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Il ne manque que Connery


De Impétueux, le 25 mai 2019 à 22:58
Note du film : 4/6

Oui, c'est bien cela : avec Sean Connery à la place du trop fade Roger Moore et – soyons honnêtes – une demi-heure de moins, L'espion qui m'aimait figurerait sans aucun doute parmi les meilleurs films d'une saga qui ne cesse de s'étirer et, désormais, de se renier et de se déconstruire. Après l'assez pitoyable Homme au pistolet d'or, les roublards producteurs Saltzman et Broccoli rappelaient Lewis Gilbert, le réalisateur de On ne vit que deux fois qui tournait un film nerveux, drôle, bien dialogué où l'on sentait déjà venir la Détente puisque l'Union soviétique et l'Occident collaboraient sans (trop) d'arrière-pensées pour éviter l'Apocalypse nucléaire suscitée par un des génies du Mal qui sont les silhouettes obligées des films de genre.

Précisément, si L'espion qui m'aimait fonctionne aussi bien, dans le cadre classique et convenu du Bondisme, c'est parce que le film bénéficie d'un atout en or : comme dans Goldfinger, le méchant est bifide : à Auric Goldfinger s'attachait le Coréen gigantesque et terrifiant Oddjob (Harold Sakata), l'homme qui décapitait les statues de marbre d'un coup de son chapeau aux arrêtes coupantes. Et à Karl Stromberg (Curd Jürgens) est désormais liée la figure monstrueuse de Jaws (Richard Kiel) dont l'acromégalie et les mâchoires métalliques ont d'emblée fait un effet bœuf. Lorsque Bond rencontre et défie des adversaires à sa mesure, d'une cruauté sans retenue, impitoyables et mégalomanes, l'esprit du film en est irrigué.

Ajoutons aussi que, parmi les James Bond girls, aussi nombreuses que décoratives et spectaculaires, celle de l'instant, qui s'appelle Barbara Bach (et qui n'est pas autrement connue que d'avoir été la femme de Ringo Starr, le batteur des Beatles) est sans doute parmi les plus craquantes qui se puissent ; en tout cas et au contraire de beaucoup d'autres, elle ne manque pas d'un certain talent d'interprétation qui rendrait presque crédible son rôle de major de l'Armée soviétique. Et puis la musique (le thème musical, principalement) de Marvin Marvin Hamlisch est très percutante.

Mais aussi et peut-être surtout le plaisir amer de constater, s'il en était besoin, qu'il y a cinquante ans (le film date de 1977), les cinéastes n'étaient pas simplement des compilateurs d'effets spéciaux et des hystériques du montage frénétique mais savaient composer une scène d'action sans vouloir rendre les spectateurs fous furieux. La poursuite de la Lotus Esprit sur les routes de Sardaigne par une kyrielle d'ennemis de la motocyclette à side-car explosif, à la voiture classique puis à l’hélicoptère mené avec habileté par la perverse et séduisante Naomi (Caroline Munro) est un modèle du genre : à aucun moment on ne perd le fil et on ne se fait éblouir (au pire sens du terme) par des explosions exaspérantes qui ne sont à que pour sidérer le spectateur, non pour le faire participer à l'action.

Il est amusant de citer les clins d'œil parsemés ici et là par Lewis Gilbert ; bien sûr la bizarre demeure submersible du monstrueux Stromberg/Jürgens évoque évidemment le Nautilus du Capitaine Nemo dans 20000 lieues sous les mers de Richard Fleischer et les terreurs des Dents de la mer de Steven Spielberg sont narquoisemement moquées lorsque Bond et sa belle amie surgissent sur la plage sarde au grand effroi des baigneurs. De même, au début, lorsque sur la mélodie de Maurice Jarre dans Lawrence d'Arabie, Bond chevauche dans le désert. Et même si on ne craignait l'anachronisme, on rappellerait volontiers que la main de Jaws qui soulève un soupirail a dû inspirer Sam Raimi qui s'en est servi dans Evil dead

Pensons en tout cas que l'époque – 40 ans déjà et davantage – était bien plus libre que ne l'est notre triste aujourd'hui. Bond se voit offrir par son ancien camarade de Cambridge, le cheik Hossein (Edward De Souza), sous une tente fastueuse, un festival d'almées – dont je remarque avec plaisir qu'aucune n'est voilée – ; notre vertueux siècle n'aurait pas toléré cela ! Ce qui me fait songer avec nostalgie au délicieux aphorisme délivré par James de Coquet, homme de goût et jadis chroniqueur du Figaro : La fraise est un porte-graines, comme la femme, ce qui ne l’empêche pas de constituer, elle aussi, un dessert délicieux et rafraîchissant. Qui oserait écrire ça aujourd'hui ?


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De Lagardère, le 7 octobre 2008 à 06:25
Note du film : 4/6

Tout cela est fort vrai. Surtout pour les roploplos. Ne manquait que Sean Connery….


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