Et puis il y a Adolph Green, le scénariste qui réussit une nouvelle fois le tour de force de réussir à construire une vraie et complexe histoire dans le cadre d'une comédie musicale. Il avait déjà réussi à le faire dans Chantons sous la pluie, créant une romance avec comme toile de fond le cinéma. Il le refait ici avec comme toile de fond cette fois le monde de show-business.
Ses personnages sont particulièrement bien campé. D'abord avec le couple truculent de faire valoir : Oscar Levant et Nanette Fabray mais surtout grâce au couple principal. Cyd Charisse fait preuve de sa beauté et de sa grâce comme rarement, magnifiée il est vrai par un Vincente Minnelli également fort doué pour ce genre de chose. Fred Astaire, lui, accepte de jouer un rôle de "has been", vieillissant, rôle que peu d'autres acteurs hollywoodiens auraient oser accepter.La légèreté, la beauté des numéros musicaux, la tenue du film font de Tous en scène une des plus belles comédies musicales hollywoodienne. Elle est pour moi en tous cas, celle que je préfère…
Tous en scène de Minnelli témoigne, outre ses qualités esthétique et chorégraphique, d'une maturité de la comédie musicale. Cette apogée du genre se fait, néanmoins, sans que le réalisateur ait recours à des effets de manche ou à d'autres vains artifices car son but n'est pas ici de révolutionner la structure ou le substrat de ce genre virevoltant, mais simplement de plonger le spectateur dans l'onirisme et dans un tourbillon de couleurs et de bonheur.
Si ce film n'innove en aucune manière, il faut quand même noter que le réalisateur enrichit le contenu de l'intrigue en y insérant des thèmes sociétaux ou professionnels tels le vieillissement ou l'échec. Minnelli traite le sujet avec une réelle émotion grâce par un humour dynamique voire caustique.Une des séquences du film reste à jamais gravée dans le marbre de nos souvenirs, il s'agit de la scène du pas de deux dans le parc entre Fred Astaire et Cyd Charisse, probablement l'un des plus parfaits jamais filmés. En fait, les mots manquent pour décrire la magie contenue dans chaque instant, chaque couleur, chaque chorégraphie… Un bonnheur à l'état brut !
Ce film remporta, en 1954, les Oscars du meilleur scénario, de la meilleure musique (d'ailleurs, la chanson finale du film, That's entertainement, est devenu emblématique des musicals) et des meilleurs costumes.
Le ballet final d'une douzaine de minutes "Girl hunt, a murder mystery in jazz" reste une des séquences mythiques de la comédie musicale.
Chef-d'œuvre ? Voire ! Le film de Minnelli réunit tellement de perfections qu'il en devient à la longue légèrement ennuyeux, parce qu'il est trop long, un peu désinvolte dans un scénario trop prévisible, qui accumule les scènes à faire et que, malgré des dialogues brillants, on n'y accroche pas vraiment, on n'a qu'envie de dire Bravo ! ou Comme c'est bien fait ! ou Impeccable ! et qu'on n'est jamais saisi dans le tourbillon comme Stanley Donen sait en créer, dans Chantons sous la pluie ou Les sept femmes de Barbe-rousse. Il est vrai aussi que le peu que je connais de Minnelli est toujours ainsi : réussi tellement, et légèrement ennuyeux.
L'idée de départ de Tous en scène est plutôt séduisante et bien venue, celle du has been, raccroché presque in extremis par un couple d'amis pour jouer une comédie musicale qui se révélera de plus en plus improbable, ab initio, puis, malheureusement, de plus en plus convenue. La première demi-heure est amusante, drôle, spirituelle, acide, notamment l'accueil de Tony Hunter (Fred Astaire) star dépassée et ringarde, à l'arrivée à New-York du train de Californie vite négligé par des journalistes qu'il croit un instant venus patienter pour lui, et qui attendaient en fait l'éclatante beauté d'Ava Gardner.La méfiance mutuelle, réciproque que se portent Hunter et la ballerine Gabrielle Gérard (Cyd Charisse), leur attirance dissimulée d'abord, plus éclatante ensuite est davantage convenue, et le happy end final, qui va de pair avec le triomphe public de la comédie musicale, d'abord vilipendée tout cela est, en revanche, d'une certaine banalité. Mais ça n'aurait aucune importance, car on ne demande pas à ce genre de films un récit impeccable, si la musique et les chorégraphies étaient au rendez-vous…
Mais à part That's entertainement, qui a laissé une trace, les lyrics sont assez banals, et les numéros dansés, parfaitement réussis, un peu languissants…
De fait, je ne suis pas extrêmement féru du cinéma de Vincente Minnelli, que j'ai trouvé toujours trop léché, trop chiadé pour qu'il me touche vraiment.
