Le film Judex de Franju
est un chef d'oeuvre de poésie où se mêlent mystère, fantastique, et burlesque.
L'atmosphère est assez onirique et magique, mais tout est bien réel…Cette oeuvre rend hommage aux films feuilletonnesques que réalisait Louis Feuillade, avec ses intrigues, ses scènes d'actions à rebondissements et avec ses enchainements narratifs accélérés. Ce pourrait être qualifié d'oeuvre surréaliste avec son ambiance de fantastique nocturne et urbaine particulière.
Il doit absolumment être redécouvert. C'est un film rare.
Sans l'avoir jamais vu, je vote de confiance pour ce Judex, pour la double raison que Georges Franju
est un grand réalisateur méconnu, malgré le succès mérité des Yeux sans visage
et que l'hommage à Louis Feuillade
et aux histoires extraordinaires et vénéneuses du début du siècle, où rodent Musidora
et Fantomas, avec des intrigues cruelles et compliquées le justifie !
Il me semble me souvenir d'avoir vu une photo où Francine Bergé – qui doit jouer le rôle d'une épouvantable criminelle – est costumée, pour accomplir un de ses multiples méfaits en sœur de Saint-Vincent de Paul, à l'immense cornette…
Est-ce bien cela ?
Par honnêteté, j'ai pu exagérer sur la qualité de ce film pour avoir l'espoir de le voir éditer en DVD. Car il est dommage qu'on ne puisse pas le revoir tant il est rare. Il mérite vraiment d'être redécouvert sur certains points.
Je reviens là-dessus. Je suis surtout marqué par cette économie de moyens pour créer l'effet poétique. On est le plus possible à la recherche de l'efficacité des moyens déployés en respectant tous les processus cinématographiques nécessaires à celà. Je me répète: il ne s'agit pas de faire du spectacle spectaculaire où de grands moyens seraient indispensables. Dans JUDEX, le but n'est pas l'effet spectaculaire mais l'effet poétique. Cela n'implique pas des moyens forcément onéreux et faramineux, mais cela nécessite une précision et une réalisation soignée et appliquée avec l'usage de moyens et d'artifices bien spécifiques et judicieusement choisis. Il ne s'agit pas d'avoir beaucoup de moyens mais juste d'avoir les moyens nécessaires et indispensables. D'où cette réalisation minimaliste, économe et petit en moyens, mais d'une très grande précision et d'une grande justesse, avec au bout un maximum d'effet poétique produit.
Franju a retenu l'Essentiel poétique.
Avec davantage de moyens matériels visibles sur l'écran, aurait-on pu créer davantage d'effet poétique? Cela n'est pas sûr. Cela aurait chargé le processus, l'aurait encombré et alourdit. On aurait perdu en précision et en justesse. Cette précision et cette justesse si nécessaires et si indispensable à la réalisation de l'effet poétique recherché.
J'évoquai l'enchantement, forcément provoqué par la réalisation, avec toute cette galerie de personnages grotesques, pittoresques ou intrigants évoluant dans toutes ces situations insolites et incongrus. D'où cette farandole déguisée et ce grand guignol, où l'on voit tour à tour JUDEX vêtu de son costume d'aigle dans le bal masqué et Francine Bergé travestie en bonne sœur à cornette pour commettre ses crimes.
Ce qui m'a marqué c'est que c'est vraiment un hommage aux films de Feuillade sans que cela en soit une version plus contemporaine, plus dynamique et plus sensationnaliste. Ce qui aurait vieilli à son tour également. On est loin de ça.
Franju retient vraiment la poétique de l'ambiance fantastique et nocturne de la ville dans les films de Feuillade, ainsi que la poétique de l'action et du mouvement. Ce qui ne veut pas forcément dire que cela aille plus vite et plus fort que dans les films de Feuillade ou que dans les romans de Souvestre et Allain, les auteurs de Fantomas.
Franju, comme dans Les yeux sans visage,
en poète-cinéaste-artisan, prend soin de mettre en place tous les processus et les mécanismes permettant de produire l'effet poétique et de faire jaillir l'instant insolite, qui retentit par la suite dans l'espace et dans le temps.(comme dans la scène finale dans Les yeux sans visage
où Edith Scob
se perd dans la forêt la nuit).
La réalisation est minimaliste, on est à la limite d'un vieux téléfilm de l'ORTF des années 60. Mais tous les moyens nécessaires sont bien présents. C'est en cela qu\il me fait penser à une œuvre surréaliste, comme celle de Magritte. Il y a bien là une économie de moyens parfaitement agencés pour créer l'effet poétique insolite.
