Un film bouleversant qui ne vous laisse pas indifférent sur la descente aux enfers que peut provoquer la drogue. Tout y est : la musique parfaite (un mélange de classique de trans), les personnages , les procédés cinématographiques excellents, bref un chef-d’œuvre.
Un film atmosphérique envoûtant. Fils drogué, mère happée par des programmes télé siliconés,… la vie, la vraie, celle qui fait exploser les cœurs au réveil, n' est pas rose, mais un patchwork fluo, tissé dans le noir. A dream ? cauchemars d' une routine écrasante, que l'herbe bleue ne peut enjoliver… Requiem? ambiance électro cardiaque, ressac des vagues de l' esprit, un peu de couleur par-dessus le gris… prière de ne pas gratter le vernis, vous êtes avertis!
Quatre personnages donc : une mère juive tendre, idiote et complètement aveugle à ce qui peut se passer, Sara Goldfarb (Ellen Burstyn) ; en fait elle ne rêve que de passer un jour en vedette à une émission de télévision débile ; pour y être présentable, elle commence un régime amaigrissant à base d’amphétamines qui la rendent de plus en plus dépendante ; et elle s’aperçoit de moins en moins que son fils Harry (Jared Leto), son meilleur pote, Noir, Tyrone (Marlon Wayans) et la petite amie d'Harry, Marion (Jennifer Connelly), sont trois adolescents déjà largement camés, insouciants, inconscients, amoraux qui vont développer un bon petit commerce d'héroïne pour permettre à Marion, qui a quelques talents dans ce domaine, d'ouvrir une boutique de fringues. Tout bonnement et en toute simplicité. Naturellement ça ne va pas tout à fait se passer comme dans une comédie à l'eau de rose : Sara va être internée dans un hôpital psychiatrique, Tyrone sera emprisonné pour trafic, Harry va perdre son bras gauche, qu'on doit lui amputer après une affreuse infection due à la répétition de ses intraveineuses. Et Jennifer va tomber dans l'abjection de la pire prostitution pour payer sa drogue.
Joli tableau champêtre.
Darren Aronofsky filme la dérive de ses personnages avec un talent certain mais ayant décidé de montrer les quatre individus en parfait parallèle (si j'ose écrire), il use et abuse de procédés qui, bienvenus au début du film, apparaissent vite comme mécaniques et assez artificiels. À intervalles nombreux et réguliers une série d'images brèves ponctue l’avancement de l’intrigue en représentant l’omniprésence de la drogue : poudre blanche habilement manipulée, pupille d’un œil dilatée, liasse de dollars, etc. Et puis, même si c’est conduit de façon très habile, presque virtuose, la brièveté des séquences consacrée à chacun des protagonistes parvient à agacer, en tout cas par lasser. Filmer ainsi permet de donner à des épisodes particulièrement tendus une vigueur et une nervosité convaincantes, mais lorsque c’est étendu pratiquement à tout un long métrage ça finit par paraître artificiel. Restent au moins deux choses : d’abord la qualité de l’interprétation : les deux garçons Harry (Jared Leto) et Tyrone (Marlon Wayans) apparaissent comme fragiles, presque attachants alors qu'ils font prospérer leur petite entreprise mortifère et s'enfoncent dans un abrutissement de dépendance de plus en plus terrifiant ; la force de leur amitié ne semble pas artificielle. Ellen Burstyn porte d'emblée dans ses yeux craintifs quelque chose d'inéluctable ; je songe à un propos de Marcel Aymé (dans Les bottes de sept lieues, une des nouvelles du recueil Le passe-murailles) : Un de ces êtres dont la misère et l'effacement ressemblent à une charité du destin, comme s'ils ne pouvaient subsister qu'en raison du peu de prise qu'ils donnent à la vie. Et puis Jennifer Connelly possède une beauté rare, tour à tour émouvante et dévastatrice, poignante lors des dernières séquences où elle est avilie…Et aussi le caractère glaçant, pédagogiquement glaçant de l'exposition à l'héroïne. Il existe un bon nombre de films sur la drogue mais la plupart, il me semble, sont plutôt orientés du côté du trafic et (ou non) de ses implications policières (French connection, La Horse, Gibraltar) et très fragmentairement, sur les drogués (Razzia sur la chnouf). Mais le seul film que j'ai en tête sur la descente aux enfers date de 1969 et je ne l'ai pas revu depuis lors : c'est More de Barbet Schroeder avec Mimsy Farmer et une musique des Pink Floyd sur le mouvement hippie dans la lumière d'Ibiza. Dans les deux cas les paradis artificiels apparaissent pour ce qu'ils sont : mortels.
« Mais le seul film que j'ai en tête sur la descente aux enfers date de 1969 et je ne l'ai pas revu depuis lors : c'est More. »
Ils sont rares, en effet. Le seul autre titre qui surgit à ma mémoire: Panique à Needle Park, avec Al Pacino. Assez impressionnant. Et la même année que More, un film d'André Cayatte sur le même sujet : Les Chemins de Katmandou, avec Jane Birkin et Elsa Martinelli.
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