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Sujet : Ne se bonifie pas avec les ans


De jipi, le 13 décembre 2006 à 10:44
Note du film : 4/6

Le patrimoine littéraire s'offre sans affinités à des célébrités programmées dans le temps afin d'exhumer les tourments d'une époque.

Gérard Depardieu et Renaud en ces débuts d'années quatre vingt dix sont incontournables, les rôles de Maheux et Lantier sont une offrande logique.

Une petite cure amaigrissante aurait été la bienvenue afin de creuser quelques joues et de gommer quelques ventres anachroniques trop épicuriens.

Maheux est un « crève la faim «  trop massif, Lantier n'est pas crédible en prononçant difficilement la phrase « Tous à Jean Bart demain matin ». Ces rôles phares tout en étant « esthétiquement » bien reproduits ont un verbal mal travaillé surtout Lantier parfois incertain dans des paroles sommaires.

Il faut une fois encore scruter les seconds rôles pour découvrir quelques prouesses avec en particulier Jean Roger Milo, Chaval halluciné avec quelques brides de lucidité. Souvarine (Laurent Terzieff) effrayant par le radical de ses propos, la résonance russe de son nom n'est pas innocente, la refonte brutale de la société par la violence des Possédés de Dostoïevski tourne au dessus de ces ventres affamés.

La position patronale uniquement posée sur l'appât du gain est entérinée par une table grasse de mets, l'adultère lâche a pignon sur rue et se calfeutre peureusement dans des granges au passage de grévistes déterminés.

On offre quelques brioches au démunis en déterminant bien que les ouvriers sont responsables de leurs tristes sorts par les méfaits de la taverne.

La noirceur d'une société entière s'exprime par les opposés de l'opulence et de la faim dont le juste milieu n'est plus que le terrorisme libérateur. Le prix de la berline est un combat dérisoire dans un monde où l'on ne vivra que 40 ans si tout va bien.

Le top niveau professionnel se nomme Porion à des années lumières d'une reconnaissance, on flatte l'ouvrier par la qualification qui bonne ou mauvaise se situe à des lieux sous terre, sans lumières, la peur au ventre.

L'impact de Germinal fut fort dans les établissements scolaires déclenchants des débats passionnés par une jeunesse tourmentée préférant devant de telles images la chaleur d'un cocon familial.

Une prise en compte fulgurante des différences que beaucoup considère comme éternelles.

Le grand Bleu de Luc Besson et Trente sept deux le matin de Jean-Jacques Beineix avaient déjà atomisée toute une jeunesse dans une paresse bleutée, une époque formidable de Gérard Jugnot n'a rien arrangé, Germinal enfonce le clou d'une logistique relationnelle sans espoir de rapprochement. Titanic est la bombe libératrice, tout le monde y passe.

Si l'on est un peu parano on peut penser que c'est un véritable complot contre une génération montante en pleins doutes.

    
         

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De PM Jarriq, le 13 décembre 2006 à 11:20
Note du film : 2/6

J'ai aussi revu un bon morceau à la télé tout prêt à revoir ma mauvaise impression, et hélas ! Germinal ne s'est pas bonifié avec les ans ! Oui, il est inacceptable que Depardieu affiche ses 130 kilos, alors qu'il joue un crève-la-faim, un minimum d'effort aurait été bienvenu (et plus digne de l'oeuvre de Zola), Oui, Renaud n'est pas à la hauteur, et à chaque début de phrase, on dirait qu'il va se mettre à chanter… Il y avait tout (moyens, décors, ambition) pour faire un film essentiel. Il ne reste qu'un gros plâtras scolaire. S'il est une oeuvre qui méritait un traitement ample à la 1900, c'est bien "Germinal" !


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De jipi, le 13 décembre 2006 à 11:30
Note du film : 4/6

Bonjour à tous les deux, c'est vrai qu'on a l'impression que Renaud va chanter, sa diction est en dessous de tout. Faut-il revenir au principe de Vittorio de Sica pour de telles oeuvres, c'est à dire prendre des comédiens anonymes que personne ne peut rapprocher à qui que ce soit, c'est vrai qu'en voyant Depardieu et Miou Miou on ne peut pas bypasser les valseuses.


