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Sujet : Finesse et humour


De dumbledore, le 13 avril 2004 à 10:19
Note du film : 6/6

Des films de Billy Wilder, Sabrina est un des plus étranges. Tout d’abord parce que le plus sauvage des réalisateurs hollywoodiens reprend la structuration très classique de la comédie américaine : Sabrina, fille du chauffeur de la famille Larrabee, aime David Larrabee, homme à femmes qui doit se marier pour apporter un gros contrat dans la famille. David tombe sous le charme de Sabrina et Linus Larrabee (le frère de David) se dévoue pour distraire et écarter Sabrina de David. Bien évidemment, Sabrina et Linus tomberont amoureux l’un de l’autre. Tout est ici classique : le trio amoureux, l’amitié qui se transforme en amour, le scénario de Cendrillon dans lequel la pauvre épouse le prince.

Seulement, tout en respectant le genre et la structure de la comédie romantique, Billy Wilder pervertit en douce les codes. C’est le cas notamment de Humphrey Bogart. Il est certes sublime, mais il sort de son rôle habituel d’acteur romantique. De plus, il joue le personnage sans aucun romantisme, sans aucun sentiment. Il est froid du début à la fin du film, et finalement à aucun moment on ne sent qu’il tombe amoureux de Sabrina. Autrement dit, il fait la tronche. Du coup, le spectateur, qui repère les codes, sent que ceux-ci sont bisautés, pervertis, et se retrouve en pleine et inquiétante étrangeté qui donne toute sa force au film.

Ce jeu de Bogart, faut-il le mettre sur le compte de l’acteur ou du réalisateur ? Sans doute des deux. Le fait est que Cary Grant devait tenir le rôle (ce qui aurait rendu la comédie plus classique) et que Humphrey Bogart est arrivé à la dernière seconde sur le film et qu’il aurait souhaité voir Lauren Bacall remplacer Audrey Hepburn. Dans les deux cas Cary Grant/Audrey Hepburn ou bien Humphrey Bogart/Lauren Bacall, on aurait eu deux films sans grand intérêt… On devine donc mieux pourquoi Humphrey Bogart est si grognon dans le film et on comprend également pourquoi Billy Wilder a laissé faire.

Le film est également une pure merveille de finesse et d’humour. Il est impressionnant de voir comment chaque scène est majorée d’un "truc" de pur humour qui n’est pas là pour faire avancer l’action comique. C’est par exemple un suicide au gaz qui se fait en allumant les 13 voitures de la famille Larrabee, ou bien encore le détail du court de tennis comme lieu de rendez-vous, ou bien le gag des verres savamment mis dans les poches arrières, etc, etc. L’art du détail qui caractérise tant le génie de Billy Wilder en somme…


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De P.M.Jarriq, le 13 avril 2004 à 10:33

C'est vrai qu'on ne se lasse pas de ce film très particulier. Preuve supplémentaire du génie de Wilder, le remake signé Sydney Pollack, où se côtoient le sinistre Harrison Ford et Patrick Bruel, dans un film poussif et sans charme. Quant à la malheureuse qui a succédé à Audrey Hepburn, on peut dire qu'elle est aussi suicidaire que Alec Baldwin quand il a remplacé McQueen dans les remakes de "Guet-apens" ou Brando dans "A streetcar named desire".


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De audrey_hepburn, le 4 septembre 2006 à 17:43
Note du film : 4/6

Assez bien mais beaucoup de lourdeurs on peut tout du moins admirer la pétillante Audrey encore toute jeune.


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De Lux, le 12 février 2007 à 00:29

Je viens de voir le film à l'action christine. Si l'on sourit avec bienveillance pendant l'ensemble du film, si certaines scènes sont vraiment drôles (le patriarche fumant dans le placard ou essayant de mettre une olive dans son cocktail), l'ensemble est assez mineur, au regard de la férocité jouissive des autres comédies de Wilder ("la garçonnière", "Avanti" ou "Embrasse-moi, idiot").

A voir cependant pour la sympathique légèreté et la finesse du film.


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 08:59
Note du film : 6/6

Comme il a été dit dans un message précédent, Wilder revisite le thème de Cendrillon mais d'une Cendrillon sans scrupules, à la vertu fragile et peu regardante des convenances. Cette comédie sentimentale, devenue un classique même si certains n'y voient qu'une bluette pour midinettes percluse d'acné, éreinte au passage les travers de la société américaine avide d'argent et de reconnaissance.

