Que dire d'un film qui mêle habilement (mais trop longuement) un grand souci de vérité historique, des décors superbes et inventifs (et c'est normal, c'est Danilo Donati, qui a travaillé pour Pasolini et Fellini pour son Satyricon -), un montage virtuose (Nino Baragli, monteur de Sergio Leone), des acteurs de tout premier plan – Malcolm McDowell, tout juste sorti d'Orange mécanique, dans le rôle-titre, mais aussi Peter O'Toole en Tibère, sir John Gielgud, la superbe et vénéneuse Helen Mirren, d'Excalibur et du Cuisinier, voleur, etc., des préoccupations graves et des considérations profondes sur Pouvoir et Tyrannie…et des scènes délibérément pornographiques (à actes "non simulés" comme on dit dans les revues sages) ?
Qu'en dire ?
Que ce n'est pas mal du tout, et un peu davantage !
Parce que cette pornographie très présente, voulue par le commanditaire, et co-réalisateur du film, Bob Guccione, patron du magazine Penthouse, concurrent extrême de Playboy, parce que cette pornographie, donc a un sens, pour une fois, celui d'engloutir, par sa prégnance et sa constance toute volupté et de placer tous ceux qui la pratiquent en déséquilibre total vis-à-vis du désir.Bien loin d'être bégueule, ennemi de la nudité ou du plaisir à l'écran, j'ai pourtant éprouvé au visionnage de ce film que je n'avais jamais vu, la même absence d'émotion que dans les scènes prétendument scandaleuses de Eyes wide shut ; mais là, où dans le hiératisme glacé du film de Kubrick, je voyais la distance dédaigneuse, finalement assez hautaine et aristocratique d'un moralisme un peu puritain, je discerne dans ce Caligula le mépris dégoûté qu'on ressent à la fin d'un monde. Tous ces gens qui baisent – c'est vrai lors de la visite de Caligula à Tibère, mais ça l'est aussi lorsque le tyran prostitue les femmes des Sénateurs romains dans une gigantesque partouze – tous ces gens sont saisis d'une frénésie qui les écœure, mais à quoi ils ne peuvent pas résister, puisqu'ils ne peuvent plus se proposer quoi que ce soit d'autre, toute la palette des plaisirs étant épuisée.
La chair a donc paru rarement aussi morne, en tout cas lorsqu'elle n'a pas la fraîcheur innocente (d'apparence, seulement, innocente !) du pré-générique où Caligula joue tendrement avec une ravissante Drusilla (Teresa Ann Savoy)…dont on apprend tout de même très vite qu'elle est sa sœur incestueuse et passionnément aimée…Un site ami de DVD Toile (je le suppose tel puisque son nom est cité pour sa critique des différentes éditions DVD) développe une très longue et très pertinente critique du film, sous plusieurs aspects, notamment celui de la véracité historique…
Il y a donc bien moins d'obscénité à regarder cela que Mon curé chez les nudistes ou La vampire nue ; et quelques séquences sublimes (la machine à faucher les têtes) sont destinées à demeurer…
Et vous pensez quoi de "Zizius au garde à vous", autre oeuvre mémorable de ce roublard producteur ?
Merci pour votre chronique à venir.
J'avoue avoir toujours réussi à éviter ce Caligula… peut-être à tort, finalement ! D'ailleurs je n'ai vu aucun film de Tinto Brass (sauf un sketch de "La Mia signora"). Mais ces temps-ci, justement, j'ai un oeil sur Salon Kitty, avec Ingrid Thulin… Je me demande de quoi il retourne… ?
Je vous cite : « Un montage virtuose (Nino Baragli, monteur de Sergio Leone) » Ah, Baragli ! Je ne vous l'envoie pas dire (bien que je n'aie pas vu ce film) ! Quand l'entrée "montage" est apparue sur les fiches dvdtoile.com, il m'a traversé l'esprit d'envoyer une modification rétrospective disant « Créditer Nino Baragli au montage dans… » Mais la liste est tellement longue que je n'ai pas (encore) eu le coeur d'imposer pareil pensum aux organisateurs de cet auguste site !
J'ai le sentiment désespéré de vous avoir moyennement convaincu, d'autant que vous imputez, bien légitimement, à Guccione un lourd passé de cochon parfaitement éveillé !
Cela étant posé, je vois mal pourquoi on frétillerait de respect lorsque Pasolini, dans Salo ou Catherine Breillat dans la totalité de son oeuvre présentent des séquences pornographiques vêtues (si l'on peut dire !) de toute la respectabilité bien-pensante qui s'attache à l'idée même d'intellectuel de gôche, et qu'on refuserait à Guccione, qui est assurément un type qui a fait beaucoup de fric avec des filles à poil, le droit de produire et de co-réaliser un film plus ambitieux.
Impétueux, votre mentor, Tinto Brass, sera l'invité de la Cinémathèque française ce 4 novembre 2006. Deux films bien de son crû en sa compagnie. Vraisemblablement accompagné de quelques-unes des splendides créatures qui ont jalonné ses oeuvres. C'est l'occasion ou jamais pour vous, qui vous vantez à grand renfort de messages tonitruants qui inondent dvdtoile, de n'être point "bégueule", de découvrir ce vénérable établissement, ou d'après ce que je crois savoir, vous n'avez jamais mis les pieds, alors que vos avis sur le cinéma français d'après-guerre y sont au centre de tous les débats.