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De PM Jarriq, le 13 décembre 2006 à 11:39
Note du film : 2/6

Exact, et il y a même un télescopage bizarroïde entre Les valseuses et Canicule : la scène où Gégé prend sa femme debout contre la table de la salle à manger, rappelle étrangement la même Miou-Miou subissant exactement les mêmes assauts de la part de Lanoux, dans le film de Boisset. Une faute de goût, et un manque de réflexion de plus parmi d'autres…


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De jipi, le 13 décembre 2006 à 11:50
Note du film : 4/6

En plus à quoi ça sert de traumatiser toute une génération positionnée sur le fil du rasoir que représente un cocon familial opposé à un futur lacher en chute libre dans un monde professionnel sans filets que les images de ce film trop scolaire ne font qu'accentuer. De plus un contrat moral n'est pas respecté, les ventres bien remplis n'ont même pas la décence de s'eclipser de tels contextes.


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De droudrou, le 13 décembre 2006 à 14:36
Note du film : 1/6

Germinal : le film qui n'est plus à refaire !

Eh, les gars : je vais faire un peu de mauvais esprit ! On peut avoir une population qui crève la faim,mais ça ne veut pas dire qu'il y a des mecs qui sont maigres… On buvait. On buvait de la bière. Et la bière ça fait grossir ! Et le pinard ça donne des varices bourguignonnes : il n'est que de voir le pif de certains acteurs… qui ne sauraient cacher ce problème…

Je ne sais ce qui fait dire que le film de Berry avait les moyens de faire une bonne ouverture à l'oeuvre de Zola. Aller chercher des anonymes ? Je n'en suis nullement convaincu. Il y a un cadre à respecter. Il y a un très gros effort de scénario à effectuer. Il y a un découpage très précis des scènes à réaliser. Ce n'est pas tout à fait dans le style de Berry, tout comme, d'ailleurs, dans le style de Richard Attenborough évoqué très récemment.

Par ailleurs, à propos de 1900 je me pose la question et me repose la question de savoir, là aussi, où voulait aller Bertolucci : je pense que certains moments d'une crudité photographique demeurent très près de l'imagerie du Le dernier tango à Paris par rapport à une fresque sociale très spécifique. Certains sujets à réaliser sont par trop denses pour permettre de s'égarer ou nécessitent des moyens pour souligner le propos.

Je ne cache pas que j'apprécie Le guépard de Viscomti qui nous donne tout à la fois un vrai spectacle et une sacrée réflexion de la société sicilienne à cette même époque…

Je me pose même la question s'il n'aurait pas fallu confier Germinal à Claude Lelouch


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De Tamatoa, le 3 juillet 2012 à 21:10

C'est avec une grande émotion que je viens d'apprendre que L'Unesco venait de placer le bassin minier du Nord au patrimoine de l'humanité ! Bien sur, d'aucuns prétendront que ce Germinal là n'a pas répondu à l'espoir que nous avions mis en Claude Berri. Et je ne connais pas le Germinal d'Yves Allégret. Mais il nous a quand même donné une petite idée de ce qu'était la vie de ces chercheurs d'Or noir. Et je sais que moi qui ai grandi au grand soleil, près d'une mer immaculée avec ses lagons aux couleurs comme nulle part ailleurs, une fois arrivé en Métropole je n'ai céssé de penser à toutes ces "gueules noires " qui n'avaient que les terrils pour tout horizon. Et penser qu'aujourd'hui, un peu tard peut-être mais enfin, que les Bassins miniers sont placés au même rang que le Taj Mahal, c'est se dire avec soulagement que l'on s'est enfin préoccupé de "l'humain", du sacrifice, avant que de s'intérresser à la beauté des sites. Car ce sont bien les milliers d'âmes de milliers de vies laborieuses qui ont payé cher, très cher, d'être nées au mauvais endroit qui sont, aujourd'hui et enfin, reconnues et portées très haut, au pinacle de l'humanité !

C'est bien. Et c'est si peu dire..


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De fretyl, le 14 avril 2016 à 01:11
Note du film : 3/6

Tout de même messieurs soyons réalistes. Claude Berri nous arrache bien quelques frissons lors de la prise de la mine par les autorités venu faire travailler des Belges pour le compte du patronat, scène se clôturant par la mort de Depardieu. Oui, le film est plein de défauts ; Renaud n'est pas très bien placé, on aurait préféré un autre acteur pour incarner Lantier, c'est sûr… Mais certaines scènes sont chocs : le boulanger qui se fait couper la bite ; Carmet qui étrangle la fille des bourgeois. Certains personnages sont parfaitement décrits. Jean Roger Milo souvent caricaturé pour son rôle d'ivrogne est au sommet du réalisme de ce qu'on pu être certains mineurs de cette époque. La musique du film colle parfaitement à l'atmosphère. Et avec le temps, on pourrait dire que Germinal est un film Front National. Le patron décidant de remplacer les ouvriers en révolte par une main d’œuvre immigré bon marché Italienne ou Belge. Finalement les choses n'ont pas trop changé depuis Germinal. Les mines ont certes fermé mais le combat social, la colère ouvrière restent les mêmes ! un film pas toujours très bien interprété mais passionnant. Hélas le lyrisme voulu par Berri n'est pas au rendez-vous.


