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Forum : Le Dernier roi d'Ecosse

Sujet : Bonne idée


De PM Jarriq, le 7 avril 2007 à 09:13
Note du film : 4/6

Bonne idée que d'immiscer un personnage fictif dans des faits historiques, et créer un thriller d'autant plus crédible, qu'il est baigné dans un environnement quasi documentaire. Le scénario est adroitement agencé, faisant monter le suspense et l'angoisse, au fur et à mesure qu'on découvre les aspects monstrueux d'Amin, qu'on ne voyait au début – comme le jeune médecin – que comme un géant débonnaire et rigolard. Si Whitaker fait une belle performance dans le rôle du "général", force est de reconnaître, qu'il ne possède pas la puissance brute, le physique compact, la morgue effrayante de son modèle (il suffit de voir les images du "vrai" Amin dans le générique-fin, pour voir le fossé qui existe entre les deux hommes). Il donne une interprétation subtile et cérébrale d'Amin Dada, mais n'arrive jamais à se fondre tout à fait dans le personnage. Même défaut que Hoffman incarnant Capote (qui lui valut tout de même un Oscar, à l'instar de Whitaker pour ce film !), et qu'a su éviter Toby Jones dans Infamous. Yaphet Kotto s'était montré moins fin, mais infiniment plus convaincant dans le même rôle dans le téléfilm "Raid sur Entebbe", datant de 30 ans. Néanmoins, The last king of Scotland fonctionne parfaitement, soutenu par une réalisation volontairement chaotique (flous répétés, mouvements de caméra hasardeux) et une bonne direction d'acteurs. A noter les apparitions d'une Gillian Anderson amaigrie et blonde, quasi méconnaissable, en médecin de brousse.


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De verdun, le 26 novembre 2007 à 20:09
Note du film : 5/6

5/6 ?? Disons 4,5 sur 6…

Le dernier roi d'Ecosse est un très bon film qui constitue le meilleur du cinéma américain actuel.

On se laisse, comme vous l'avez dit cher Jarriq, parfaitement prendre par ce suspens qui monte crescendo. Cette tension est en adéquation avec la paranoïa sanglante et gradissante qui sévissait en Ouganda de 1971 à 1979. La description de l'Afrique est convaincante et dépourvue de certains clichés vus dans d'autres films hollywoodiens. On apprécie de voir la Fox s'intéresser en 2007 à un sujet aussi ambitieux et adulte. Forest Whitaker donne une prestation des plus convaincantes, sachant qu'il n'est jamais aisé de jouer un personnage célèbre récent, qui plus est immortalisé comme le fut Idi Amin Dada dans le fameux documentaire de Barbet Schroeder.

Cependant, deux réserves m'empêchent de donner un 6/6 à ce beau thriller. En premier lieu, le parti pris qui consiste à voir l'odyssée sangante d'Amin Dada à travers les yeux d'un jeune médecin écossais plutôt naïf et inconscient explique la tension du film : les aventures de ce "Candide" voltairien plongé en Afrique noire ne manquent pas d'intérêt, c'est le moins qu'on puisse dire. Surtout que James Mac Avoy donne une prestation plus qu'honorable face au numéro de Whitaker Mais on aurait aimé une vision un peu moins occidentale de ce continent et de son histoire, un récit qui explore un peu plus la psychologie africaine.

Surtout, j'ai été gêné par les dernières minutes du film, où le film devient invraisemblable. Le médecin subit une torture affreuse et profite du fameux raid d'Entebbe pour s'échapper. A ce moment précis, le cinéaste (au passé de documentariste confirmé), qui avait évité le sensationnalisme et les atrocités se plante un peu et plonge dans la facilité dramaturgique et les erreurs historiques : quel dommage !!

Malgré ces défauts, Le dernier roi d'Ecosse est une oeuvre rare et captivante.

A présent, quand verra t-on une fiction française sur Bokassa, ce dictateur lui aussi sanglant et grotesque, qui appelait le général De Gaulle "papa" ??


