Je vais m’expliquer là-dessus.
Tout d’abord il faut savoir qu'Une partie de campagne,À force de faire mine de tout comprendre avant tout le monde – ou plutôt, ce qui est encore moins laudatif – d’anticiper sur les allures plus calmes d’une société structurellement conservatrice, VGE s’est fracassé en 1981 sur la Force tranquille de François Mitterrand. Il ne s’en est jamais remis. Peut-être d’ailleurs subodorait-il cela en se voyant filmé par Depardon puisque le documentaire, mis sous embargo par son commanditaire, n’a pas été diffusé avant 2002.
De ce fait, donc, on n’évoque pas la mort brutale de Georges Pompidou le 2 avril 1974, bien avant le terme de son septennat, ni l’extraordinaire bouillonnement du marigot où s’agitaient ses potentiels successeurs et les candidatures envisagées et avortées de Pierre Messmer, alors premier ministre, de Christian Fouchet, d’Edgar Faure. Pas davantage celle de Jacques Chaban-Delmas, soutenu par l’UDR, principal parti de la majorité, mais trahi par Jacques Chirac qui a entrainé avec lui 42 autres députés gaullistes. On est d’emblée et presque exclusivement aux côtés de Giscard et de ses principaux lieutenants, en premier lieu Michel Poniatowski, qui sera son premier ministre de l’Intérieur.
Mais donc – et je reviens à mon propos initial – comment goûter le film si l’on n’a pas immédiatement en tête les manœuvres d’appareil qui sont filmées sans être explicitées ? Ainsi la rencontre avec Claude Labbé, patron des députés UNR à l’Assemblée qui, après le premier tour et le désistement de Chaban vient apporter la soumission de son groupe ; ainsi ces visages qui surgissent ici et là, lors d’un meeting (l’œil sombre du vertueux Jean Royer, maire de Tours, qui avait obtenu au premier tour 3,74% des voix) ou d’une réunion du brain-trust (Jean Lecanuet, Roger Chinaud, Xavier Gouyou-Beauchamps.La caméra capte tout et si le film a été si longtemps retenu par Giscard, c’est, paraît-il, qu’on le voit s’emporter fortement contre un de ses plus fidèles soutiens, Michel d’Ornano qui avait eu le tort d’aller parler à la télévision alors qu’il le lui avait interdit. Ce même d’Ornano lancé en 1977 dans un combat suicidaire pour la conquête de la mairie de Paris, raflée par Chirac. Mais je gage que VGE n’était pas non plus si content que ça des images qui le montraient plusieurs fois sortir son peigne de poche et lisser avec application ses longues mèches de cheveux…
Cela étant, qui est narquois, il est impossible de contester que cette Partie de campagneMais il est vrai davantage que les Français d’alors croyaient encore au pouvoir de la politique ; ils n’avaient pas tort, d’ailleurs et le souvenir du général de Gaulle n’était pas loin. Depuis lors, entre Union européenne, mondialisation éperdue et pouvoir des GAFA…
Ce documentaire, premier long-métrage du déjà talentueux Raymond Depardon, retrace sa campagne aux élections présidentielles de 1974. Il a fallu attendre 2002 pour que Giscard autorise la diffusion du film sur arte et dans les salles de cinéma. Avant cette sortie, le film était connu sous le titre "50,81%".
Dans mon souvenir, et avec le regard de quelqu'un qui n'était pas né en 1974 mais s'intéresse à l'Histoire, c'est un documentaire plein d'énergie et surtout un intéressant témoignage sociologique sur une autre France, la France du début des années 1970.
Une France que les réformes et les impulsions giscardiennes -rappelons entre autres qu'il oeuvra vigoureusement pour la construction européenne- ont transformé en profondeur.
Page générée en 0.0027 s. - 5 requêtes effectuées
Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter