Le sujet est intrigant en soi, et l'idée d'introduire un serial killer dans la France provinciale des années 50, plutôt inédite. Mais le scénario prend des chemins de traverse, et tourne brutalement court quand Léon fait ses aveux au tailleur, et que le motif des meurtres est établi. Ce qui devrait être la conclusion du film, n'est que le début d'un troisième acte, qui part en quenouille, pose des questions jamais résolues, bâcle des personnages (le reporter campé par Cluzet, dont la présence ne mène finalement à rien, le commissaire incompétent, grossière caricature qu'on croirait sortie d'un Mocky)
, et s'achève sur un final décevant, qui désamorce tout ce qu'on vient de voir.
Présenté comme un face à face, dont Serrault s'était fait le spécialiste avec Garde à vue ou Pile ou face,
le film n'est en réalité qu'un one man show de Serrault,
qui lâché bride sur le cou, fait un numéro ahurissant, fait de gloussements, de hoquets, de tics, frôlant parfois le n'importe quoi, mais créant un souffle de folie, qui enrobe tout le film. Aznavour
n'a qu'un rôle secondaire, à peine esquissé, et Aurore Clément
charmante, ne fait que passer.
Les fantômes du chapelier est paresseusement filmé, manque de moyens (la ville réduite à une seule rue et un café), et surtout s'appuie trop sur la personnalité volatile de Serrault,
ignorant royalement les règles les plus élémentaires du suspense. On reconnaît la patte de Chabrol
dans quelques séquences, comme les flash-backs avec Monique Chaumette
(théâtrale, mais très angoissante, en infirme râlant de souffrance), et le portrait de la bonne, mais la confrontation espérée entre le tueur pervers et le voyeur d'en face n'a absolument pas lieu. Dommage, car tel quel, le film laisse une sensation d'inachevé…
Pour une fois que Georges Simenon avait écrit un roman sanguinolent, qu'on pouvait adapter de façon assez linéaire – en s'ancrant toutefois dans la réalité humaine de l'écrivain – c'est-à-dire où on n'avait pas même besoin de le trahir ou le transgresser pour produire une œuvre angoissante et charpentée, voilà que le cinéaste, laissant complètement la bride sur le cou à un Michel Serrault
(qu'il faut pourtant, comme un paquet de grands acteurs – voir Fernandel
ou Raimu –
surveiller comme le lait sur le feu) réalise un film outrancier, ridicule et même niais. On n'arrive pas une seconde à croire au personnage de Léon Labbé (Serrault,
donc) qui, dans une crise d'exaspération a tué sa femme (Monique Chaumette)
insupportable, impotente et geignarde, a dissimulé son crime en laissant croire à tous qu'elle vit encore et a entrepris de se débarrasser graduellement des amies de pension d'icelle pour que, alors qu'elles sont censées se réunir, elles n’en découvrent pas la disparition.
Au fait, il se trouve qu'un petit tailleur arménien, Kachoudas (Charles Aznavour) nanti d'une nombreuse famille, habite juste en face du chapelier et a perçu le manège de Labbé avec son mannequin de femme et mêmement l'identité du tueur ; fasciné, il le suit dans tous ses déplacements, incapable de le dénoncer.
Ce qui devrait apparaître, c'est que Labbé a toujours eu en lui le goût du sang ou qu'il en a trouvé la découverte enivrante et que, une fois éliminées les amies de sa femme, alors que plus rien ne le menace, il continue à tuer, mis en quelque sorte en appétit ; cette sorte de fatalité déterministe est gommée par des sortes de séquences bouffonnes où sont assassinées successivement Louise, la petite bonne du chapelier (Christine Paolini) puis, bouquet final, Berthe (Aurore Clément), la femme galante de la bourgade…
Fait de bric et de broc, cousu à la va-vite et n'importe comment, le film laisse une bien médiocre impression…
Je me souviens avoir eu la même sensation que vous Impétueux en ayant visionné ce Chabrol décevant ou effectivement Serrault
ne convainc pas ! Pas plus qu'Aznavour
d'ailleurs cantonné dans un rôle me semble t-il extrêmement secondaire. Il y'avait pourtant un cadre (ville bretonne pluvieuse) des idées, un metteur en scène (Chabrol)
des bons acteurs, un auteur (Simenon)
eh ben tout cela a fait flop ! Bizarrement le film jouit toujours aujourd'hui d'une réputation convenable chez les amateurs de son auteur ou chez les fans de Serrault.
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