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De Commissaire Juve, le 14 avril 2016 à 07:28
Note du film : 1/6

Je mets 1 parce que le 0 ne s'utilise pas à la légère. C'est un des rares films qui m'aient donné envie de quitter la salle en cours de projection (je suis seulement resté parce que j'avais payé).

Très mauvaise adaptation. Je parle des dialogues qui suivent si servilement le texte de Zola qu'ils sonnent faux neuf fois sur dix. Tout ça était à récrire ; ils n'ont pas osé.

Et puis Renaud… Mamma mia ! Enfin Miou-Miou n'a sans doute jamais été aussi mauvaise.


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De Impétueux, le 14 avril 2016 à 14:07
Note du film : 3/6

Eh bien je suis plutôt enclin à l'indulgence vis-à-vis de ce Germinal-là, qui a bénéficié d'importants moyens et ne manque pas toujours de souffle, notamment grâce à une musique inspirée de Jean-Louis Roques. Vous paraissez tous oublier que le réalisateur n'est que Claude Berri, qui est doté de quelques talents de producteur mais n'est jamais apparu comme un réalisateur inspiré.


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De Arca1943, le 14 avril 2016 à 15:12

N'empêche, quitte à froisser un peu le petit complexe de supériorité à la française, qu'on pourra, sur une thématique et à une époque fort voisines, lui préférer de loin Les Camarades. Enfin, ce ne sont pas les mines, ce sont les filatures, mais bon.


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De Impétueux, le 14 avril 2016 à 21:09
Note du film : 3/6

Mais il est certain, Arca, que Les camarades est un film infiniment supérieur à Germinal ! Je ne vois pas où vous voulez en venir, d'ailleurs : ce n'est pas parce qu'il y a une grève sur le tas qu'on peut comparer ces deux ouvrages. Sinon autant faire entrer dans la liste des films de Marin Karmitz ou de Chris Marker

Germinal est l'adaptation très moyenne – d'un grand livre puissant ; Les camarades sont issus d'un scénario original. Je conviens volontiers (je l'ai écrit sur le fil du film de Monicelli) que la structure et l'inspiration sont analogues et qu'il n'est pas impossible que les scénaristes soient allés chercher des séquences dans le roman. Mais ils ont su, Dieu merci, faire œuvre originale !


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De Impétueux, le 3 octobre 2018 à 17:17
Note du film : 3/6

Le plus puissant des romans du cycle des Rougon-Macquart n'est assurément pas très facile à porter à l'écran. Et cela au contraire des autres récits de Zola qui demandent moins de décors, moins de comédiens, moins de machineries et dont les intrigues sont plus linéaires : Au bonheur des dames, Pot-Bouille, Gervaise (L'Assommoir), Nana.

Pour Germinal, il faut vraiment du souffle et presque de l'emphase, parce qu'au delà de l'histoire d'Étienne Lantier (ici Renaud) et de la famille Maheu, c'est celui de la mine dévorante et des masses éternelles.

Je n'ai pas vu la version d'Yves Allégret en 1963, encore moins, évidemment celle d'Albert Capellani en 1913, mais j'ai regardé plusieurs fois ce Germinal de Claude Berri, qui date de 1993 en y prenant presque toujours un grand plaisir et, parallèlement en me moquant beaucoup des prétentions de ce médiocre cinéaste qui avait pour grandes qualités celles de savoir réunir beaucoup d'argent.

Et de fait, le film aux 8000 figurants choisis dans le bassin minier pour leurs trognes fut, un certain temps, le plus cher de toute l'histoire du cinéma français. D'ailleurs, lors de l'avant-première, à la fin de l'été 1993, on avait bien fait les choses : les happy few parisiens, dont, miraculeusement j'étais, avaient été transportés à Lille par un TGV spécial, où avait pris place le Président de la République, alors François Mitterrand. Et tout notre beau monde avait été installé aux plus belles places du grand cinéma où le film était projeté, reléguant les gueules noires de la figuration aux deux extrémités de la salle, juste devant l'écran ou presque dans les combles. Figurants qui n'avaient d'ailleurs pas, à l'issue de la projection, partagé le même cocktail. On a beau dire, le socialisme réel, c'était quelque chose de bien hypocrite et de bien rigolo.

