Légèrement déçu par ce classique dont j'avais pourtant gardé un super souvenir. D'abord, la copie est assez quelconque, voire abîmée, les irrégularités de lumière sont lassantes. Pour parler de l'oeuvre elle-même, la montée du suspense est diabolique et le changement de jeu de Cary Grant très subtil. C'est la fin extrêmement abrupte, qui laisse perplexe, insatisfait. Tout se résoud par quelques répliques au bord d'une route et vogue la galère ! Ce n'est d'ailleurs pas la seule fin que Hitchcock
bâcle éhontément ("Psychose
" et "Les oiseaux
" de fameuse mémoire).
Un des grands plaisirs de "Soupçons" reste la prestation de Nigel Bruce
(le Dr. Watson des "Sherlock Holmes" avec Basil Rathbone)
, très drôle en copain "beauf" et pas bien malin.
La fin de Psychose n'est pas éhontée. On a même droit à un long discours expliquant tout ce qui aurait pu gêner le spectateur.
A propos des fins expéditives de Hitch, il y a une anecdote amusante. Ou du moins une blague qu'il aimait faire, à savoir monter avec un ami dans un ascenseur d'un building à l'heure de pointe. Il commençait à raconter une histoire à voix suffisamment haute pour que tout le monde l'écoute et soudain, au moment le plus dramatique de l'histoire, il disait un "Tiens c'est mon étage" et sortait en laissant tout le monde sur leurs fins/faims.
C'est bien ce "long discours" que je trouve bâclé (psychanalyse de bazar énoncée par Simon Oakland) et banalisant le film et le personnage de Norman Bates. L'image d'Anthony Perkins emprisonné et son regard sur la mouche suffisaient largement et son impact aurait certainement été encore plus fort sans le bla-bla qui précédait. Ceci dit, "Psychose
" reste évidemment un immense film.
Dans ce sens là, je comprends mieux.
Avec toute l'admiration que j'ai pour Hitchcock, je suis assez d'accord que ces films vieillissent. Sans doute parce que ses personnages manquent quelque fois d'épaisseur, ou de mystère.
C'est vrai. D'ailleurs, le seul personnage qui lui ait échappé est finalement Tippi Hedren, que ce soit dans "Les oiseaux
" ou "Marnie
" et qui, sans être une immense comédienne, apportait naturellement à ses rôles une névrose à fleur de peau, une hyper-sensibilité qui n'avaient rien de factice. C'est sans doute pour cela que Hitchock l'a tant reniée ensuite. Ses multiples interviews tendent à prouver 1) sa peur des gens (et des femmes en particulier) 2) son besoin de tout contrôler.
A lire à ce sujet le livre de Donald Spotto, "La face caché du génie" qui rapporte des anecdotes assez terribles sur la personnalité d'Hitch.
J'ai pour ma part trouvé ce Hitchcock parfaitement maitrisé, malgré toutes les difficultés qu'a le film à démarrer.
Jusqu'à ce que Cary Grant et Joan Fontaine
se passent enfin la bague au doigt, il faut reconnaitre que le spectateur s'ennuie beaucoup. C'est surtout le personnage de Joan Fontaine
qui démode un peu le film. Dans le rôle de la femme sage et vertueuse, elle paraitra à notre époque, pour les jeunes générations être un personnage de science-fiction.
Mais dans Soupçons il y'a d'admirables scènes. Le passage ou Cary Grant
apporte un verre de lait (peut-être empoisonné) à son épouse ; un peu comme le café que l'on apporte à Ingrid Bergman
dans Les enchainés.
Joan Fontaine
doute et tombe malade, mais le spectateur garde la tète froide. Bien évidemment Cary Grant
est bien trop sympathique pour pouvoir avoir des intentions meurtrières quelconques…
Joan Fontaine doutant en permanence, croyant au scénario machiavélique qu'elle s'est psychologiquement monté, laisse immiscer la névrose en elle. Elle n'est pas sans rappeler au spectateur Mia Farrow
dans Rosemary's baby.
On pourra dire que Hitchcock s'entraine juste avant Les enchainés
sur les mêmes critères. On aperçoit dans Soupçons
plusieurs idées qui lui permettront dans le futur d'approfondir certains de ses films. Alfred Hitchcock
force aussi ici sur les paysages calmes, trop tranquille ; un peu comme le fera Peckinpah
pour Les chiens de paille.
Si les autres réussites du réalisateur ont fait oublier Soupçons il n'en demeure pas moins un excellent exercice de style, et un bouche trou pour Hitchcock,
se détendant tranquillement et dont la conclusion démontre son talent de farceur !
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