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Forum : Voyage au bout de la nuit

Sujet : Bonne chance...


De Arca1943, le 22 juillet 2004 à 10:04

Je me rappelle d'un livre d'entrevue avec Sergio Leone (Les bons, les sales, les méchants et les propres) où il parlait de son rêve de porter le Voyage à l'écran . Et c'est vrai qu'il existe des connexions entre les deux univers (Van Cleef : « Le monde est petit.» Kinski : « Oui. Et très, très méchant. ») Je crois me rappeler que Liliana Cavani l'a déjà eu aussi dans ses cartons. Là encore, univers compatibles : qui a vu La Peau ?

François Dupeyron ? Eh bien… Oui, s'il a sa « touch » de La Chambre des officiers, oui, ça se pourrait qu'il s'en tire. Mais quel casse-gueule ! Il a toute ma sympathie. Espérons, en tout cas, que le casse-gueule se limite au film : trouver le ton juste, essayer de créer l'équivalent audio-visuel de ce style à l'emporte-pièce, mettre en place à l'écran cette vision d'une noirceur absolue… Frank va en avoir plein les bras !

Mais hors du film, c'est là que « ça craint », comme vous dites en France. Céline… Si le pauvre monsieur Dupeyron doit se tartiner les exégètes hagards d'un côté et les détracteurs enragés de l'autre… Si toute la polémique autour de Céline se déplace vers le film, ça risque de vite devenir lourd pas à peu près. Il va lui falloir de bons attachés de presse, à M. Dupeyron…

Arca1943


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De Xaintrailles, le 19 février 2008 à 16:34

Il y a peu d'exemples d'adaptation réussie d'un chef d'oeuvre de la littérature, et celle-là semble particulièrement impossible ; aussi impossible que celle d'A la Recherche du temps perdu sur laquelle deux metteurs en scène se sont déjà cassé les dents. Encore n'était-il pas trop difficile de trouver des acteurs aptes à interpréter Mme Verdurin, Odette, Swann et même le génial M. de Charlus que Delon, mieux dirigé, aurait peut être pu rendre crédible. Mais qui se sentira de taille à incarner l'inimitable Ferdinand Bardamu ??? Peut être Pierre Brasseur ou, plus récemment Jean Yanne auraient-ils pu essayer ? Mais aujourd'hui ? Il parait que Michel Audiard a rêvé toute sa vie de réaliser un film d'après Voyage au bout de la nuit, mais, comme on sait, il n'y est jamais parvenu, et ça vaut peut être mieux pour tout le monde.


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De fernand, le 19 février 2008 à 18:55

Par le plus grand des hasards , je visionnais hier, une cassette ou l'on pouvait entendre Michel Audiard dire que la femme de Céline lui avait refusé les droits pour l'adaptation du voyage…. Et il ajoutait , trés sincère :

Et heureusement que nous n'avons pas fait ce voyage là ! Nous ne pouvions que le saloper…Il est des oeuvres qui ne supporteront jamais la patte d'un cinéaste , aussi grand et ingénieux soit'il ! La littérature peut nourrir le cinéma , mais jamais l'inverse ! Et nous autres , cinéastes , nous nous devons de surveiller notre appêtit , sous peine de regrets éternels !


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De Impétueux, le 19 février 2008 à 19:42

Nous avons déjà largement eu ce débat sur le fil de Belle du Seigneur ; comment des cinéastes intelligents (Volker Schlöndorff ou Raoul Ruiz) peuvent ne pas comprendre qu'il y a des romans inadaptables ?


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De Arca1943, le 20 février 2008 à 03:55

Cette obstination de se frotter à l'infrottable a en effet quelque chose de curieux. C'est presque surprenant que personne n'ait encore essayé de porter à l'écran L'Homme sans qualités. Kon Ichikawa a même adapté au cinéma Le Pavillon d'or, imaginez ! Si un roman me semble inadaptable, c'est bien celui-là. Ça ne semble vraiment pas être le meilleur film de son réalisateur (tout récemment disparu) et d'après moi, c'était couru d'avance. Et puis Joseph Strick s'est échiné sur James Joyce. Certes, John Huston a merveilleusement adapté une nouvelle de son recueil 'The Dubliners', The Dead, ce qui est un exploit. Mais Ulysse !? Je peux les comprendre, ces intrépides qui courent au casse-gueule, bien sûr. Le livre les a subjugués, ils sont en adoration. Mauro Bolognini a sûrement été sidéré en lisant Senilità, d'Italo Svevo. Son film est honorable – et Anthony Franciosa assez bon, pour une fois – mais à condition… d'oublier le livre, bien sûr.


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De Xaintrailles, le 20 février 2008 à 12:04

A quand une adaptation hollywoodienne de la Divine Comédie, avec tous les cercles, les bolges, le feu, les flammes et les glaces éternelles qui emprisonnent Brutus et Cassius ?


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De Torgnole, le 21 février 2008 à 11:17

Et pourquoi pas? Bande de défaitistes, tous les films de Stanley Kubrick et Clint Eastwood sont des adaptations. En quoi l'adaptation de Voyage au bout de la nuit est elle impossible, avec une bonne voix off et une bonne lumière photo, même si les français sont mauvais dans le domaine de la direction photographique, ils sont plutôt doués pour la mise en scène des dialogues. Et la photographie de la chambre des officiers est réussie. Audiard était un bon dialoguiste mais pas un bon réalisateur, heureusement qu'il n'a pas salopé le boulot comme il le dit si bien lui même. Xaintraille, pourquoi cette dernière remarque sur la divine comédie, vous tenez tant que ça à ce qu'on sache que vous l'avez lue?


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De Xaintrailles, le 21 février 2008 à 12:22

Justement : je l'ai lue et, en la lisant, j'étais étonné par les passages d'un réalisme inattendu où l'auteur décrit avec une précision de journaliste, et presque "en direct", son étrange voyage pendant lequel il se passe toujours quelque chose, et je me demandais s'il ne serait pas possible d'en faire une adaptation comme on en a fait pour Hamlet, pour Don Quichotte et pour bien d'autres, et surtout CE QU'IL FAUDRAIT CHANGER pour que l'adaptation soit réussie, autrement dit : que resterait-il du SENS de l'oeuvre si on ne prenait en compte que les passages les plus cinématographiques ? Ce qui, remarquez-le, nous ramène à l'origine de cette discussion puisqu'on se demandait ce qui pouvait être transposé au cinéma du Voyage au bout de la nuit, puisque le STYLE (que Céline considérait comme essentiel) ne pouvait pas y passer.


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De Impétueux, le 21 février 2008 à 13:14

Torgnole fait mine de ne pas comprendre ce que nous sommes plusieurs à avoir écrit sur tous les tons !

Qui nierait que le cinéma s'est nourri de littérature et que certains des très grands films que nous aimons sont des adaptations ou des retranscriptions de livres, majeurs ou mineurs de la Littérature mondiale ? dans ma liste de films préférés, sur les dix premiers, Autant en emporte le vent, Eyes wide shut, Madame de, L'armée des ombres sont précisément, à l'origine, des œuvres écrites.

Ce que nous avons dit, c'est qu'il est certaines œuvres qui sont inadaptables, du fait de la richesse et de la complication extrêmes de leur récit ou, Xaintrailles le souligne à juste titre, de leur style.

On peut toujours, en ce cas, privilégier l'anecdote (les trois versions de Madame Bovary) ou ce que je pourrais appeler la sous-couche du roman (Le nom de la rose). Mais on ne rend pas clairement compte de la magie littéraire…


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De fernand, le 21 février 2008 à 14:07

Même sans tomber , serait ce avec délice , dans les méandres de la symbolique chrétienne , plus près de mes compétences littéraires , quel cinéaste a vraiment su mettre en relief la magie de Marcel Aymé ?…"simplement" Marcel Aymé…


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De Xaintrailles, le 21 février 2008 à 14:20

On ne saurait mieux dire…


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De Xaintrailles, le 23 février 2008 à 14:33

Il y a un autre cas très connu, c'est San Antonio ! On peut penser ce qu'on veut des romans de Frédéric Dard, mais on ne peut pas nier qu'ils ont un STYLE immédiatement reconnaissable : truculent, hypertrophié, exorbitant, apoplectique. Et ce style ne passe pas du tout dans les films qu'on a tirés de ses polars. Personnellement, j'en ai vu deux. Un où le rôle de Bérurier était échu à Jean Richard et l'autre à Gérard Depardieu. Dans les deux cas, c'était aussi triste que vulgaire.Toute la verve du Gravos se réduisait à des mimiques pitoyables et on s'ennuyait ferme. C'est exactement le contraire de Simenon dont les romans s'adaptent facilement. Mais, justement, on l'a accusé de n'avoir pas de style. Un critique a dit : "On se souvient de ses histoires, de ses personnages, de sa fameuse ambiance, mais on ne se souvient pas de ses phrases".


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De Arca1943, le 23 février 2008 à 15:05

« Un critique a dit (de Simenon) : "On se souvient de ses histoires, de ses personnages, de sa fameuse ambiance, mais on ne se souvient pas de ses phrases". »

C'est précisément le signe qu'un Simenon est réussi (tous ne le sont pas). Il n'y a guère que Graham Greene pour arriver au même genre de résultat : une prose entièrement "dépolie", familière et low profile qui ne cède jamais à l'envie du bon mot, de la belle phrase et s'efface, littéralement, derrière l'histoire, les personnages et la fameuse ambiance. Bien sûr, les critiques auront toujours, ou en tout cas souvent, tendance à privilégier des oeuvres plus exhibitionnistes sur le plan du style, et qui donnent plus facilement prise à la glose…


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De Xaintrailles, le 23 février 2008 à 15:32

Ce qui n'empêche pas Simenon d'écrire extrêmement bien quand le sujet l'exige : on pourrait citer comme exemple de réussite digne de Chateaubriand le prodigieux développement sur les cloches de Porquerolles dans "Mon ami Maigret".


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