Pour ce premier film, Jane Campion touche juste et fort, au point même de gagner la palme d'or du court métrage à Cannes. Ce film raconte une petite anecdote sans grand intérêt dans l'absolu : à bord d'une voiture, un père, sa soeur et son fils. Le gamin jette par dessus bord les éplechures d'orange contre l'avis de son père qui décide d'arrêter la voiture en demandant à son fils d'aller ramasser ce qu'il a jeté. Commence alors une confrontation dans laquelle va ressurgir les tensions familiales et passées.

Le film est envoutant et la réalisatrice fait preuve ici déjà de son talent pour mettre en place des personnages très forts et très dense, alors que rien de spécial ne semble étayer cette densité. Tout est dans le non dit, dans les regards, dans les présences. Le fait de ne rien savoir sur les trois personnages contribuent terriblement à mettre en place cette ambiance, ce malaise. Ne sachant rien, on se sent obligé de deviner, d'inventer.

Le final est d'ailleurs très fort à ce niveau là. L'enfant revient, découvre sa tante hagarde et l'on peut se demander alors ce qui s'est passé chez elle durant cette courte absence qui fut nécessaire au père pour aller retrouver le fils. Le gamin regarde ensuite les visages de sa tante, de son père pour chercher une ressemblance. La peau devient alors épluchure d'une vérité à découvrir?

La mise en scène est somptueuse, sans grand travelling ni virtuosité esthétique. Elle est centré sur les personnages et contribue fortement à l'ambiance, en se servant à profusion de la route et des passages de voitures qui sont autant de "claques" visuels que coups violents au son. Du très bon travail.

Avec ce film une grande réalisatrice est née.