Alors que, finalement, Germinal, au delà de l'anecdote, si bien bâtie qu’elle est, dans le roman, c'est tout de même la grande geste de la condition ouvrière, de l'exploitation de la force de travail des hommes par le Moloch de la Finance, de la Fortune anonyme et vagabonde, qui n'a pas de visage et qui n'est qu'indifférence pour le sort des gens ; on devrait montrer plus souvent le désarroi et le discours de Victor Deneulin (Bernard Fresson, impeccable) devant l'inévitable disparition du capitalisme familial, à visage humain, dévoré par l'anonymat des sociétés indifférentes qui, hier comme aujourd'hui, réclament avant tout l'accroissement du rendement de leurs dividendes : rien n'a changé, sinon en pire.

Venons-en au film et à la mine. À ce métier qui fut terrible, royal et symbolique, emblème des sociétés industrielles, qui utilisait tout le monde, pères, fils, filles, femmes, enfants et vieillards et qui était à lui tout seul une sorte de civilisation, bâtie autour de gens respectés, aimés, même par tous, au point que sa grande grève de 1963 planta une sacrée épine dans le cuir pourtant raide du Général de Gaulle. Je ne doute pas que Claude Berri ait conçu que c'était de cela qu'il s'agissait et qu'il ait essayé avec ses petites aptitudes de faire passer un certain souffle dans le film.

On peut lui reprocher ainsi qu'à Arlette Langmann, sa co-scénariste de n'avoir pas suffisamment élagué l'intrigue foisonnante du meilleur roman d'Émile Zola et d'avoir un peu accumulé les scènes à faire, au détriment de la pulsation fondamentale du récit ; de ce fait, hors l'épisode souriant de la ducasse, tout paraît marqué par le drame, qui tourne alors vite au mélodrame. Comme, à la fin, il faut achever en précipitant tout, un film qui dure près de 3 heures mais qui devait initialement comporter quarante minutes de plus. Cette adjonction aurait-elle servi le film, lui aurait-elle nui ? Va savoir ! Lorsque le souffle manque, on est bien en peine de le raviver.

Et c'est dommage parce que la distribution est excellente, hors le choix de Renaud, qui n'a pas once de talent dramatique et qui joue faux dès la première minute. En revanche Miou-Miou est parvenue à se donner la chair grise, molle de la Maheude et Depardieu est puissant  ; que les seconds rôles sont très bien choisis et parfois magnifiques, ainsi Judith Henry qui interprète Catherine Maheu, la pauvre gamine vouée de toute éternité à prendre des coups et à mourir comme une bête de somme éventrée, Jean-Roger Milo, qui est Antoine Chaval, le violent, le fruste amant tueur de Catherine. Que Laurent Terzieff est absolument glaçant en Souvarine, le nihiliste qui va saboter la mine afin de précipiter la révolution anarchiste… Que Jean Carmet, Jean-Pierre Bisson, Jacques Dacqmine, Yolande Moreau, Gérard Croce (l'épicier Maigrat émasculé presque vivant par la foule furieuse) sont excellents.

Et pourtant ça ne marche pas, ou pas vraiment. Qu'est-ce qui manque ? Sans doute simplement le talent de mise en scène. Mais en tout cas c'est bien plus honnête, de la part de Berri que les horreurs de son hideux remake de Manon des sources


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De fretyl, le 5 octobre 2018 à 16:12
Note du film : 3/6

D'ailleurs, lors de l'avant-première, à la fin de l'été 1993, on avait bien fait les choses : les happy few parisiens, dont, miraculeusement j'étais, avaient été transportés à Lille par un TGV spécial, où avait pris place le Président de la République, alors François Mitterrand. Et tout notre beau monde avait été installé aux plus belles places du grand cinéma où le film était projeté, reléguant les gueules noires de la figuration aux deux extrémités de la salle, juste devant l'écran ou presque dans les combles. Figurants qui n'avaient d'ailleurs pas, à l'issue de la projection, partagé le même cocktail. On a beau dire, le socialisme réel, c'était quelque chose de bien hypocrite et de bien rigolo.

Et vous n'imaginez pas l'impact qu'a pu avoir ce film à un niveau syndical. Berri et Depardieu créèrent à la sortie du film l'association Germinal dans le Nord Pas de Calais, association destinée à récolter des fonds pour venir en solidarité aux plus démunis et aux petits entrepreneurs. Il se trouve aussi que mon père qui était mineur dans le sud de la France et qui à l'époque était sympathisant de la CGT, mais non adhérent, eut droit avec ses camarades à des billets de cinéma gratuits que le PCF faisait distribuer dans les mines ! Personne ne pourra douter qu'à l'époque Berri, Renaud et même Depardieu devaient bel et bien être des rouges !


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