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De vincentp, le 11 septembre 2008 à 22:53
Note du film : 4/6

Brave type, d'origine modeste, Dada, personnage complexe et tourmenté, accumula aux commandes du pouvoir en Ouganda, les bévues, placé dans un fauteuil bien trop grand pour lui, ignorant tout de la façon de gouverner un pays. Une image symbolique du film : Dada et ses lieutenants sur un tank. Ses compétences s'arrêtaient là. Porté au pouvoir par les puissances occidentales qui voulaient contrecarrer l'influence sociétique dans la région, Dada tenta d'imposer à son pays un modèle déphasé de développement économique et voué à l'avance à l'échec. Quelques coups d'éclats au départ, puis des situations décalées (tels ici ces symboles de la réussite matérielle occidentale dans les rues de Kampala), et enfin une répression féroce et un chaos indescriptible.

C'est un très bon film, assez subtil par son propos, et qui ne rate pas sa cible. La folie de Dada est portée par l'interprête, et ses regards hagards. Elle aurait pu l'être aussi peut-être davantage par la mise en scène. Nb : l'histoire rappelle celle de Apocalypse now, avec ses deux personnages à psychologie tranchée qui finissent par s'affronter au seuil de la folie humaine, dans un contexte politique de conflit planétaire.


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De vincentp, le 17 septembre 2008 à 12:10
Note du film : 4/6

Un supplément du dvd (utilisant des images du documentaire légendaire de Barbet Schroeder) rappelle quelques réalités terrifiantes : Dada instaura en Ouganda un régime paranoïaque qui mena une guerre sans merci contre les opposants ou supposés tels. 300 000 morts en huit ans dont des femmes et enfants massacrés, découpés, mangés, jetés aux crocodiles, le tout dans un petit pays guère peuplé. Il tua de ses propres mains un de ses fils qu'il mangea et une de ses femmes qu'il découpa en morceaux avant de la faire recoudre à l'envers. A la tête de son service d'ordre, des ignares sanguinaires pratiquant une extermination ethnique. Et le grotesque d'un dictateur qui faisait défiler son armée vêtue de kilts écossais pour narguer son ex-allié britannique.


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De PM Jarriq, le 17 septembre 2008 à 12:57
Note du film : 4/6

C'est bien cet aspect "monstrueux" qui fait défaut à l'interprétation de Whitaker, expert en ambiguïté, mais incapable de retranscrire la force brute, la bestialité. Un acteur comme Agbaje, avait réussi à exprimer cette sauvagerie mêlée à un charisme indéniable, en jouant un des taulards de Oz.

Dans le docu, il y a un plan où Amin demande à un journaliste anglais s'il n'a pas peur de se retrouver en face de lui… Le regard du dictateur à ce moment-là : à glacer le sang ! Et ce n'est pas du cinéma


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De vincentp, le 17 septembre 2008 à 13:46
Note du film : 4/6

Je suis d'accord avec PM Jarriq. Il y a un décallage entre l'interprétation de Whitaker et le jeu naturel de Amin Dada, que le supplément du dvd (avec des gestes et des regards du véritable Amin) nous montre assez différent : une part de bonhommie, et une autre glaciale (probablement des troubles schyzophréniques et paranoïaques latents que l'exercice du pouvoir accentue). Ce long-métrage montre aussi toute la puissance du documentaire parfois par rapport à une reconstitution.


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De Impétueux, le 24 avril 2023 à 18:42
Note du film : 4/6

Riche nomenclature des dictateurs africains sanguinaires d'après l'indépendance ! Dictateurs qui se maintenaient généralement au pouvoir grâce aux jeux complexes des Puissances mondiales, toutes souhaitant préserver leurs intérêts économiques ou géopolitiques ou en acquérir au détriment des autres. Puis la folie d'avoir conservé sur ce continent où l'allégeance n'est pas nationale mais ethnique le corset des frontières coloniales, ce qui entraîne à la fois conflits de territoires et favoritismes effrontés. Comme l'écrivait dès 1962 le sociologue de gauche René Dumont (qui fut le premier candidat écologiste à une élection présidentielle, en 1974), L'Afrique noire est mal partie. Cinquante ans plus tard, elle n'est toujours pas arrivée, d'ailleurs.

