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Forum : Pauvres mais beaux

Sujet : Le premier grand succès populaire de Risi

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De Arca1943, le 7 juin 2008 à 17:46

J'ai toujours rêvé de voir Poveri ma belli et sa suite Belle ma povere, avec la jeune étoile filante Marisa Allasio. Nous sommes ici dans la comédie italienne "première manière", avant le virage satirique du début des années 60. Ce film fut à proprement parler le premier blockbuster de son réalisateur, le regretté Dino Risi


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De Impétueux, le 28 janvier 2019 à 19:48
Note du film : 4/6

Il me semble vraiment qu'il faut avoir un certain goût pour le cinéma italien et pour un de ses plus éminents réalisateurs, Dino Risi, pour apprécier à sa mesure ce premier volet d'une trilogie optimiste. Car après Pauvres, mais beaux, en 1956, sont venus Belles, mais pauvres, l'année suivante, et enfin Pauvres millionnaires en 1959. Il y a encore l'impulsion du néo-réalisme, il n'y a pas tout à fait le regard de la comédie à l'italienne. On pourrait qualifier tout cela de néo-réalisme optimiste ; on sent en tout cas que quelque chose bouillonne, en Italie et qui apportera au cinéma mondial bien davantage que les errements de la Nouvelle vague française, pourtant bien davantage célébrée.

À dire vrai, Dino Risi, dès 1953, a déjà mis un peu de soleil dans l'eau froide avec Le signe de Vénus : montrer des personnages aussi sympathiques que – finalement – très médiocres, très semblables à chacun d'entre nous : pas de héros bardés de certitudes, clairs, droits, purs et sans tâche, courageux et généreux : place à la misérable parcimonie des vies quotidiennes, à leurs compromissions, leurs mesquineries, mais aussi à leurs sourires et à leurs gentillesses, à leurs beaux miracles de complicités. Réalisme, donc, mais sans la tragédie des grands films tristes de Roberto Rossellini ou de Vittorio De Sica et leur regard bouleversant sur la misère. Rien de bien grave, rien de bien satisfaisant non plus. La vie, vous dit-on.

Disons d'abord que si Pauvres mais beaux était tourné aujourd'hui, dès le scénario connu, des hordes féministes haineuses envahiraient les plateaux et empêcheraient le réalisateur de tourner la première séquence : on a rarement vu un tel machisme, une telle jactance des hommes, une telle soumission des filles. Ça correspond évidemment à la mentalité de l'Italie de l'époque et, en 1956, personne n'imaginait même être choqué par un monde où les grands frères calottaient les petites soeurs qui manifestaient l'envie de s'émanciper un peu. En tout cas, les deux beaux mecs, Salvatore (Renato Salvatori) et Romolo (Maurizio Arena), voisins de pallier, complices et frères d'armes dans la charmante mission de la séduction des jolies femmes, veillent comme du lait sur le feu sur la vertu de leurs petites sœurs respectives Anna-Maria (Alessandra Panaro) et Marisa (Lorella De Luca) qui sont, d'ailleurs amoureuses l'une et l'autre de ces beaux garçons, Anna-Maria de Romolo, Marisa de Salvatore.

Ce petit monde gravite autour de la sublime place Navona, à Rome. La mamma de Salvatore passe son temps à préparer des merveilles (gnocchis, lasagnes, cannellonis, etc.) et loue à un traminot qui travaille de nuit (Memmo Carotenuto) le lit de Salvatore, pendant la journée. Le père de Romolo (Gildo Bocci), nominalement concierge de l'immeuble, passe son temps à dormir et délègue aux rares livreurs le soin d'aller porter les télégrammes urgents aux locataires qui habitent dans les étages élevés.

Survient au milieu de ce presque phalanstère Giovanna (Marisa Allasio), une sublime fille rieuse, légère, sans beaucoup de scrupules mais avec de belles déterminations, qui beaucoup embrasse et mal étreint, offerte à tous, en tout mignonne (comme dirait Apollinaire) qui se préserve, mais affole tout le monde. Le film est l'histoire de la perturbation volcanique que cette délicieuse gourgandine va apporter dans une société finalement très classique. Perturbation qui aboutira au retour des deux grands galopins aux saines traditions et aux fiançailles croisées avec les fraîches jeunes filles Anna-Maria et Marisa.

Verve, brio, gaieté, légèreté, rythme, et des dialogues pleins de trouvailles très drôles. Et pourtant il manque dans cette chronique amusante ce qui fera ensuite le suc et l'importance du cinéma de Dino Risi : la facilité à faire surgir, derrière le carnaval des personnages, la dureté de la vie. On sent qu'un rien suffirait à démonter la vacuité totale des deux amis, Salvatore et Romolo, la naïveté idiote de leurs sœurs, la suffisance de leurs parents, le cynisme allumeur de Giovanna. Mais le cinéaste n'ose pas encore aller fouiller de ce côté là. Trois ans après il y aura Le veuf, Une vie difficile, Le fanfaron, Les monstres. Risi aura trouvé Risi.


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