Et les procédés minimalistes rendent plus efficaces les moyens pour produire l'effet poétique.
Rendre hommage à Feuillade ce n'était pas rendre un hommage scrupuleux, plein de révérence, où cela aurait pu tourner à le singer de façon grossière. Franju
ose une approche pleine de décalage et de grotesque.
Cela ne tourne pas à la parodie vulgaire, c'est du burlesque. ce n\est pas de la distance plein de détachement et de moquerie. Franju observe simplement une juste distance, c'est la distance que doit observer le regard du cinéaste-poète sur les choses. Alors le charme opère, on rentre dans un enchantement envoûtant..
Avis a tout le monde ici !!!
Judex et Nuits Rouges sortent en dvd le 7 Novembre, dans la collection des Cahiers du Cinéma, on peut donc s'attendre a une belle édition comme ils ont l'habitude, j'ai trouvé cette info sur ce site
www.whynotproductions.fr
Je crois qu'on peux le commander faut vérifier.
Voilà un automne qui commence avec d'excellentes nouvelles ! A force de nous entendre grincher, les éditeurs vont peut-être se mettre à sortir de nombreuses pépites !
Pour qui a gardé un soupçon d'esprit d'enfance, et qui est prêt à marcher dans une belle aventure, terrifiante et onirique tout à la fois, voilà un film qui nous replonge aux temps où les populations tout entières, du haut en bas de l'échelle sociale, guettaient, chaque jour ou chaque semaine, la parution de la suite du feuilleton qui les avait fait haleter…
Judex est un beau, un magnifique hommage à l'enfance du cinéma, et davantage encore, au roman d'aventures, qui ne se soucie ni de psychologie, ni de vraisemblance, mais qui met en scène toutes les terreurs et les bonheurs du roman populaire : personnages chevaleresques ou monstrueux, déguisements inouïs, passages secrets, coups de théâtre, révélations singulières, coups de poignards, poisons et cataleptiques, masques et grimages, lourds passés dévoilés, triomphes du héros et de l'héroïne.
Judex, il faut bien le dire, est l'envers de Fantômas,
et un envers tout de même moins grandiose, parce que le Bien est toujours moins spectaculaire que le Mal ; d'ailleurs, dans le film de Franju,
le personnage éclatant n'est pas le Justicier, joué sans grand talent par un prestidigitateur au physique avantageux, alors célèbre, Channing Pollock, mais bien la perverse et maléfique Diana Monti, jouée avec un talent fou par la superbe Francine Bergé,
au visage si inquiétant. C'est elle qui forge le film, le structure et le magnifie, qu'elle soit vêtue en stricte institutrice, qu'elle porte la si seyante cornette des Sœurs de la Charité, qu'elle ondoie, telle Musidora
en simple collant noir, qui met en valeur un beau corps souple… C'est elle qui est le Génie du Mal, la Maîtresse de l'Épouvante, la terreur incarnée, qui n'hésite ni à tuer, ni à pervertir…
Bruit, fureur, incohérences, poursuites, séquestrations, meurtres, fuites éperdues, maladresses, coïncidences invraisemblables, tout cela est le lot commun de ces serials qui furent les premières tentatives de récit cinématographique, et que Franju restitue avec un rare bonheur.
J'ai dit combien Francine Bergé dominait la distribution et le propos ; il serait injuste d'oublier une Édith Scob,
diaphane et aérienne, moins poignante, sans doute que dans Les yeux sans visage
mais qui ajoute sa touche d'irréalité onirique, et même, dans un rôle mineur mais intéressant la ravissante Sylva Koscina
ange blanc tout autant que Francine Bergé
est ange noir. En revanche, les hommes ne brillent guère. Outre le bellâtre du rôle-titre, très inférieur à ce que l'on attend de l'implacable Justicier, on note la présence incongrue de Théo Sarapo, dernier amour et mari d'une Édith Piaf
(qui en compta beaucoup), dont on peut supposer qu'il joua un rôle important par roublardise de producteur…
Enfin, Judex est un bien beau film, une réussite impressionnante, marquetée de superbes séquences, telle celle du bal de masques, d'un total onirisme, séquences qui font regretter que Franju
n'ait pu tourner un film, ou une série consacrée au Génie du Crime, au Maître de l'Effroi, au personnage admirable et épouvantable crée par Pierre Souvestre
et Marcel Allain,
au seul et unique Fantômas.
