/6

Superbe évocation de l’Inde coloniale que cette Route des Indes adaptée du fameux roman de E.M. Forster, écrivain britannique ayant lui-même vécu dans ce pays et connu personnellement ce qu’il raconte. Alors que ses autres romans traitant avec acuité et ironie des comportements de Britanniques dans leur pays ou à l’étranger ont été mis à l’honneur pour le septième art par James Ivory (Chambre avec vue, Maurice, Retour à Howards End…), c’est cette fois Sir David Lean qui s’y colle, et son film, fort fidèle au roman, ne dépare pas parmi ses autres chefs d’œuvre à grand spectacle que furent Le pont de la rivière Kwaï, Lawrence d’Arabie, Le docteur Jivago ou La fille de Ryan. Comme toujours la reconstitution historique est impeccable, la moindre image superbement composée (il faut dire que les paysages et la lumière s’y prêtent), et la musique (de Maurice Jarre) particulièrement envoûtante.

La distribution est elle aussi parfaite, aussi bien pour les sujets britanniques plus ou moins guindés (James Fox, Judy Davis…) que pour les indiens, dont un surprenant Alec Guinness en professeur hindou plus vrai que nature !

Le film traite des relations difficiles entre les colonisateurs anglais regroupés en une nouvelle caste se considérant comme supérieure, vivant autant que possible entre eux et comme en Angleterre malgré le climat et les spécificités locales, et les indigènes du pays qu’ils occupent, considérés le plus souvent avec condescendance voire mépris… Au mieux avec distance.

Le pire est de constater que même les meilleures intentions de rapprochement et de tentatives de compréhension mutuelles se soldent non seulement par des échecs mais par des difficultés et des drames, tel le procès pour tentative de viol du pauvre docteur indien qui a essayé de se montrer amical avec une jeune anglaise un peu plus ouverte et curieuse que les autres… L’incident se muant en véritable procès de la présence britannique en Inde. Nous sommes en 1928 et tout cela ne pourra pas durer, l’indépendance se profile et on pourra se reporter à ce sujet au très beau film sorti sur nos écrans cette année : Le dernier vice-roi des Indes.

Ce qui est frappant au regard de ce film, c’est aussi de constater combien l’Inde elle-même demeure irrémédiablement mystérieuse et incompréhensible aux étrangers, au point que les moments de contact les plus poignants de ceux-ci avec cette culture si différente ne provoquent pas une meilleure compréhension du pays mais une révélation de leurs propres désirs ou craintes demeurés jusque-là refoulés. C’est ainsi particulièrement le cas dans les scènes clés montant la jeune Adela troublée jusqu’au malaise par les sculptures érotiques d’un temple en ruine enfoui dans la végétation, puis face à elle-même dans la profondeur obscure et vide des grottes de Marabar…

Cette rencontre parfois violente avec soi-même par le biais d’un voyage exotique, au-delà des éternels rapports de force des humains entre eux au nom de la patrie ou religion que le hasard leur a donné, s’avère finalement le vrai sujet du film, et un thème récurrent chez David Lean, dont il s’agit de la dernière réalisation, une œuvre superbe et aboutie qui clôt sa carrière avec brio.

A noter : si La route des Indes est depuis longtemps disponible en librairie (notamment chez 10/18, un roman plus récent et complémentaire signé Damon Galgut et intitulé L’été arctique raconte la vie et les voyages de l’écrivain E.M. Forster, et permet de mieux comprendre son cheminement intime et littéraire. Paru en France en 2016 aux éditions de l’olivier, incontournable pour les amateurs…


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De Impétueux, le 15 octobre 2022 à 21:36
Note du film : 4/6

L'habileté du film de David Lean ne réside pas simplement dans la beauté extrême des images, de leurs cadrages, de leurs couleurs, de ce grand spectacle qui eut tant de force et de puissance dans le cinéma de jadis, qui conviait le monde entier à admirer des films de grandes aventures exotiques ou historiques. Paysages grandioses, costumes superbes, figurants par milliers, fresques majestueuses, sentiments exaltés… David Lean était d'ailleurs un expert en la matière : moins de génie qu'espéré, mais une très grande habileté à tourner des grandes machines qui marquent : Le pont de la rivière Kwaï, Lawrence d'Arabie, Le docteur Jivago. Toujours de la belle ouvrage efficace et solide.

