Une belle surprise que ce Kazan méconnu. Il aurait été réalisé en 1953, en pleine "chasse aux sorcières", par le cinéaste pour se dédouaner de son engagement passé en faveur de la cause communiste. Adolphe Menjou connu pour son activité anti-communiste joue dans Cirque en révolte un commissaire politique cynique de Tchécoslovaquie, en charge de la surveillance du cirque suivi pour ses activités soi-disant subversives. Kazan filme à son habitude un monde fiévreux, soumis à des conflits de tout type, notamment parents-enfants et hommes-femmes. Les personnages du film sont très représentatifs de ce que l'on trouve dans son oeuvre. Terry Moore fait penser à Natalie Wood de La fièvre dans le sang. Les élans amoureux sont filmés avec un lyrisme flamboyant, qui atteint le cœur du spectateur. Les acteurs sont dirigés de main de maître (Gloria Grahame est magnifique dans le rôle de la femme hésitant entre la mari et l'amant).

Drame fiévreux, parabole de la vie en société, Cirque en révolte impressionne par la maestria de la mise en scène de Kazan. Le final, éblouissant, est déroulé à toute vitesse à l'aide de plans courts et de gros plans qui évoquent à la fois le cinéma soviétique muet et celui à venir de Sam Peckinpah. L'écriture cinématographique est moderne et ce film passe parfaitement l'épreuve du temps. Kazan place les péripéties de son présent long-métrage à la limite de la grandiloquence, en deçà du ridicule. Par exemple, l'emploi en gros plans du visage de la matriarche du cirque, probablement une gitane de souche, qui donne des ordres muets à son entourage, notamment au bellâtre de service. Des petits détails intégrés dans les images (les personnages et animaux pittoresques du cirque, en activité) et les sons, distillés à foison, créent une oeuvre d'envergure, positionnant Cirque en révolte parmi les œuvres du cinéma d'auteur à connaitre absolument.

Tiens, oui… Kazan avait donc déjà tourné avec Richard Boone, avant L'arrangement. Curieux, ce film fantôme…