Allongeant son ombre immense
Sur le monde et sur Paris
Quel est ce spectre aux yeux gris
Qui surgit dans le silence ?
Fantômas, serait-ce toi
Qui te dresses sur les toits ?
Si je vous suis bien, Impétueux, pour moi qui n\'ai vu aucun des deux films, c\'est oui à Judex et non à Nuits rouges
?
Sur le plan de l'acquisition, mon cher Arca, votre question n'a pas grand sens (sauf votre respect !) parce que les deux films figurent dans un boîtier unique et qu'acquérir l'un, c'est avoir l'autre !
Cela étant dit (qui n'est pas négligeable), il est bien certain que Judex est infiniment supérieur aux Nuits rouges,
sans pour autant atteindre la grâce terrifiante et poétique des Yeux sans visage
du même Georges Franju.
Il faut, pour le bien apprécier, avoir la nostalgie du Noir et Blanc, n'être pas du tout regardant avec la vraisemblance (délibérément mise de côté) et – ce qui est plus grave – supporter le côté gourmé de Channing Pollock, qui joue le rôle-titre, et les minauderies agaçantes de Jacques Jouanneau
qui interprète le rôle d'un détective privé maladroit et pusillanime.
Mais Judex vaut énormément pour le talent glaçant et maléfique de Francine Bergé
et par d'étranges et merveilleuses scènes, en premier lieu par ce Bal des Oiseaux, dont tous les participants portent un masque, qui est étrange, onirique, enchanté…
Pendant le premier quart d'heure (jusqu'à l'enterrement du banquier Favraux), j'ai cru que j'allais voir un des plus beaux, des plus étranges, des plus poétiques, des plus inquiétants films policiers de l'histoire du cinéma. Malheureusement, c'est à une chute verticale dans le ridicule qu'on assiste avec la suite qui n'est qu'un tissu de niaiseries et des pires conventions feuilletonesques du genre Fantômas ! Quel dommage !
Pires conventions feuilletonesques du genre Fantômas, écrivez vous, Xaintrailles ; je suis sûr que vous faites allusion aux tristes, pitoyables mômeries de André Hunebelle avec les non moins tristes et pitoyables Jean Marais
et Louis de Funès,
et non aux palpitants romans de Marcel Allain
et Pierre Souvestre,
horrifiques et inventifs, qui n'ont jamais été vraiment adaptés au cinéma (j'écris cela sans avoir vu la version de 1947, de Jean Sacha avec Marcel Herrand
: avec un tel acteur, ça pourrait être pas mal du tout…).
Donc, vous n'avez pas été sensible au charme étrange de Judex… Film raté, c'est vrai, mais avec de bien belles séquences, à mes yeux…
Moi qui n'ai jamais vu ce film mais qui en ai beaucoup entendu parler, je croyais que le but avoué de Franju était justement de rendre un hommage ému aux serials évidemment bourrés des pires conventions feuilletonesques du célèbre Louis Feuillade,
notamment. Après tout, le feuilleton est un genre comme un autre…
Les conventions feuilletonesques sont évidemment présentes, omniprésentes dans ce genre de films qu'ils soient de Louis Feuillade ou de Georges Franju,
dans les séries télévisées (Les compagnons de Baal
de Pierre Prévert) et, par nature, dans tous les récits d'Eugène Suë,
de Ponson du Terrail ou de Souvestre
et Allain
!
Mais ces conventions peuvent n'être pas forcément les pires !
Cela étant, je crois que notre différence de vues est sémantique ! Bien sûr qu'il faut avoir le sens et le goût du merveilleux et de l'onirique pour s'intéresser à ce genre ; mais, précisément, ce que l'on doit reprocher aux Fantomas de Hunebelle,
c'est de ne pas respecter les conventions, en introduisant des éléments de lourd comique là où il faut jouer le jeu de l'effroi…
Mais si, mais si : j'ai été très sensible au commencement du film, aux acteurs tous excellents à commencer par le sinistre Michel Vitold, et surtout au début de la soirée mondaine avec l'homme mystérieux à tête de faucon, qui sort des colombes de ses gants, et à la musique belle et inquiétante de Maurice Jarre. Je regrette seulement que l'auteur n'ait pas réussi à se maintenir à ce niveau, et je le regrette énormément, coyez-moi !
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