Un très beau film de Luis Bunuel qui est l'un des premiers à aborder les fantasmes érotiques féminins mêlant toujours étroitement et subtilement scènes fantasmagoriques et hyper-réalisme. Catherine Deneuve y est admirable ainsi que toute la parade de grands qu'il y autour comme Pierre Clémenti, Michel Piccoli, Nicole Calfan et l'apparition surprenante de Francis Blanche dans le rôle d'un client vulgaire et grotesque.
Comme on aimerait redécouvrir les films de Luis Bunuel comme le surréaliste, le très curieux et trop mal connu "L'Ange Exterminateur", puis aussi "La Voie Lactée", "Le Charme discret de la bourgeoisie" et les autres… Il faut espérer que nous verrons un jour un coffret Bunuel en DVD !
Séverine bourgeoise entretenue se morfond dans un bunker protecteur sans surprises. Le plaisir imaginatif envahit de plus en plus un esprit demandeur de soumissions corporelles inconnues.
Le bovarisme contraint une somptueuse nantie délaissée à tester l'expérience du rang en subissant sans management la rudesse du goret et la servilité du maso.
Des immondices royaux cloîtrés en maison close matérialisent de redoutables fantasmes sexuels irréalisable à la lumière du jour.
Un esprit propre en surface sécurisé par un intérieur bourgeois cossu est en manque d'insalubrités corporelles. Le besoin de nudité primitive privée d'espaces naturels et de prédateurs embusqués ne s'exprime plus que par le rêve donnant à un mari inexistant un rôle dominant.
La belle demande flagellation et irrespect, l'autre coté d'un confort ennuyeux, répétitif sevrant de plaisirs une créature cernée par ses envies de subir.
Luis Bunuel réalise une œuvre vomitive fusionnant apparats en surface et noirceurs dans les Hadès d'esprits corrompus. Toute une perversité humaine de passage évolue dans une forteresse intérieure capitonnée exigeant adaptation et motivation.
Le contact de certains corps est asymétrique. Le repoussant paie en prenant de force ce qu'il ne peut s'offrir dans un contexte naturel, un potentiel féminin demandeur d'outrages délaissée par un mari absent trop sclérosé de snobisme.
Derrière la façade cintrée d'un milieu capté comme attirant se dissimule un ennui profond, reconductible, nomade. L'image d'une position sociale imposant l'étiquette génère un manque.
Les pulsions sexuelles d'une entité protégée superficiellement demandent des vibrations naturelles.
Luis Bunuel, issu d'une famille bourgeoise guindée de l'austère Espagne du dernier siècle, a eu beau se révolter et ruer dans tous les brancards : il porte en lui les névroses obsessionnelles qui identifient le plaisir physique à une épreuve douloureuse et compliquée. Je suppose qu'on pourrait trouver dans la totalité de ses films ces angoisses hallucinées, mais il y en a certains où cette fascination/répulsion du sexe est au premier plan : Susana la perverse,
El (Tourments),
La vie criminelle d'Archibald de La Cruz,
Viridiana
dans la période mexicaine, mais aussi Le journal d'une femme de chambre,
Tristana,
Cet obscur objet du désir
plus tard, et, naturellement, Belle de jour
qui demeure un de ses films les plus célèbres.
Dans le supplément du DVD, l'adaptateur et dialoguiste Jean-Claude Carrère se pose la question : le succès du film repose-t-il sur le talent sarcastique et grinçant de Bunuel ou sur l'envie égrillarde d'aller regarder au cinéma le monde de la prostitution en chambre illuminé par la beauté de Catherine Deneuve
? À dire vrai, je crains bien que les spectateurs du monde entier aient espéré venir se rincer la pupille devant un film présentant toutes les cautions sages de la cinéphilie et se soient retrouvés finalement assez déçus devant l'absence de la moindre pointe de sein.
Et puis la voix de violoncelle de Geneviève Page, la sensualité immédiate de Françoise Fabian,
l'étrangeté de Muni. Les femmes sont décidément plus intéressantes que les hommes, dans Belle de jour
; ce qui est tout à fait le propos du cinéaste.
Le vendeur du journal "Herald Tribune" sur les champs Elysées fait un clin d'œil au film "a bout de souffle" .
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