Pour sa première réalisation, Robert Redford place la barre haute. Lui qui est un des symboles des Etats-Unis, symbole de la réussite et des Etats-Unis solides, sûrs d'eux, etc, fait un film dur et critique sur un des piliers (John Ford ne me contredira pas) de son pays : la famille.
L'histoire est classique, mais elle est racontée avec une telle finesse et une telle émotion, les acteurs sont tellement formidables que l'on se laisse aller dans cette histoire. Difficile de ne pas s'identifier aux perditions de tous les personnages : du fils qui n'arrive pas à parler, à dire ce qu'il ressent, du père qui n'arrive pas à recoller les morceaux de sa famille brisée, ou bien de la mère qui ne peut plus témoigner de la moindre affection.
Le film est réalisé à l'époque de Reagan, c'est-à-dire à une époque à laquelle le pays voulait afficher aux yeux du monde sa puissance, sa force, sa bonne santé. C'est l'époque des Rocky des Rambo et autres sauveurs du monde… Ce film fait du coup un peu "pavé dans la mare" en remettant tout cela en question, en proposant au contraire de s'interroger sur ce que l'on est plutôt que de partir à la conquête du monde…
Le dernier plan du film est d'ailleurs très joli, avec un mouvement de grue qui finit par cadrer tout le voisinage. L'idée est simple mais efficace : cette maison là, dans laquelle nous avons suivi une tragédie familiale n'est qu'une maison parmi des dizaines, voire des centaines d'autres.
Cette histoire préfigure celle de L'Homme qui murmurait à l'oreille des chevaux. Thème et style identique : une observation de troubles psychologiques via une mise en scène classique, qui privilégie les confrontations à deux ou trois personnages, tout en les montrant évoluer dans leur environnement social.
Bobby Redford murmure ici à l'oreille de Donald Sutherland, qui réalise une performance de tout premier ordre. On parle peu aujourd'hui de cet acteur, qui a pourtant marqué son époque, par un abattage énorme et un registre varié.
Mais cette histoire véhicule des clichés, et surtout d'autres cinéastes ont fait mieux depuis sur le mal-être adolescent. Ces "gens ordinaires" pourront avoir du mal à intéresser le public actuel, en particulier le public français, avec des péripéties un peu trop ordinaires (?), ou un traitement du sujet qui accuse ses trente ans d'âge. Voilà d'ailleurs sans doute pourquoi cet oscar 1980 du meilleur film est aujourd'hui un peu tombé dans l'oubli.
Intéressant de voir que les deux grands séducteurs "pensants" des années 70 : Newman et Redford,
sont passés à la réalisation, pour traiter des mêmes genres de sujets familiaux et intimistes, sans rapport évident avec leur image de star…
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