Deux films de Tinto "réservés à un public averti" seront présentés en "version intégrale et inédite" ("Paprika", dont l'affiche est certainement un collector, et "vices et délices"). Cela promet. Une programmation faite en collaboration avec le festival de Montpellier. Eh bien, on ne s'ennuie pas dans le Sud ! Pendant que l'on se prépare à assister dans la capitale à une intégrale Murnau, qui va nous frigorifier nos âmes, certains se font des intégrales Tinto Brass, à s'en réchauffer les artères !
Plus sérieusement, pour tout vous dire, Impétueux, je n'ai jamais assisté à ces soirées olé olé de la Cinémathèque, y ayant simplement croisé les spectateurs. Et bien, je peux vous certifier que ce ne sont pas les mêmes spectateurs qui vont voir les films de Ozu, Murnau, et autres grands anciens(que je m'épuise à porter à bout de bras, littéralement, sur ce site). Quelques-uns de ces drôles de paroissiens ont même de grands pardessus à la Colombo.
Voici le lien pour accéder à ce programme, qui nous rappelle combien le cinéma est divers et varié :
http://www.cinematheque.fr/fr/nosactivites/projections/rendez-vous-cinema/cinemabis/manifestation/V2654-cinema-bis-hommage-tinto-brass.htm.
Si mon pas tremblant et suranné n'a point encore franchi les portes de la cinémathèque, je me fais tout de même envoyer le programme et, celui-ci reçu aujourd'hui même, je n'ai pas manqué de remarquer que Tinto Brass était convié à s'y exprimer, ce qui me semble tout de même une étrange idée…
Car loin d'être un de ses séides, je n'ai jamais rien vu d'autre de ce graveleux bonhomme que ce Caligula sur quoi nous nous exprimons, et qui doit être une sorte d'ovni d'ambition dans sa filmographie assez écoeurante.
Ce qui ne m'empêche pas de dire et redire que ce Caligula-là a des mérites – certes différents de ceux d'Ozu, de Mizôguchi et de Murnau que je vous sais tenir en haute estime, différents, mais très certainement largements supérieurs à ceux d'Isabelle Mergault sur qui des niquedouilles improbables nous chantent ici et là des romances énamourées.
Mais pas plus que sur le sublime Cannibal holocaust de l'excellent Ruggero Deodato vous ne voulez VRAIMENT engager là-dessus un grave débat, sacripant…
Je vois que c'est toujours aussi animé… Pour le moins, Impétueux a une santé de fer pour tenir face aux agressions dont il fait régulièrement l'objet sur le forum. J'imagine DVD-Toile à l'époque de la Reine Margot : ceux qui protestent n'auraient pas été très catholiques pour n'être pas très orthodoxes ! Beaucoup de sang aurait coulé. Les rapières et halebardes auraient beaucoup été utilisées. On se serait attendu dans l'ombre d'un porche. Hm !…
A propos de Caligula au cinéma. J'ai découvert Caligula avec "La Tunique". Vision très hollywoodienne de la Rome antique peu romantique. Quelques années plus tard, au collège, j'ai redécouvert Caligula au travers du cours d'Histoire consacré à la romantique Rome antique. Vu la vitesse à laquelle le cours passait sur les empereurs Romains et l'antiquité, nous ne risquions pas de devenir des puits de science… Et puis il y a eu le film interprété par Malcolm McDowell où, de fait, son rôle dans Orange Mécanique lui avait apporté une certaine notoriété et où Peter O'Toole connaissait sa traversée du désert à la recherche d'un bon film qui renouvellerait sa notoriété… Tout cela se conjugue plus ou moins bien mais une chose est certaine c'est que dans l'esprit ce film sur "Caligula" est très certainement le plus proche des réalités historiques. On aurait par trop tendance à vouloir bonifier l'Histoire en survolant les personnages et les sujets.
Il faut arrêter d'être des enfants de choeur. Les réalités sont les réalités. Peut-être que parfois un producteur recherche une notoriété dans la provocation par des images choc qui peuvent nous présenter n'importe quoi. Si ça fait partie du sujet, pourquoi pas. Du moment qu'on n'entre pas dans les travers reprochés au film de Besson sur Jeanne d'Arc, il n'y a pas de quoi engager des débats interminables. Par contre, dans la mesure ce qui avait été évoqué avec le film de Kubrick à propos de "Shining", pourquoi n'entrerions-nous pas dans une ré-évocation de scènes qui nous permettraient de situer tout un chacun face à ce qui lui plaît ou ne lui plaît pas dans "Caligula", Impétueux nous faisant un cours magistral aussi impeccable que celui qu'il nous avait présenté à propos de madame Marie-Antoinette ou… Catwoman !
Impétueux, il s'agit une programmation intelligente qui contrebalance le fait qu'un grand nombre de films austères et pointus sont projetés cet automne dans cet établissement.
On s'étonne tout de même, près de trois ans après un premier débat sur le sujet, que Impétueux ait placé ce film dans sa liste de ses films préférés à la 179° place (coincé entre Blanche neige et les sept nains et Chéri-Bibi). Voilà ce qui s'appelle une liste éclectique !
En regardant la liste des films préférés des contributeurs réguliers du forum, on y retrouve des films comme Aguirre, Blade Runner, curieusement Le feu follet…
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