Mais je retiens – ben oui je dois être une vraie midinette – l'émotion qu'il se dégage de cette histoire d'amour universelle, à la fois poignante et drôle, grâce aux acteurs terriblement touchants. Bogart y est tellement romantique (à son corps défendant) avec ses bleus à l'âme, son vieux phonographe, ses goûts de brontosaure préhistorique… Bogart casse son image en s'essayant à la comédie. Et dire qu'il interpréta le rôle de Linus à contrecœur…
A Bogart, comment ne pas associer Audrey Hepburn campant avec volupté et grâce (ah les toilettes de Givenchy !!!!) le rôle de cette petite sainte-n'y-touche arriviste et peu en réussite dans la conception des soufflets, dont le sourire et l'élégance illumine le film.

Finalement, avec des ingrédients traditionnels et simples, Wilder nous concocte une recette dont il a le secret relevée de mille épices et douce au palais comme un bonbon au miel !


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De PM Jarriq, le 16 juin 2008 à 09:04
Note du film : 4/6

Et si vous voulez vous convaincre davantage du talent de Wilder, jetez un coup d'oeil au sinistre remake de Sydney Pollack, avec Julia Ormond et Harrison Ford… Effectivement, il paraît soudain bien meilleur, le film de '54 !


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 09:08
Note du film : 6/6

Justement, je n'ai jamais eu le courage, au vu des critiques, de regarder cet "indigeste remake" ! Lorsque que l'on a goûté aux délices d'un soufflet, il est difficile de se contenter d'une omelette trop cuite. Pourtant Harrison Ford, en général, ne manque pas de charme…


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 09:13
Note du film : 6/6

oui mais sans charme, la magie n'opère pas ! Le charme est un des ingrédients indispensables dans la réussite d'un soufflet… euh pardon, dans la réussite d'un film, voulais-je dire.


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De PM Jarriq, le 16 juin 2008 à 09:29
Note du film : 4/6

Ceci dit, et bien qu'adorant Bogart, je n'ai jamais trouvé qu'il était l'interprète rêvé du rôle de Linus dans Sabrina. Un Cary Grant ou même un Gary Cooper auraient été bien plus justes, et auraient mieux aidé à faire avaler la différence d'âge.


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De vincentp, le 16 juin 2008 à 11:45
Note du film : 5/6

Bogart est en effet un peu paumé dans ce film, involontairement de sa part (volontairement de la part du réalisateur ?), mais cela colle bien au personnage de cette histoire.


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 12:52
Note du film : 6/6

Bogart ne dépareille absolument pas au casting, il apporte au contraire une touche de "masculinité" à son personnage. Seule la différence d'âge (30 ans quasiment) entre Audrey Hepburn et Bogart peut amener des bémols.


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 13:07
Note du film : 6/6

Exact. Voilà qui efface donc ce léger bémol. Il est vrai que la passion n'a pas d'âge et ses voies impénétrables!


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De PM Jarriq, le 16 juin 2008 à 13:36
Note du film : 4/6

A mon sens, l'incongruité de Bogart dans Sabrina ne tient pas qu'à son âge, mais à sa personnalité. Connu pour son humour sarcastique, sa lucidité teintée d'amertume, l'acteur joue ici un business man coincé et sans humour, pas spécialement "viril", portant un ridicule noeud-pap, et il semble complètement éteint. Le vrai Bogart, il est dans Casablanca ou African Queen, pas vraiment dans Sabrina.


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De droudrou, le 16 juin 2008 à 13:53
Note du film : 3/6

Il y avait aussi au générique William Holden en frère (si mes souvenirs sont exacts) de Humphrey Bogart et qui, dans le film, créait un contraste certain en termes de personnages. Ne se centrer que sur le personnage de Humphrey Bogart n'est peut-être pas suffisant car, en plus, au niveau spectateur, on attendait plus une idylle entre miss Hepburn et Holden…


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 14:36
Note du film : 6/6

Bogart n'a pas à pâlir de sa prestation et suscite la sympathie du spectateur en raison justement de ce rôle peu en rapport avec ses interprétations précédentes. Ici, on ne retrouve ni l'insolence, ni la dérision, ni la désinvolture acerbe, ni sa séduction due à son "sourire carnassier" qui étaient la marque de fabrique du Bogart des classiques évoqués ci-avant comme Casablanca, Le Port de l'angoisse, Le Grand Sommeil ou L'Odyssée de l'African Queen.