Mais donc La route des Indes n'est pas que cela. Assurément somptuosité toujours séduisante de ce qu'on appelle un peu bêtement le sous-continent, cette terre d'Inde qui a tant et tant fasciné l'Occident et qui va devenir, d'ici peu, le pays le plus peuplé du monde. Sans pour autant pouvoir acquérir un statut de puissance majeure au regard de sa population, de son histoire et de son potentiel, figé entre cet immense potentiel, précisément, et une structure sociale archaïque, bornée, paralysante. On sait bien ce que l'Inde a pu perdre de ses traditions et de son identité avec la colonisation britannique ; mais on voit mal ce qu'elle a pu gagner en s'en débarrassant en 1947, tant la misère, la crasse, les inégalités de classes et de castes paraissent n'avoir pas diminué depuis lors.

Mais aussi, très habilement entrecroisés, deux thèmes essentiels, deux thèmes qui se répondent l'un à l'autre et qui brodent autour d'eux l'histoire, le récit du film. D'abord l'invraisemblable mépris anglo-saxon pour les natives, ces peuples qui ont la singulière idée d'exister et de prétendre vivre au delà du Channel (on peut d'ailleurs penser que nous, les Français, faisons partie de ces rebuts de l'Humanité). Aucune capacité de regarder l'autre comme un être humain de même nature et de même intérêt. La haute idée de se tenir comme absolument supérieur au reste de l'Humanité et de ne devoir rien à personne. Des éleveurs qui règnent sur une sorte de bétail humain.

Le deuxième thème est naturellement celui de la névrose sexuelle des jeunes femmes bridées et brimées par la morale victorienne. La jeune Adela Quested (Judy Davis est venue à Chandrapore, en compagnie de sa future belle-mère, Mrs. Moore (Peggy Ashcroft) pour épouser le rigide juge Ronny Heaslop (Nigel Havers) qu'elle n'aime pas et qui ne l'aime pas. Bien intéressante séquence où, le soir même de l'arrivée en Inde des dames anglaises, Adela attend dans sa chambre que son fiancé vienne l'embrasser (et davantage) alors qu'il se contente de lui lancer un léger Bonsoir ! sans même entrer dans sa chambre. Avec peut-être un peu d'emphase, David Lean montre un peu plus tard Adela, qui découvre à bicyclette la campagne indienne être échauffée – et au delà – par la vue des sculptures érotiques q'un temple en ruines.

Mêler les deux thèmes, c'est montrer combien Adela et l'intelligent et naïf docteur Aziz (Victor Banerjee) sont attirés l'un par l'autre et tout à la fois retenus par les barrières de leur condition et de leur civilisation respectives. Combien la névrose sexuelle de l'une et le sentiment à la fois admiratif et vindicatif d'Aziz vis-à-vis de la domination britannique ne peuvent en aucun cas conduire à une relation facile.

Aucune date n'est particulièrement donnée, mais on peut penser que l'intrigue de La route des Indes se situe au début des années Trente. Quinze ans plus tard, en 1947, ce sera l'indépendance ; une colonisation britannique qui n'aura guère duré que 150 ans mais qui a marqué, au moins superficiellement, l'esprit de cet étrange pays contradictoire. On sent dans La route des Indes, monter l'exaspération des Indiens et on voit le désarroi des Britanniques qui comprennent, plus ou moins bien, que leur temps est révolu. Voilà le meilleur du film.

Ce qui va moins bien, c'est l'intrigue assez lourde, portée vers le mélodrame et l'emphatique. Le procès d'Aziz, accusé de tentative de viol d'Adela, lors d'une excursion dans les médiocres grottes de Marabar est particulièrement insatisfaisant et la fin n'offre qu'un bien médiocre coup de théâtre : l'humaniste Richard Fielding (James Fox) n'a pas épousé Adela, comme on le pensait depuis longtemps, mais la demi-soeur de Ronny, qu'on avait depuis longtremps oublié dans sa médiocrité.

Près de trois heures pour en arriver là, c'est sûrement un peu excessif.


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De droudrou, le 15 octobre 2022 à 23:19
Note du film : 3/6

Avis entièrement partagé avec notre ami Impétueux ! J'ai été très très long avant de m'engager à voir le film que, pour bien faire, j'ai vu en français !…

Ce qui va moins bien, c'est l'intrigue assez lourde, portée vers le mélodrame et l'emphatique. Le procès d'Aziz, accusé de tentative de viol d'Adela, lors d'une excursion dans les médiocres grottes de Marabar est particulièrement insatisfaisant et la fin n'offre qu'un bien médiocre coup de théâtre : l'humaniste Richard Fielding (James Fox) n'a pas épousé Adela, comme on le pensait depuis longtemps, mais la demi-soeur de Ronny, qu'on avait depuis longtremps oublié dans sa médiocrité.

Près de trois heures pour en arriver là, c'est sûrement un peu excessif.


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