Je n'ai jamais connu ce film de Damiano Damiani que dans son VHS en anglais, qui trônait jadis au magasin La Boîte noire, sur St-Denis à Montréal. On était déjà, alors, dans la seconde moitié des années 80 : le film avait beau être avec Keith Carradine et Harvey Keitel, il n'en était pas moins étranger (pire: italien) ; et le Canada – donc le Québec – était devenu depuis peu, pour son grand malheur, "domestic market" des États-Unis : du coup, beaucoup moins de films étrangers pouvaient sortir en salle, et se trouvaient parqués dans ce que Scola appelle fort justement "le ghetto des salles parallèles" — autrement dit, condamnés à l'échec public quoi qu'il arrive. Ou alors, bien sûr, ils nous arrivaient directement en vidéo, comme celui-ci. La spirale descendante était amorcée. Appliquer bêtement, mécaniquement la loi de l'offre et de la demande aux produits culturels est absurde, c'est un cercle vicieux qui mène au vide sidéral. «Les gens n'en ont pas entendu parler, de votre film ! Il n'y a pas de demande !» «Ben, comment voulez-vous qu'ils en entendent parler s'il n'est visible nulle part!» Mais passons avant que je m'énerve.

Sur un scénario béton de Suso Cecchi d'Amico lui-même tiré d'un sujet de Ennio Flaiano, ce film religieux et historique construit comme un drame policier raconte l'histoire d'un questeur romain (excellent Keith Carradine) qu'on envoie en Judée pour enquêter sur les étranges rumeurs de résurrection d'un type de Nazareth, un dénommé Jésus. Et pour mener son investigation, le fonctionnaire — intègre et très résolu — doit interviewer des gens comme, par exemple, le gouverneur Ponce Pilate (superbe Harvey Keitel).

Je n'en dis pas plus car tout est dans l'histoire, mais j'ai trouvé ça aussi passionnant qu'émouvant. Après plusieurs Damiani so-so (ou pires que so-so comme Amytiville 2) celui-ci me réconciliait avec son réalisateur. Une réussite !

Je remarque aussi que le remake (sic) du film est disponible présentement en France sur DVD. Alors que dans le temps – marqué par un reflux partout dans le monde des films étrangers autres qu'américains – je ne suis même pas sûr que L'Inchiesta soit sorti en France.

Les gens n'en ont pas entendu parler, de votre film !

C'est pas vrai. La preuve !