Les critiques de Pandora ont toujours été très partagées entre admiration et rejet. J’ai toutefois un peu de mal à concevoir ce que la question de la crédibilité vient faire quand on regarde un conte… S’étonne-ton que les personnages en soient des archétypes ? Se demande-t-on s’il est réaliste qu’une reine se transforme en sorcière, la sorcière en dragon, qu’elle endorme la princesse pendant cent ans avant d’être éveillée par le baiser d’un prince ?
Et puis, une fossilisation ? On peut la constater devant un dogme religieux autant immuable qu’irrationnel perdurant sur des siècles avec ses rigidités, ses contradictions et ses intolérances d’un autre âge, incapable d’adapter son discours à un monde qui change. Mais à l’inverse, quand des mythes et légendes (qui ne sont nullement des dogmes) précédemment sans lien (tels Pandora et le Hollandais volant) évoluent l’un vers l’autre et s’adaptent à un nouveau contexte historique qui n’était pas le leur, croisant au passage d’autres références de diverses cultures, on assiste à une vie de l’esprit. Qui plait ou déplait, que l’on est libre de trouver, selon son goût, sa sensibilité et ses propres références, inspirante, kitsch ou inepte, mais justement pas fossilisée.
Disons sans ambages que James Mason est nettement plus présentable ; que les soupirants de Pandora ne sont pas non plus négligeables, qu'ils soient le poète suicidé par désespoir Reggie Demarest (Marius Goring) ou le champion automobile Stephen Cameron (Nigel Patrick) ou même l'ombrageux torero Juan Montalvo (Mario Cabré). Mais toutes ces personnalités manquent largement de substance et d'épaisseur. Pandora/Gardner n'a pas vraiment besoin d'irradier cette personnalité : par son animale fascinante beauté, elle n'a aucun besoin de se mettre plus avant en exposition ; le plus bel animal du monde suffit à fasciner les désirs.
Mais les soupirants de la panthère ont bien peu de structure, bien peu d'intérêt : des histrions assez insignifiants (le poète alcoolisé et plutôt ridicule, le coureur automobile puéril) et le regard sombre du Hollandais volant/Mason à qui, brusquement, violemment, Pandora déclare sa flamme…Allez, avouons-le : le scénario de Pandora est d'une insigne bêtise ; on ne croit pas une seconde à l'histoire, alors que dans L'aventure de Mme Muir on pouvait, grâce à Mankiewicz, suivre Gene Tierney jusqu'au bout de son fantasme et on parvenait à entrer dans sa rêverie. C'est tout plein de jolies scènes, plein de belles images, mais c'est bien trop pictural pour être vrai.
Et lorsque le cinéma se fossilise de cette façon, on le regarde sans antipathie, mais sans enthousiasme non plus.
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