La mort et le soleil sont les deux choses que l'on ne peut regarder en face. Et quand une tragédienne se met à vouloir démontrer le contraire à propos de la mort, il est à parier qu'on va vite tomber dans l'excessif. Le très excessif ! Et le muret est très fin qui sépare l'excessif du Grand Guignol…

Qui meurt ? la femme ou la tragédienne ? Les deux mon capitaine . Pourquoi cette volonté de ne pas encombrer la vie des gens aimés et encore valides ? Surtout pour, à la toute fin, se donner en un spectacle qui frise et le ridicule et l'impudeur la plus grotesque. Voilà ce que c'est que de mettre sa vie en scène en permanence : même la mort, aussi injuste soit-elle sur une si belle femme, devient carnavalesque. La mort revêt pour tous des aspects différents, d'injustice, d' iniquité, de cruauté. Mais personne est obligé de mourir sur scène comme Molière. Jeanne Balibar donne ses tripes à la vie, à la scène, à la mort. Elle en fait beaucoup. Même Antigone n'en demandait pas tant ! Quant à la mort, elle fait son bonhomme de chemin, se foutant bien du ramage et du plumage de la belle comédienne. Les grands brassages d'air et les phrases ampoulées envoyées aux enfants du paradis n'y changeront rien. Malgré la performance, le combat était perdu d'avance. Les dés inexorablement pipés. Le talent de l'actrice, apprécié ou pas, inéluctablement voué aux ténèbres..

Elle mourra. Belle. Très belle. Mais elle mourra. La mort n'a pas d'âge qui s'attaque à ceux qui en ont un à peine entamé. Et viendra alors et enfin cette discrétion trop tardive et ce silence émouvant qui accompagnera une beauté enfuie… Dans l'ordre des choses, silencieuse et résignée, devant Dame plus noire et, hélas, bien plus immortelle..