Très curieux produit que ce film d'une durée de 4 heures, tourné en décor unique, presque une captation de la pièce de O'Neill in extenso. Si la réalisation de Frankenheimer est purement fonctionnelle, le film vaut le coup d'oeil pour le plaisir de voir de grands acteurs en quasi liberté. Homme d'action, souvent taciturne ou alors au contraire excessivement cabotin, Marvin est étonnant dans ce rôle de VRP dont les visites inopinées rythment l'existence d'une bande d'ivrognes de village. L'acteur a des monologues d'une maestria incroyable, entre lyrisme et vulgarité, face à des vétérans au bout du rouleau comme Fredric March ou Robert Ryan et un débutant hésitant comme Jeff Bridges. La langue est riche, le déroulement complexe, la forme ingrate, mais une édition en zone 2 sous-titrée permettrait de jouir pleinement du spectacle. Iceman cometh fait partie d'une collection de films tirées de classiques du théâtre U.S. et joués par de grands comédiens des années 70. Des éditeurs un peu "pointus" de par chez nous devraient vraiment s'intéresser à ce genre de produit.

A noter qu'une version télé plus ancienne de la pièce tournée par Sidney Lumet est également dispo en zone 1, interprétée par Jason Robards et le débutant Robert Redford.

Bien que j'en ai vu plus d'un à la télé américaine, je ne me rappelle plus le titre de cette collection particulière, financée par le circuit philanthropique, et dont le but était vraiment ce qu'on appelle le théâtre filmé. Ainsi je crois qu'une des deux versions de Maison de poupée (probablement celle avec Claire Bloom) appartenait à la collection, de même que Galileo avec le merveilleux Topol. Il s'agissait vraiment non de cinéma, mais d'immortaliser de grands moments de théâtre. Cependant The Iceman Cometh était tellement bon qu'il en a aussi circulé une version formatée pour les salles de cinéma, c'est-à-dire considérablement raccourcie. Je le signale pour dire que ce n'est pas celle-là qu'il nous faut…

J'ai (re) trouvé ! C'est la série American Film Theatre , du producteur Ely Landau. In Celebration de Lindsay Anderson fait partie de la série, tout comme Galileo (j'avais bon !) et, tiens, tiens, The Maids, c'est-à-dire Les Bonnes, de Jean Genet, avec Glenda Jackson et Susannah York (en même temps qu'elle tournait Gold ? bel éclectisme). Mais soyons honnête, dans la même série on trouve aussi le complètement raté Rhinoceros d'un certain Tom O'Horgan (malgré Zero Mostel et Gene Wilder).

L'American Film Theatre était un concept original : les gens étaient invités à aller voir la pièce dans un cinéma, où il était prévu qu'elle tienne l'affiche quelques jours seulement. Les billets se vendaient à l'avance et il y avait un entracte, comme au théâtre. Comme ils étaient bizarres, ces gens des années 70…