5,4/6. Copie conforme de Assassinat (1964) réalisé par même Masahiro Shinoda un an plus tôt. Intrigue complexe (impossible de comprendre qui est qui et pour qui dans ce nid de vipères), mais bien bâtie et subtile (nombreux thèmes abordés de façon nuancée et réfléchie), personnages élaborés, images magnifiques en noir et blanc, mise en scène brillante et complètement maîtrisée (variété et brio des plans) suivant à la perfection de près ou de loin la déambulation des nombreux personnages dans des décors urbains et campagnards, et acteurs très performants. La guerre des espions est un très beau classique du cinéma japonais d'après-guerre.

Revu en dvd pour un avis en très forte hausse. J'étais tout bonnement passé à côté il y a quelques années (sept ans déjà). L'écriture cinématographique est celle des années 1960, utilisant ralentis, plans fixes, mais aussi des plans qui portent la vision du personnage principal. La forme est magistrale et rend accessible et prenante une histoire ténébreuse de ninjas espions et de clans rivaux. Chaque plan est parfait, porteur de tension dramatique, avec des déplacements représentés de façon optimale. Les pensées également. Une part énigmatique balaie ce récit. Des tirades existentielles en arrière plan. Des séquences décalées par rapport aux normes : ainsi ces combats au sabre, avec le chant des oiseaux comme seul son. Il s'agit juste d'une oeuvre plus pointue que ce qu'a pu faire Kurosawa, plus grand public. Le public visé, notamment en Europe, sera nettement plus réduit.

Ce film s'adresse à des connaisseurs, cinéphiles, pas trop au grand-public, malgré des combats au sabre et des personnages féminins. On perçoit l'influence qu'a pu avoir ce film sur de très nombreux cinéastes contemporains, en terme de conduite de récit ou d'ambiance… Je pense à Usual Suspect par exemple (le personnage principal découvrant quel est le criminel du groupe). Film d'auteur pointu donc, qui restera toujours à redécouvrir, car il ne vieillira pas. Un des meilleurs films japonais des années 1960 à mon avis (époque particulièrement créative au Japon, surtout si l'on compare avec ce qui sort en salles aujourd'hui dans ce pays). Très curieusement, le cinéma japonais a suivi une voie assez parallèle à celle du cinéma italien, avec un pic qualitatif après-guerre, atteignant des sommets entre à mon avis 1949 et 1965 (et donc déclinant simplement avant le cinéma italien).

Ça a l'air bien chiant…

Non, assez facile d'accès (enfin, il faut apprécier le cinéma japonais de répertoire…) alors que Double suicide… est, lui, difficile d'accès. L'éditeur Wild Side avait eu la bonne idée https://dvdtoile.com/CritiqueDvd.php?251(..) de sortir un coffret avec 4 titres phares de Shinoda. Le coffret est sorti en 2007, avait été très bien présenté par Alholg (bon connaisseur) sur dvdtoile, et est épuisé depuis. Dommage.