Un très bon film, à la morale implacable. Noël Herpe a dit de Duvivier qu'il était capable du pire, mais rarement surpassé lorsqu'il atteignait les sommets de son art. L'homme du jour est un excellent Duvivier, méritant d'être redécouvert, il se place pas loin derrière La belle équipe.
Certes Maurice Chevalier est un peu pataud, mais ce n'est pas gênant, comme Charlot avait submergé Chaplin, le personnage de « gentil parigot gouailleur » a pris corps en Chevalier qui le décline dans plusieurs films et d'innombrables chansons. Le réalisateur trouve ici un moyen de canaliser le surjeu chronique de Popesco grâce à la mise en abyme, cette Sarah Bernhardt du parlant s'en donne à cœur joie, mais je ne pense pas qu'elle se moquait d'elle-même, connaissant le personnage… Il dépanne aussi son ami Lynen, en mal de rôle, comme il l'avait déjà fait l'année précédente dans La belle équipe. Le film allie astucieusement drôlerie et une dose émotionnelle très fine. Deux milieux s'opposent, aucun n'est meilleur que l'autre, tout deux possèdent nombre de vicissitudes étouffées, et la gloire fulgurante d'Alfred Boulard va mettre au jour des jalousies enfouies, lui permettre de se découvrir des amis et des ennemis insoupçonnés.
Les snobs, blasé et vantards sont représentés par Marguerite Deval, Alerme, Pizani,
Fernand Fabre
… Le menu peuple, envieux et aigri, est personnifié par Jacques Grétillat, Barbier-Krauss, Sinoël,
Marcelle Praince, le profiteur Marcel Vallée et l'immonde Pierre Sergeol
… Tous jouent fort juste. Le film sonne comme une morale adressée à tous ces gens, candidat au titre de vedette du théâtre racinien ou de roi du music-hall, que la gloire, ça se travaille, sinon on fini comme Pizani ou Fernand Fabre.
Il donne l'occasion à Momo de faire son petit numéro en chantant « Ma pomme » ou « Y a de la joie », et aussi à l'obscur Georgé (rôle du commissaire), vedette d'opérette, de servir un monologue comique car il savait les détailler, il avait joué dans « Yes »avec Arletty en 1928.
Il y a fort à parier que Duvivier a voulu signifier que des milieux si opposés ne pouvaient que se côtoyer mais nullement se mélanger, sous peine de briser des couples et plus on s'y croit…plus dure sera la chute. Apparition d'acteurs non crédités mais si reconnaissables : Paul Demange, Crémieux,
Escoffier et Robert Seller dans un rôle de …majordome, la faute à Guitry.
Il faudrait que les nouveaux arrivants – bizarrement centrés sur des films vraiment peu connus et assez archaïques – commencent à s'adapter aux règles de DVD Toile.
Bonsoir Impétueux, pourquoi utilisez-vous l'adverbe "bizarrement", ne pensez-vous pas qu'il est plus intéressant d'avoir des messages sur plusieurs films, surtout peu connus -là est l'intérêt-, plutôt que d'avoir 120 messages (dont la moitié ne sont pas pertinents) sur des films qui sont des chefs-d'oeuvre mais sur lesquels tout a été dit.
Eh bien, c'est précisément cela qui est bizarre : une accumulation de messages survenant, depuis quelques semaines, sur des films français rares d'avant-guerre. La récurrence et l'abondance de messages consacrés à ces œuvres connexes et marginales m'intéressent, mais me laissent un peu perplexe. Nous avons ici connu tant et tant de stupéfiantes agressions !
Enfin ! Nous verrons bien…
Le point de vue du météore (sur ce site) Florian est intéressant, bien argumenté et bien écrit. Mais moi-même grand amateur de Duvivier, j'ai bien du mal à le partager… Parce que tout de même…
Tout de même, deux ans avant cet Homme du jour de 1937 il y a eu La Bandera,
un an auparavant La belle équipe
et la même année Pépé le Moko
et Carnet de bal,
deux ans plus tard La fin du jour.
Quelques uns des plus grands films du cinéma français. Et l'aimable pochade interprétée par Maurice Chevalier
dénote énormément dans le paysage. Boulimique de cinéma, Duvivier
ne pouvait vivre sans tourner, sans apporter sur les plateaux sa rigidité glacée et la rigueur de son regard technique. D'où, je suppose, l’immixtion dans sa filmographie de cette petite comédie agréable qu'on pourrait croire réalisée par un excellent artisan comme Henri Decoin.
Où est le pessimisme fondamental, viscéral, absolu de Duvivier là-dedans ? J'entends bien qu'on pourrait le trouver dans le récit de l'aventure de ce brave Alfred Boulard (Maurice Chevalier)
, électricien des faubourgs qui sauve la vie d'une grande comédienne, Mona Thalia (Elvire Popesco)
en lui donnant son sang, puis est happé avec Suzanne (Josette Day)
sa fiancée sans talent dans le monde du spectacle où ils ne recueilleront, l'un et l'autre, que des avanies. Le choc des mondes, l'humiliation des prolétaires devant les mondains, l'impossibilité de rattraper le train qui s'enfuit, la sage résignation des humbles devant les puissants… Oui, tout cela aurait pu, aurait dû donner à Duvivier
assez de fiel, mais on n'en voit guère de trace. Il est vrai qu'il n'est pas foncièrement méchant comme l'était Claude Autant-Lara
qui, de ces différences de classe fait dans La traversée de Paris
un merveilleux et définitif constat.
Et Maurice Chevalier alors ? Ah, grande question ! L'homme du jour
a évidemment été filmé pour permettre aux sages populations de la Creuse et de la Haute-Saône d'admirer sur les écrans cette immense vedette internationale dont on n'imagine pas aujourd'hui le succès planétaire qu'il a reçu. Aux temps où les chanteurs de variété étaient aussi des saltimbanques, des mimes, des acteurs, il est tout bonnement exceptionnel, dans Y'a d'la joie, dans Prosper dans Ah, Paris !, visage, voix et attitude mêlés. Mais c'est un monde enfui. On n'imagine pas, depuis des années, qu'un chanteur puisse regarder son public avec tant d'amour.
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