Et pour les amateurs qui comme moi ont des moyens limités, signalons qu'Ansatsu ressort ces jours-ci en DVD à l'unité, alors qu'il n'était jusqu'ici disponible que dans un coûteux coffret Shinoda. Idem pour La Guerre des espions. Une fois encore, la critique très prometteuse de AlHolg me fera porter la main au gousset !

Très bon film de sabre politique et historique.

Ayant pris congé du cinéma pendant quelques mois, je me remets au film de sabre japonais. Pour celui-ci, j'ai dû m'y reprendre à deux fois tellement l'intrigue politique est enchevêtrée, mais ça valait la peine. Identifié à la Nouvelle vague japonaise, Masahiro Shinoda utilise certes des procédés propres à l'époque – arrêts sur image, montage heurté – et sa mise en scène est dynamique, mais il ne fait pas l'erreur de vouloir transformer le chambara en film d'avant-garde.

C'était le rêve de M. Shinoda de réaliser enfin un film de samouraïs. Assassinat, tout en amenant un ton et un style propres à l'auteur qui renouvellent le genre, garde toute la saveur de chambaras plus classiques dans leur forme, et se soumet aux impératifs du film historique: car le récit est tiré d'un événement réel, et le personnage central hautement ambigu (manœuvres et contre-manœuvres entre les partisans du Shogun et ceux de l’Empereur) est campé avec une belle autorité par l'excellent Tetsurô Tanba, appuyé par d'excellents seconds rôles où se distingue l'indispensable et magnifique Shima Iwashita.

Oui, c'est un excellent film, très réussi. Le film de samouraïs avec une écriture cinématographique des années 1960. C'est un film intelligent, brossant parfaitement un monde de querelles pour le pouvoir et les places au soleil dans la société. De nombreux thèmes sont traités, avec une part énigmatique, laissant la part belle au spectateur. Les plans sont très variés, sophistiqués, innovants, en lien avec le récit, très bien éclairés. Il faut simplement arriver à se repérer parmi tous ces personnages aux noms imprononçables, et à identifier les clans qui passent leur temps à nouer alliances et trahisons.

Je relève aussi la qualité de l'interprétation de Tetsurô Tanba. Ainsi que celle de Keiji Sada (dans le rôle de Sakamato) dont je louais il y a quelques jours la prestation dans Bonjour. C'est le dernier film de Sada avant sa mort accidentelle en 1964 : il est clair qu'il aurait continué de tourner avec une forte notoriété à la clé. Peu de personnages féminins, mais ils sont employés dans des rôles forts de prostitués… Assassinat est une excellente surprise pour 2016, en ce qui me concerne. Je vais creuser l'oeuvre de Shinoda…

Reuv en dvd. Le film est complexe, et il faut être attentif pour tout comprendre. Sur le plan de la mise en scène, on a droit à un festival de plans innovants -caméra subjective, arrêt sur images, ralentis-. Il y a des épisodes sur plusieurs époques, on l'on passe de l'une à l'autre de façon abrupte. Les points de vue sont croisés, et là aussi, on change de point de vue de façon abrupte. Un film pour initiés, le grand-public sera perdu, n'y comprendra pas grand-chose. Comme le fait remarquer Arca1943, il faut voir le film deux fois pour tout comprendre. La première fois, on ne peut pas tout assimiler, tellement le récit est touffu et complexe. Quelque part aux côtés de Mulholland Drive dans ce registre-là.