Dans la longue, épouvantable, interminée nomenclature de ces dictateurs d'Afrique, Idi Amine Dada occupe une place excellente. Une longue liste, dites-vous ? Bien oui ; et comment ! Mengistu Hailé Mariam en Éthiopie (77-91), Francisco Macias Nguéma en Guinée équatoriale (68-79), Jean-Bedel Bokassa en Centrafrique (66-79), Robert Mugabe au Zimbabwe (87-2017) et bien d'autres ; j'ai la flemme de chercher mais je sais que la dictature, l'horreur, la folie font partie de l'histoire africaine. Remarquez, en Asie, Mao Tsé-toung ou Pol Pot ne font pas mauvaise figure et, chez nous les regrettés Adolf Hitler et Josef Staline tiennent aussi fièrement leur partie. Sans oublier que Robespierre, Marat, Danton ne peuvent être dédaignés.

L'horreur est partout et de tout temps ; à quoi bon réitérer des évidences, d'ailleurs ? On sait bien que la vie des hommes est fabriquée avec des tueries abominables et que des fous furieux sont à la tête d'États parfaitement honorables. Ne faisons pas mine d'être étonnés.

Le parti-pris du Dernier roi d'Écosse, film de Kevin Macdonald adapté d'un roman de Giles Foden est de mélanger habilement des événements réels à une complète fiction. La personnalité étonnante du chef d'État ougandais avait déjà fait l'objet en 1974 de Général Idi Amin Dada, un reportage de Barbet Schroeder où le dictateur jouait son propre rôle et s'exhibait avec une grande complaisance (comme du reste le fera plus tard, en 2007, Jacques Vergès dans L'avocat de la terreur du même Schroeder). La fiction consiste à introduire un personnage inventé, le docteur Nicholas Garrigan (James McAvoy) qui est venu chercher l'aventure dans un dispensaire africain et qui, par une suite de hasards singuliers, est pris en affection par Amine qui en fait son médecin personnel et son proche conseiller.

La finesse du film est de montrer que les yeux de Nicholas voient d'abord à peu près ce que les Ougandais voyaient au début de la présidence du dictateur, lorsqu'à la suite d'un coup d'État, en janvier 1971, il a chassé le président Milton Obote qui avait des sympathies pour le socialisme soviétique. Bien accueilli par la population (et surtout par son ethnie nubienne), chaleureux, beau parleur, charismatique, ce géant (1,98 m., 126 kgs) a le sens du contact, de la répartie, de l'humour. Il paraît dégager une sympathie immédiate. Et le jeune médecin le ressent de cette façon, emporté par le torrent vital, l'énergie, le grand rire du Général.

Et quand on a ce genre d'amis, qu'on admire et qui vous choie on n'ouvre pas vite les yeux ; on ne veut pas se rendre compte que la population commence à tirer la langue, que les décisions économiques et politiques prises sont erratiques, que des opposants disparaissent mystérieusement, qu'il y a des cadavres dans les fossés de Kampala. C'est comme ça : on n'a pas vraiment envie de bousculer sa jolie vie en prenant conscience que son pote et celui qui vous fait vivre dans le luxe, la facilité, l'euphorie est en fait un tueur sanguinaire. On peut comprendre. On peut, sans doute.

Tout cela se passe au milieu des circonvolutions que mènent les Puissances au milieu d'un État qui n'existe pas et de populations à la dérive. Des moments où le fardeau que portait l'Occident s'effiloche et où les derniers défenseurs de cet équilibre s'effacent. Approché par Nigel Stone (Simon McBurney), une sorte d'agent secret britannique cynique et réaliste, Nicholas ne comprend pas qu'il marche vers le précipice.

Le film s'achève lors de l'affaire d'Entebbe, le 27 juin 1976 et du détournement par les Palestiniens et les Allemands communistes de la Rote Armée Fraktion d'un avion qui reliait Israël à Paris. Affaire bien et vigoureusement réglée par le Mossad, qui n'a pas fait de quartier (voir Raid sur Entebbe d'Irvin Keshner de 1976).

Un film bien intéressant en tout cas, qui montre et démontre que les pires canailles ont aussi leurs séduisants côtés. Quelle révélation, n'est-ce pas ?


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