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Forum : Nogent, Eldorado du dimanche

Sujet : Les reflets dorés de la Marne

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De Lapis-lazuli, le 19 septembre 2009 à 17:52

Carné, 23 ans, tourne ici son premier film avec quatre francs et six sous. Il conçoit un court-métrage poétique sur les pérégrinations des Parisiens sur les bords de Marne où l'on chaloupe et se délasse dans les célèbres guinguettes chères à Jean Dréjac. Les images d'Epinal de ces estaminets foisonnent sous le regard bienveillant du jeune et passionné Marcel Carné : les reflets dorés sur la Marne, les peupliers majestueux, les gais jeunes gens, des petits moments de vie propre à l'entre deux-guerre…

Cet essai que l'on crût perdu et retrouver dans les années 1960 montre les premiers pas du réalisme poétique.


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De Impétueux, le 19 septembre 2009 à 21:29
Note du film : 5/6

Nogent, Eldorado du dimanche est un de ces films muets, moins documentaires qu'inspirés par un lieu qui se peuvent encore regarder aujourd'hui avec beaucoup d'intérêt, un peu comme A propos de Nice de Jean Vigo ; le montage, l'éclat des reflets d'eau, la capacité de la captation des physionomies et des bonheurs…. Un reportage subtil et délicieux sur un monde révolu et, en même temps si proche… La référence à Jean Dréjac de Lapis-lazuli est un peu abusive : Dréjac, né en 1921, avait donc huit ans au moment où Carné filmait les guinguettes…


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De Lapis-lazuli, le 19 septembre 2009 à 21:52

La référence de Dréjac n'est pas temporelle mais géographique, car les lieux dépeints par Carné et décrits par Dréjac fleurent les mêmes fragrances de joie et de liberté même si l'époque n'est plus vraiment la même…

Mais il coule les mêmes eaux de la Marne et les mêmes vins blancs…


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De Impétueux, le 20 septembre 2009 à 09:54
Note du film : 5/6

Vous avez raison, Lapis-lazuli, tout est dans l'esprit… On trouve, dans La belle équipe, filmé quelques années plus tard (1936) les mêmes reflets d'eau que dans Nogent, Eldorado du dimanche… mais on trouvera aussi les mêmes chatoiements dans Casque d'or de 1952, qui se passe aux premières années du siècle…


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De Lapis-lazuli, le 20 septembre 2009 à 10:41

Cette atmosphère des bords de Marne, des verts treillages, des valses toupillées, des heurs agrestes et des amours adolescentes donnaient une certaine grâce, une légèreté poétique à certains films tournés dans les studios de Joinville.

Et corrigez-moi si je ne m'abuse, du même Duvivier, les bords de Marne accueillaient aussi une scène de Pot-Bouille.


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De Impétueux, le 20 septembre 2009 à 18:45
Note du film : 5/6

Je ne vois pas trop ce que les bourgeois parisiens de Pot-Bouille viendraient faire en bord de Marne : ce n'est pas le genre d'Octave Mouret, de madame Hédouin, de Trublot, des Vabre, des Josserand… En revanche, un film de Duvivier qui visite aussi les bords de Marne, lors de sa dernière partie, c'est l'admirable Voici le temps des assassins

Mais si on parle Marne et canotiers, comment pourrions-nous oublier la Partie de campagne de Jean Renoir ?


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De vincentp, le 20 septembre 2009 à 19:47

Une partie de campagne a été tourné vers Marlotte et la rivière est le Loing (en bordure de la forêt de Fontainebleau) selon les admirables suppléments de l'édition dvd. Une anedocte extraite de ces bonus : il pleuvait tout le temps, d'ou des retards de tournage… Casque d'or en revanche visite les bords de la Marne (et utilise sauf erreur de ma part les studios de Joinville).

http://www.montigny-asme.com/bulle-2000/bul-08c.htm


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De Impétueux, le 20 septembre 2009 à 21:51
Note du film : 5/6

Certes, certes, Renoir a tourné ailleurs que sur la Marne… mais qu'est-ce qui ressemble plus à l'eau que l'eau ? La nouvelle de Maupassant met en scène une famille de calicots parisiens qui, tout naturellement, ne s'éloigne pas trop des berges proches…


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De Frydman Charles, le 29 avril 2015 à 15:18

