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Sujet : Grisant film d'aventures avec le puissant Mifune!


De Arca1943, le 20 janvier 2008 à 23:36
Note du film : 5/6

Sans aucun doute plus traditionnel, plus classique (plus hollywoodien?) dans sa forme que Les Sept samouraïs produit la même année 1954 par la même Toho avec le même Toshirô Mifune, ce long film en trois parties – dont la première se vit attribuer en 1956 un Oscar du meilleur film étranger plus que mérité – n'en est pas moins un film d'aventures grandiose et même exaltant. D'abord, première surprise : ayant abordé depuis peu aux rivages déchiquetés des grands films de samouraïs, je suis plus que jamais habitué au glorieux noir et blanc, même encore en 1967-68 (Rébellion, Kiru). Or, cette fresque est en couleurs, et quelles couleurs ! On croit rêver. La photographie de ce film est étonnante. Même pour les scènes de pénombre et de nuit, qui sont nombreuses, l'image reste d'une remarquable précision, qui atteint son apogée dans l'extraordinaire duel final, au bord de la mer, au point de l'aurore… Wow !

Le film nous entraîne de la célèbre bataille de Sekigahara, dans la première partie (où je note l'usage de canons ?), jusqu'à la cour de Edo dans la troisième partie, où l'on fait plus ample connaissance avec Sasaki Kojiro, maître d'armes du Shogun et redoutable adversaire de notre héros. À noter pour ceux qui voudraient le savoir que ce film ne prétend pas être une reconstitution de la vie du vrai Miyamoto Musashi, de son vrai nom Takezo Shinmen, le plus illustre bretteur de l'histoire du Japon (et qui fut aussi un artiste renommé, ce dont on a un écho dans le film quand il se met à sculpter des bouddhas). Il s'agit plutôt d'un grand spectacle populaire, adaptation de deux romans et d'une pièce de théâtre qui furent consacrés.

En tout cas, qui mieux que Toshirô Mifune pouvait donner vie à ce personnage ? Il est majestueux, ombrageux, débordant d'énergie, il joue du sabre avec une ardeur qui fait rentrer la tête dans les épaules. Bref, il est parfait. Cependant, il ne fut pas le seul : ce Miyamoto Musashi a été l'objet de nombreuses versions. Kenji Mizoguchi en tourna une adaptation en 1944. Fait étrange, la même année qu'Inagaki tournait la présente version – en 1954 – un certain Yasuo Kohata en tournait une aussi, et ce fut son seul film, le malheureux. Et plus curieux encore, l'interprète du rôle-titre dans cette version-là était Rentaro Mikuni, qui jouait… le meilleur ami de Miyamoto Musashi la même année dans le film d'Inagaki ! Je trouve cette situation bien étrange. En 1961, Tomu Uchida entamait à son tour une saga Miyamoto Musashi, avec cette fois Kinnosuke Nakamura dans le rôle titre, en cinq épisodes. Et en 1967, Hiroshi Inagaki lui-même revient à la charge avec Kojiro, qui raconte la même histoire mais du point de vue de l'adversaire juré de Miyamoto Musashi, lequel est incarné cette fois par Tatsuya Nakadai. J'aimerais bien voir ça…

Comme bien d'autres films d'arts martiaux, la fresque d'Inagaki est une sorte de bildungsroman : Takezo a beau avoir fait la guerre, il reste une bravache de village, jusqu'au jour où un moine met la main dessus et décide d'en faire un homme, un vrai, ce qui consiste notamment à laisser le pauvre jeune homme suspendu à un arbre pendant des jours. Il se fait même enfermer dans un grenier rempli de livres qu'il doit lire jusqu'au dernier pour avoir le droit de sortir ! Après quoi on l'autorise à partir en voyage à travers le Japon pour parfaire son apprentissage. En cours de route, le bouillant samouraï s'humanise et apprend même à ne pas tuer (enfin, de temps en temps…)

Pourquoi pas la note maximale à ce film qui m'a pourtant soufflé, auquel j'ai pris un très grand plaisir ? Eh bien, années 50 obligent, le film donne un peu trop de place à la vie sentimentale de notre héros. Par moments, on se croirait à Hollywood. Dans les passages où le valeureux Takezo est aux prises soit avec Otsu, soit avec Akemi – les deux jeunes femmes qui sont amoureuses de lui et qui le relancent alternativement – mon intérêt faiblit quelque peu, même si je continue de dévorer des yeux ce film somptueux, spectaculaire, coloré, foisonnant d'épisodes et, bien entendu, de superbes affrontements au sabre !

Un dernier détail : dans le premier volet, le héros et son ami sont recueillis après la rude bataille de Sekigahara par la très jeune Akemi et sa mère Oko. Et je me suis demandé si ces deux personnages, mère et fille qui vivent seules dans une cabane isolée et survivent en pillant les cadavres de samouraïs morts au combat, n'auraient pas donné des idées aux auteurs du remarquable Onibaba ? Enfin, ce que j'en dis…


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De Alain Silver, le 3 janvier 2017 à 02:56

Je me suis gouré en 1977 quand j'ai indiqué 1954 pour le Musashi de Kohata dans The Samurai Film. Il date actuellement de 1968.


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De vincentp, le 1er mai 2023 à 19:34
Note du film : 6/6

En blu-ray, réédité par Carlotta, La légende de Musashi frappe par la beauté de ses images. Douceur et caractère paisible des torrents, rivières, forêts, verdoyantes, baignés par le soleil, une nature omniprésente. Dans ce simple domaine formel, une référence absolue en matière de prises de vue. Beauté plastique, certes, mais magnifiée par la mise en scène de Hiroshi Inagaki, intégrant l'ensemble dans un récit. Il est question des luttes intestines typiques du XVII° siècle au Japon, orchestrées par les hommes de mains ou brigands des alentours, avec en toile de fond une évocation de la condition de l'homme. Oscar du meilleur film étranger en 1954 (ou 1956 ?) fait remarquer Arca1943. Le film semble oublié aujourd'hui, sans doute bien à tort, écrasé peut-être par des oeuvres épiques fortes de Kurosawa comme La forteresse cachée (1958). L'intrigue se dévoile peu à peu, prend des tournures inattendues, s'étale sur une longue durée car il s'agit là du premier volet d'un triptyque. Remarquable !


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