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De Sophie75, le 16 juin 2008 à 15:15
Note du film : 6/6

En fait, je voulais parler du mythe Bogart, celui reconnaissable à sa dégaine inimitable, son irrévérence bougonne, les traits tirés de son visage, son imperméable et son feutre à la Marlowe, sa sensibilité caché par un faux dédain, son attitude oscillant entre sentiment et cinisme, etc. Il ne fallait a-b-s-o-l-u-m-e-n-t pas voir une critique sur ses aptitudes à composer, mais je voulais juste souligner le fait que Bogart avait peu l'occasion de jouer la comédie, d'où cette impression étrange de (re)découvrir une facette de cet acteur.


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De Impétueux, le 18 février 2019 à 18:30
Note du film : 4/6

Je ne suis pas certain que si le générique du film ne m'avait séduit, grâce aux noms révérés d'Audrey Hepburn et d'Humphrey Bogart (et, dans une moindre mesure celui de William Holden) j'aurais regardé avec un préjugé favorable Sabrina. Je ne suis pas certain non plus que, sans eux, je n'aurais pas trouvé bien banale cette histoire au dénouement archi-prévisible, malgré ses assez habiles péripéties qui sentent néanmoins beaucoup le théâtre (et de fait le film est tiré d'une pièce d'un certain Samuel A. Taylor).

Il est vrai que je n'ai pas pour le réalisateur, Billy Wilder, une passion dévorante, lui reconnaissant des réussites magnifiques, en premier lieu Boulevard du crépuscule, et aussi La scandaleuse de Berlin, mais peinant à partager l'enthousiasme général sur Certains l'aiment chaud ou La vie privée de Sherlock Holmes. Disons alors que Sabrina est un film extrêmement plaisant quoiqu'il soit un peu trop long (113 minutes) et que – sentant le théâtre, ma vieille aversion – il multiplie les invraisemblances et les scènes à faire.

Ce qu'il y a de bien agréable, outre la grâce absolue, l'élégance, le charme, le brio d'Audrey Hepburn, qui n'a jamais été médiocre, ni même moyenne et la carrure constante d'Humphrey Bogart, c'est le léger parfum d'immoralisme qui teinte assez subtilement l'histoire. La richissime famille Larrabee règne sur un empire industriel d'une ampleur stupéfiante et vit, dans une immense propriété de Long Island, sur un pied considérable, avec une nuée de serviteurs stylés. Parmi lesquels le chauffeur Thomas Fairchild (John Williams, épatant), dont la fille unique Sabrina (Hepburn, donc) est amoureuse depuis toujours, d'un amour de tête de petite fille, de David Larrabee (William Holden), charmant viveur dépensier et inconstant, tout l'inverse de son aîné Linus (Humphrey Bogart), homme d'affaires sévère uniquement préoccupé de l'extension infinie de la richesse et de la puissance familiales.

On devine donc aisément que malgré la différence d'âge (tout de même un peu trop forte : Bogart avait 30 ans de plus qu'Hepburn) et de condition, l'austère businessman et la ravissante demoiselle se retrouveront sur le pont d'un paquebot qui cingle vers l'Europe et vers Paris, continent de la liberté, ville de l'amour, où la jeune fille a appris un peu auparavant, sous la férule d'un maître-coq un peu… caricatural, à faire bouillir l'eau, casser les œufs et confectionner les soufflés.

Deux heures pour un propos aussi mince, on en conviendra, c'est beaucoup. On doit donc accumuler les péripéties et les incidentes. David/Holden, qui tombe amoureux comme on change de chemise, va-t-il, entraîné par sa pente naturelle, pousser Sabrina à l'épouser – pour, certainement, s'en désintéresser quelques semaines après l'hyménée – ou, comme le souhaite la famille et surtout son frère Linus, allier les affaires Larrabee aux affaires Tyson, riche planteur de cannes à sucre dont le suc permettra l'élaboration d'une matière plastique résistante et inaltérable ?

Nous sommes aux États-Unis en 1954 ; autant dire qu'il ne serait pas concevable de ne pas dresser une apologie de l'expansion économique et du capitalisme industriel. Amours et dollars, en quelque sorte.

Un sujet d'agacement, bien personnel : l'omniprésence de l'affreuse rengaine La vie en rose. Déjà que je ne supporte pas la voix agressive d'Édith Piaf et sa poésie pour cornets de dragées, mais en plus, c'est devenu la rengaine emblématique du malencontreux quinquennat de François Hollande après que sa gourgandine d'alors, Valérie Trierweiller l'a entraîné dans un pas de danse, à Tulle, lors de sa ridicule victoire de 2012. Entendre cette horreur tout au long de Sabrina a fait baisser ma note d'un point. Heureusement le talent d'Hubert de Givenchy qui habille magnifiquement Audrey Hepburn me l'a fait rehausser d'un autre. Il y a une morale, n'est-ce pas ?


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