Nogent et les bords de Marne, c'était un peu le symbole du bonheur de l'entre deux guerres…Peut-être un petit clin d'œil au "diable au corps" (1920) de Radiguet , qui voyait dans la Marne "l'héroïsme de tout un peuple" en raison des batailles de la Marne…Après la seconde guerre mondiale , à la libération , la chanson "ah le petit vin blanc…du côté de Nogent", c'était un peu le bonheur retrouvé…Un bonheur certes, mais les cicatrices de la seconde guerre mondiale ne se refermeront sans doute jamais pour beaucoup…


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De Impétueux, le 27 novembre 2019 à 22:13
Note du film : 5/6

Le premier film, le court-métrage longtemps disparu de Marcel Carné, quinze minutes muettes mais aujourd'hui sonorisées, est désormais visible. Il est inclus, en bonus dans le DVD du dernier ouvrage du cinéaste, La Bible. Un ouvrage qu'il n'est d'ailleurs pas si aisé d'intituler film puisqu'il ambitionne de conter le Livre saint au travers des mosaïques de la basilique de Montréale, en Sicile. En tout cas, il est assez amusant, et bienvenu, d'avoir juxtaposé les deux œuvres, la première et la dernière de Marcel Carné, la première légère et hédoniste, la dernière grave et harmonieuse…

La banlieue n'a pas toujours été aux yeux des Parisiens, l'abomination de la désolation qu'elle est devenue depuis soixante ans, au gré de la construction de cités agressives qui se sont constituées en principautés de la drogue et de la délinquance ou – dans un autre registre, mais tout aussi isolé – en citadelles bourgeoises de l'entre-soi. La banlieue, jadis, c'était un peu l'aventure à deux pas de la Capitale et personne ne l'a mieux chantée que la grande Damia sur des paroles de Michel Vaucaire :

Aux quatre coins d' la banlieue de Paris
L' dimanche, on entend d' la musique
C'est à celui qui fera le plus d' bruit
Phono ou piano mécanique
On danse et on boit
On n'a que ce jour-là
Et quand on s'amuse, une journée
C'est si vite passé !
Aux quatre coins d' la banlieue de Paris
L' dimanche, on oublie ses ennuis

Le beau titre de Nogent, Eldorado du dimanche dit à peu près tout sur les quinze minutes très magiques, vigoureuses, montées avec un sens très sûr de l'ellipse et du bonheur de vivre. On part de la Bastille, dont le Génie veille sur les trains de plaisir qui conduisent aux bords de la Marne, ensoleillée et tendre, vive quand il le faut, mais qui sait se faire endormeuse lorsque le déjeuner a été bien arrosé. On est endimanché et même un petit peu guindé, parce que le costume neuf, parce que la cravate, parce que les talons hauts et les chapeaux-cloche mais on ne raterait pas ça pour un empire.

Est-ce qu'on est si loin, en 1929, des beaux dimanches contés par Guy de Maupassant ? Pas vraiment : des barques, des canots, des yoles qui sillonnent la rivière ; des bastringues où l'on danse et où cherche l'aventure. Polka et valse naguère, valse toujours et java désormais et l'œil des filles et des garçons qui s'allume dès qu'il s'agit d'aller un peu sous les ombrages voir la feuille à l'envers.

Et puis de tout : on se baigne, en sages maillots, dans de vastes espaces aménagés, on plonge et on s'ébroue, on fait la belle et le coquet avant d'aller manger une matelote ou un lapin chasseur, avant d'aller piquer siestes et roupillons à l'abri des grands ombrages. À moins qu'on ne veuille taquiner le goujon, l'ablette ou la tanche auprès d'un de ces caboulots chantés par Jean Tranchant Ici l'on pêche (et vous pêcherez aussi). Il y a un peu partout des accordéonistes, des chanteurs de rue qui proposent au chaland, pour un sou, une partition qui lui permettra de reprendre la rengaine au refrain. Il y a des toboggans, des balançoires, des machines où l'on peut exhiber sa force…

Et c'est la fin d'un beau dimanche et il faut revenir à Paris. Quinze minutes qui filment un dimanche de rêve.. Il y a dans ce premier essai de Marcel Carné, une sensibilité, une intelligence, un charme, une capacité à saisir l'instant. On voit déjà que la suite sera belle.


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