Il est vrai que je ne le connais pas beaucoup et que je me suis cantonné aux musicals, genre étasunien qui me convient assez ; je viens de relire brièvement ce que j'ai écrit sur les quelques œuvres que je possède, et je trouve à peu près toujours la même réticence ; j'écrivais sur le fil du Pirate (4/6) qu'on a(vait) davantage l'impression d'assister à des morceaux de bravoure, voire à des numéros de music-hall – certes tous parfaitement réunis et mis en scène – qu'à une véritable construction cinématographique, sur Brigadoon (5/6) que C'est toujours embêtant quand la perfection formelle d'un film éteint un peu l'émotion, parce que, précisément, elle prend le pas et qu'on en arrive à l'admirer avec trop de distance.
J'ai mieux aimé Gigi (5/6), grâce à Colette et à Paris, Un Américain à Paris, grâce à Gershwin et à Paris, et Le chant du Missouri, grâce à Judy Garland et à l'atmosphère Vieux Sud.
Mais bon, ce n'est pas à mon Panthéon, mais c'est tout de même très très bien…
On ne peut pas tout aimer, c'est certain ! Pour ma part, j'ai tenu 15 minutes hier face à "Eroica" de Munk, puis trois minutes face à Hair avant d'apprécier énormément Mon meilleur ennemi. Vous avez une prédilection pour le cinéma cartésien, très éloigné du cinéma de Minnelli. Mais essayez Comme un torrent, Celui par qui le scandale arrive, La toile d'araignée, Les ensorcelés tout de même… Vous comprendrez et apprécierez peut-être mieux son univers.
Ah, diable ! Me voilà cartésien, alors que je reproche (sans excès ! ) à Minnelli, précisément, d'être un peu trop ordonné, un peu trop classique, un peu trop parfait, d'être un peu le Versailles du cinéma, voilà qui m'étonne…
Pour moi qui place dans la fascination les fééries, qu'elles soient de Jean Vigo (L'Atalante, un film cartésien ?), de Christian-Jaque (aussi bien Les disparus de St-Agil que L'assassinat du Père Noël), de Carlo Rim (la fuligineuse Armoire volante), et, pêle-mêle, Orfeu negro, Peau d'âne, Du sang pour Dracula, Le cuisinier, le voleur, sa femme et son amant, les films de la Hammer et de Mario Bava, voilà une bien curieuse découverte…
J'aime ce que j'aime, et non pas ce que la doxa dit qu'on doit aimer…, même si elle ne se trompe pas toujours. Et je me fiche bien ce que Jacques Lourcelles ou Jean Tulard, la Cinémathèque, Positif, Les Inrockuptibles, les listes des meilleurs films jamais tournés (ah ah ah, Citizen Kane meilleur film du monde, La règle du jeu, meilleur film français…) et n'importe qui me prescrivent…
Pour en avoir discuté avec un ami cinéphile, nous étions arrivé à la conclusion que le cinéma de Minnelli n'était pas très facile d'accès. Voir Thé et sympathie, La toile d'araignée, et les deux magnifiques mélos que sont Some came running et Celui par qui le scandale arrive oeuvres tortueuses, ou les personnages principaux, victimes de névroses et de complexes, inadaptés à leur environnement, se réfugient dans le rêve, aux confins parfois de l'hôpital psychatrique (Quinze jours ailleurs). Loin d'un Versailles, plutôt l'Hotel-Dieu…
Une des plus belles oeuvres du cinéma, à mon goût, mais j'ai eu le privilège de bénéficier d'une rétro complète en salles (sur laquelle je me suis déjà longuement épanché).
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