Le département « classique » de Paramount s'intéresse aux projets de films plus difficiles, autrement dit, moins commerciaux. A cet égard, les films qui en sortent méritent généralement un œil curieux. C'est le cas ici avec American Rhapsody.

Tout en restant un film de studio, avec l'esthétique studio, le film possède des qualités proches du film indépendant. L'accent est ainsi mis sur les personnages dans leurs demi-teintes, des personnages quotidiens et non pas des héros munis de qualités extraordinaires. Le sujet abordé est lui aussi particulier et inhabituel (ici l'oppression stalinienne en Hongrie et la quête identitaire). Plus étonnant : une bonne partie du film est en hongrois sous-titré, offrant par ailleurs une gestion de l'anglais avec intelligence (ils ne se mettent à parler anglais qu'une fois « évadés » et qu'ils sont libres d'aller aux USA).

Mais la réussite du film est ailleurs : dans le ton, léger et cocasse, souvent avec un humour au second degré, et surtout dans un pied nez assez jubilatoire consistant à inverser les données de départ. Du film sur des Hongrois émigrés, on passe bientôt au film sur les Etats-Unis vus par un regard étranger. On sent par ailleurs que cette liberté vient de la confiance de la réalisatrice qui raconte là une partie de sa vie…

Toute la partie de l'arrivée de Suzanne est d'ailleurs la plus belle du film, offrant un portrait intelligent des Américains, tout à la fois suffisants (sourire toujours affiché, mauvais goût, et produits finis d'une société de consommation imposant un seul et unique mode de vie, uniformisé) mais aussi surtout touchants dans leur humanité quand ils sont pris individuellement, offrant un respect face à l'immigrant, une chaleur sincère.

Nastassja Kinski trouve par ailleurs ici un très beau rôle de mère qui ne lui est pas habituel. Elle s'en sort plutôt très bien, toujours juste et vraie dans sa performance. Le maquillage par contre est plutôt gênant. Si elle est crédible dans l'âge de la femme mûre, elle ne l'est plus vraiment quand il faut incarner la jeune femme de 25 ans…