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A contre-sens de notre époque et pourtant...


De Impétueux, le 24 septembre à 15:39
Note du film : 3/6

Je ne suis pas de ceux qui chantent monts et merveilles pour ce Gabin tardif. Le tonnerre de Dieu (1965) est plutôt meilleur que nombre de films de l'acteur dans cette époque, meilleur largement que Maigret voit rouge (1963) ou L'âge ingrat (1964) l'un et l'autre de Gilles Grangier, meilleur que Le jardinier d'Argenteuil (1966) de Jean-Paul Le Chanois ou que Le tatoué (1968) du même Denys de La Patellière qui a donc adapté à l'écran le roman Qui m'emporte de Bernard Clavel. Notons d'ailleurs pour autant que Le tonnerre de Dieu a été un des très grands succès publics de Gabin : plus de 4 millions de spectateurs.

Jean Gabin, c'est l'évidence même, l'évidence d'un être humain a un jour écrit Jacques Prévert. Et de fait s'il n'avait pas été là, les films cités plus haut auraient encore moins eu de raison d'être qu'ils n'en ont et les superbes réussites Le cave se rebiffe de Gilles Grangier (1961), Un singe en hiver (1962), Mélodie en sous-sol (1963), Le clan des Siciliens (1969) tous trois d'Henri Verneuil, La horse (1970) et Le chat (1970) de Pierre Granier-Deferre n'auraient pas marqué si durablement, si éternellement le cinéma français.

La distribution du Tonnerre de Dieu est plutôt réussie. Marie Brassac (Lilli Palmer), toujours la cigarette au bec, est superbe en femme encore amoureuse, courageuse, résignée à l'alcoolisme et aux colères de son mari Léandre (Gabin), amoureux de chevaux (comme l'acteur au demeurant) et désespéré de n'avoir pas eu d'enfant. Faisant ce qu'elle sait le mieux faire – être jolie – Michèle Mercier interprète Simone, la prostituée nantaise qui sera rédimée par l'affection de Léandre et l'amour du voisin Roger (Georges Géret) qui surprend agréablement dans un des rares rôles positifs de sa carrière. Il n'y a guère que Robert Hossein en Marcel, maquereau funèbre mais vite résigné à se voir escamoter sa gagneuse qui détonne, mais on sait que c'était un assez mauvais comédien.

Distribution réussie, donc, mais scénario filmé au ralenti, mollement, sans rythme et surtout d'une parfaite indigence. Qui peut croire vraiment, dans un film qui se veut réaliste, à cette suite d'histoires invraisemblables, celle du vétérinaire retraité opulent et imbibé d'alcool qui ramène dans son beau manoir tout ce qu'il trouve dans ses virées bistrotières, filles perdues, clochards, marginaux, pauvres gens que sa femme accepte parce qu'elle aime son homme et culpabilise de ne pas lui avoir donné d'enfant ? Et de cette pauvre fille maquerellée par un barbeau couard dans un pauvre coin de Nantes qui, suivant son client (ce qui est dans l'ordre des choses) se voit proposer par lui de rester avec lui avec l'accord de sa femme et redevient en deux temps trois mouvements une pure jeune fille ?

Somme toute il y a des histoires encore plus niaises dans le cinéma ; mais celle-ci est trop languissante et finalement trop prévisible pour être vraiment satisfaisante. Il est vrai, comme énoncé plus haut que le Gabin final tournait sans trop de discernement. Quelquefois, souvent même, ça tombait sur le mauvais côté de la pièce.


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De Tamatoa, le 16 janvier 2014 à 00:58
Note du film : 5/6

C'est sans réserve aucune que je rejoins l'avis de David-h ! Un sentiment de bien-être, mais oui, c'est tout à fait ça ! On a l'impression qu'avec ce Tonnerre de dieu, Denys de La Patellière s'offre une récréation bucolique. Mais pas fou, le réalisateur des Grandes familles : Il ne nous livre pas ici une adaptation des plus fidèles du roman de Clavel. D'abord, il expatrie toute la haute et basse cour, elle qui, dans le livre, étouffait dans la pollution Lyonnaise, dans la campagne Nantaise. Et puis il en profite pour rendre Léandre Brassac un peu plus argenté ce qui lui permet de s'attaquer à l'essentiel de l'histoire, sans croûler sous les dettes. Parce qu'à mon avis, et avant tout, Le tonnerre de dieu, c'est l'histoire d'un chagrin chez un homme qui avait presque tout pour être heureux. Sauf un enfant … Et ce chagrin, Gabin nous le livre à petites gouttes de breuvages qui l'aident à se désinhiber de ce drame. Bien sûr, on peut gloser à l'envi sur mille petits détails mesquins concernant un éventuel vieillissement du film. Je prétends qu'il est d'actualité et comme le souligne fort bien David-h, sans nul besoin de moults mouvements de caméras pour aller à l'essentiel. Et quoi que l'on en pense, le tonnerre de dieu tient encore formidablement la route.

