"Le Vertige de Minuit", c'est le titre du roman dont le film est tiré. Il me semble que Clouzot aurait mieux fait de le conserver au lieu de le changer pour "Les Espions" ce qui équivaut à dévoiler le mystère en expliquant par avance le malaise insupportable et presque nauséeux qui s'empare du spectateur quand il voit ces inconnus impudents et menaçants qui s'introduisent chez le docteur, chassent la servante, et s'impatronisent sans que personne n'ose les chasser. La nature de ces intrus ne se serait révélée que peu à peu, ce qui aurait été encore plus angoissant. Cela dit, c'est un film très réussi, comme tous les films de Clouzot sans aucune exception.
Henri-Georges Clouzot en 1957, c'est sûrement le réalisateur le plus important du cinéma français (et peut-être davantage) après les immenses succès publics et critiques du Salaire de la peur
en 1953 et des Diaboliques
en 1955. Bonheur d'aller découvrir son nouveau film, Les espions
en n'ayant que simplement entendu parler des autres !
Les espions, c'est beaucoup mieux que ça n'était resté dans mon impression initiale, évidemment alors trop tendre, mais ce n'est tout de même pas vraiment réussi.
Ces réserves posées, qui ne sont pas minimes, il faut dire beaucoup de bien du climat onirique, quelquefois du niveau du cauchemar, qui modèle la première moitié du film.
Grande bâtisse lépreuse de la banlieue Ouest (un peu similaire à celle des Diaboliques), à Maisons-Laffitte, aux temps où l'urbanisation n'avait pas encore gagné la bataille. Jardin abandonné, volets branlants, couloirs lépreux, chambres étriquées, poignées de portes crasseuses. Maison de repos du docteur Malic, qui n'a que deux pensionnaires, un intoxiqué (Louis Seigner)
en cure de sommeil et une demi folle muette (Véra Clouzot)
qui est peut-être l'amante de Malic, en tout cas est aimée de lui.
Et peu à peu, mais de plus en plus souvent, d'étranges personnages viennent surveiller, guetter, interroger Malic. On devine que l'un vient des États-Unis (Sam Jaffe, brillant dans Quand la ville dort)
, l'autre d'Union soviétique (Peter Ustinov)
, mais on n'est pas même certain de ça.
Ce climat là est impeccable et il fait songer aux plus belles réussites des films où la réalité se dérobe (Le locataire de Polanski)
, même quand elle est parodiée (Les barbouzes
de Lautner).
On se sent à peu près touché par l'anxiété qui gagne Manic d'un monde flou, incertain, plutôt gluant, morbide, assassin.
Clouzot, malgré le choix mal approprié de Gérard Séty (et la présence obligée de sa femme Véra, toujours aussi fragile et traquée) obtient ce qu'il veut de comédiens impeccables. En plus de ceux que j'ai cités, notons Pierre Larquey
(qui, dix ans après Quai des Orfèvres
joue à nouveau le rôle d'un chauffeur de taxi !), Jean Brochard,
Dominique Davray,
Daniel Emilfork,
Hubert Deschamps,
O.E. Hasse,
les uns en simple silhouette ou presque, d'autres plus en vue. Temps heureux où le cinéma savait que les seconds rôles font l'épaisseur d'un film !
Trop longs, assurément et quelquefois en dérapage, ces Espions sont tout de même bien fascinants.
Je serai très bref : découvert lors de la récente diffusion au cinéma de minuit et… j'ai détesté. Un peu plus tard, en apprenant qu'Henri Jeanson avait exprimé sa déception par un Clouzot a fait Kafka dans sa culotte, je me suis senti moins seul.
Et bien nous serons trois ! Enchevêtrement d'esquisses de scénarios qui veulent nous impressionner, nous perdre, et finissent par nous endormir… Sacré casting, très bons acteurs mais qui semblent eux-mêmes étonnés de ce que Clouzot leurs demande ! J'ai pensé que ça ressemblait à du mauvais Mocky
quand il ne sait plus ce qu'il filme ! Long, long, redondant, bavard, superflu ! Vraiment déçue !
Page générée en 0.0058 s. - 5 requêtes effectuées
Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter