Je suis étonné de ne pas trouver d'autres commentaires sur ce magnifique film français, transposé d'un fait divers dont on a amplifié (mais pas trahi) les données. Quoique réaliste, une fable morale bien de notre temps. François Cluzet est sensationnel dans un rôle d'escroc qui réussit à être à cent lieues des "escrocs de cinéma" : hésitant, empêtré, peu loquace… qui pourrait croire qu'un type avec de telles caractéristiques est en train de vous entuber ? Et pourtant…
Curieusement, ceux qui ont vu Il bidone ou Le général della Rovere se retrouveront en terrain connu. Évidemment pas au sens d'égaler ces grands classiques, mais parce que le parcours moral du personnage est comparable.
Emmanuelle Devos et Gérard Depardieu apportent un soutien plus qu'honorable a l'entreprise.
Et par ailleurs, ce film m'a donné une folle envie de voir enfin l'invisible Empreinte des géants de Robert Enrico, car il confirme que l'histoire de la construction d'une autoroute peut être un sujet spectaculaire et même passionnant.
Ce qui est bien saisi dans A l'origine c'est l'ambiance d'une petite ville de province en déprime. On est par moment presque dans le cinéma vérité, tant les personnages sont réalistes. Le sujet est traité de façon glaciale et en dehors de la filouterie en cours, le spectateur à plus l'impression d'assister à un film social, plutôt qu'à un film d'arnaque de haute volée.
Ce qui est magnifique ce sont les plans tristes, d'une région triste. Ah le nord de A l'origine aura de quoi terroriser les plus frileux, ce qui n'était certainement pas le cas de la pantalonnade de Bienvenue chez les Ch'tis.
A l'origine c'est la qualité française assurée. On avait déjà gouté ce genre de tristesse insondable dans d'autres réussites antérieures. Dans le même genre L'adversaire n'était pas mal non plus.
Cette ambiance pluvieuse, ces gouts monotones rappelleront au cinéphile l'atmosphère des Duvivier et des Carné de la belle époque. Et puis en effet qui pourrait croire qu'un type avec de telles caractéristiques est en train de vous entuber ? Dans ce rôle là François Cluzet est magnifique…
Je partage tout à fait les points de vue exprimés ci-dessus : c'est prenant, intéressant, véridique et surtout vraisemblable, même si – paradoxalement – la gageure est réelle de représenter au cinéma un fait divers qui s'est réellement passé.
Distribution impeccable, images désespérantes d'un Nord qui n'en finit pas de se relever, avec des gens très braves et très courageux. Frétyl a raison de souligner combien, après la pantalonnade ridicule et offensante de Bienvenue chez les Ch'tis, un film comme A l'origine représente bien mieux les formidables réserves de courage et de force de vivre d'un pays meurtri, mais loin d'être abattu.
Et je rejoins Arca, après avoir revu il y a peu Les grandes gueules de Robert Enrico, de découvrir L'empreinte des géants : il y a des sujets en béton armé (hihi !) à réaliser sur ces trucs titanesques… Tiens, je parie qu'on aurait pu faire un truc très excitant en prenant comme toile de fond la construction du viaduc de Millau…
Excellent véhicule aussi pour faire admettre à des Québécois qui ne jurent que par les films américains qu'un bon film français peut aussi les coller à leur siège. Au moment du superbe et dérisoire finale, mes deux compères d'abord réticents étaient étreints par l'émotion, grosse boule dans la gorge et tout. A-ha ! Je les ai bien eus ! À ce deuxième visionnement, je n'ai pu m'empêcher de faire le rapprochement entre l'escroc magistralement campé par Cluzet et certains personnages de Pierre Boulle "pris à leur propre jeu", tel le douteux héros des Vertus de l'enfer, voire même le colonel Nicholson…
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