Un des film les plus étrange qui soit, très baroque et paranoïaque. Film manifeste de l'expressionnisme, je note que ce film tourné en 1919 (le montage à cette date devenait très sophistiqué), fait un retour en arrière dans sa mise scène et assume volontairement une réalisation et un montage primitifs (que l'on pourrait situer à l'époque d'avant "David w Griffith", vers 1907-1908), à l’exception de quelques gros plans, le film a donc un découpage très peu développé. C'est un choix du réalisateur Robert Wiene, afin que le décors puissent s'exprimer à eux tout seuls ; je pense que c'est justement grâce à ce choix de mise en scène que le film a cette force de fascination et que contrairement à d'autres films de ce mouvement (pourtant plus dans leur temps comme: Le cabinet des figures de cires ou Le golem, etc.), il n'a pas vieilli. Ce côté primitif le rend paradoxalement très moderne. J'ajoute (car à propos de ce film on en parle peu) qu'il y a un grand soin apporté à la qualité du scénario.(qui fini sur un coup de théâtre très justifié). J'ajoute que les décors tentes en fait d'exprimer une "atmosphère" (un peu trop artificielle ; piège dont Murnau réussira a échapper avec son "Nosferatu") plutôt que les émotions des personnages. J'aime se film, il à quelque chose qui persiste.
Ce film fait partie des influences revendiquées de certains dessinateurs de BD comme Edgar P. Jacobs qui s'est énormément inspiré du personnage de Conrad Veidt pour le "Guinea-Pig" lobotomisé et téléguidé dans sa célèbre "Marque jaune" : et je confirme que l'expo des décors à la Cinémathèque française est réellement passionnante à visiter…
On devrait donc bien réaliser, dès ce moment-là, que le récit est celui que fait un esprit dérangé à un autre esprit dérangé et que tout le film est le résultat de la fantasmagorie de Franz, interné dans un asile et qui, à l'aide des silhouettes et des physionomies d'autres fous qu'il croise dans la cour des promenades invente une histoire effroyable. D'une certaine façon j'ai songé, de façon un peu acrobatique il est vrai, à Usual suspects où l'histoire se bâtit au fur et à mesure de son déroulement.
Hors cette intelligente idée de placer l'action entre parenthèses, c'est-à-dire de l'abstraire de la réalité, et de la faire se dérouler dans une ville de cauchemar, il ne faut pas attendre de grandes émotions du Cabinet du docteur Caligari, marqué évidemment par l'expressionnisme tonitruant qui est de mise à l'époque. Comme de coutume les acteurs tendent les poings, s'arrachent les cheveux, roulent les yeux de façon furibarde, grimacent et accentuent tous leurs mouvements. Évident héritage du théâtre dont il faudra d'ailleurs plusieurs années à beaucoup d'acteurs pour se débarrasser après l'arrivée du cinéma parlant.Paraît-il premier film qui ouvre le riche rayon de l'horreur au cinéma, Caligari peut intéresser ceux qui aiment remonter aux sources et mesurer de visu tout ce qui nous sépare de ces origines. Il ne faudra pas quinze ans pour que les cinéastes s'emparent du cinéma.
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