Peu importe que l'adorable Michele Mercier renonce si vite à son statut de putain, que son Jeoffrey de Peyrac de proxénète lache si vite et presque tendrement son gagne-pain. Le principal n'est pas là. Il y a dans ce film un personnage essentiel qui passerait presque inapercu tant il est souffrant comme les pierres du château et discret : C'est la femme de Brassac. La merveilleuse Lilli Palmer !

Cette femme fit une brillante carrière aux USA et vint faire quelques petits tours par chez nous. Elle fut, par exemple, Odette de Starenberg dans le film où trainait encore un peu de parfum d'un Guitry qui allait nous quitter : La vie à deux. Dans ce Tonnerre de dieu elle représente la femme éperduement amoureuse dans un silence et une patience cadeau pour un mari qui tutoie les anges un peu trop souvent, et qui lui reproche un ventre cimetière d'enfants… Elle ne bronche jamais ! Elle encaisse. Tout. Les chiens ramassés, les putes de même, tout ! Elle est magnifique dans son renoncement et sublime dans l'immense amour qu'elle porte à son Gabin de mari, atrabilaire chronique et poliment désespéré. Michèle Mercier, Angélique depuis peu disparait complètement devant la candeur de cette actrice et ce rôle qu'elle défend avec merveille. Plusieurs très jolies scènes lui offre la possibilité de redire en silence ou en quelques phrases parcimonieuses le chêne charmant qu'elle est face à son roseau de mari à la grande gueule.

Par rapport au livre, le film est très aéré, au sens propre et figuré. Même avec une imagination débordante, il est difficile en lisant Qui m'emporte, le livre de Clavel, d'entendre le chant des grenouilles ou le vent dans les arbres. Et la scène de l'orage dans la grange est fort bien reussie.

À ce propos, Georges Géret, bien jeune et dans sa période la plus faste car après Compartiment tueurs il devint méconnaissable, est excellent et j'ai envie de dire comme d'hab. Même si il est doublé dans la grange pour faire face aux chevaux terrorisés. Le côté misantrope de Gabin est peut-être un peu trop appuyé, c'est vrai. Mais très paradoxalement, il garde la stature qu'il avait dans Archimède, le clochard, un poivrot distingué. Et en tendant bien l'oreille, par instants, on entend comme des tonalités du Baron de l'écluse… En tous cas, il y est bon et autrement moins ridicule que dans sa jupette de Golgotha (!). Mais tout ce petit monde est à sa place. A t-on volontairement, à des fins promotionnelles, reconstitué le duo Mercier/Hossein qui démarrait en trombe la saga des Angélique ? On le dit

…Je remarque que notre site nous présente une affiche du Tonnerre de dieu (Matrimonio alla franchèse) qui reprend le même dessin que pour Angélique. Le hasard ferait-il aussi bien les choses ? Ou les dessinateurs était-ils en manque d'inspiration ? Et ça frappe en cette année 1965. Car malgré la fraicheur du vent léger de Mary Poppins, ils balayaient tout sur leur passage. Mais peut-être ont-ils été choisis parce qu'il fallait que ce soit eux, tout simplement. En tous cas, la belle et sensuelle Mercier est à sa place. Hossein, lui, sans sa célèbre cicatrice reste un peu en retrait. Mais Hossein un peu en retrait, c'est comme une marque de fabrique..

Oui, David-H a raison, je le redis. Et je partage très grandement son enthousiasme. Dans ce beau film sur la vie avec tout ce qu'elle comporte de tempêtes et de ciel bleu, il fait bon entendre le vent faire revenir à la raison les gens élégants et les autres. Et puis quoi ? Quand Léandre Brassac se cuite, c'est un vieux singe qui se souvient du Yang-Tsé-Kiang qui n'est pas loin .. Il se met en rogne, c'est Noël Schoudler qui éructe ! Et quand, en tout bien tout honneur, il est câlin avec sa protégée, c'est Monsieur qui reprend du service. On est en famille dans ce film. Et pour longtemps encore. Le tonnerre de dieu ressemble à un cours de rattrapage.. On se sent bien. C'est facile, je sais.

Mais on se sent bien.


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