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Sujet : Chef d'oeuvre absolu !


De vincentp, le 22 janvier 2006 à 12:04
Note du film : Chef-d'Oeuvre

Ozu nous présente dans « Printemps précoce» les grands principes qui doivent régir selon lui la vie en société.

La société, selon Ozu, repose sur plusieurs éléments structurants. Le premier d'entre eux est constitué par le binôme homme-femme, solidifié par les liens du mariage. Autour de celui-ci gravitent des cercles concentriques : les parents, les amis, les collègues de travail. Autre élément structurant : le lien qui unit l'homme à son travail. Le problème est que ces éléments sont susceptibles d'être désintégrés par la nature humaine faite de désirs et de passions. Confronté à une telle situation, l'individu, aidé si nécessaire par le groupe, doit résister, en faisant preuve de courage, d'intégrité, de renonciation ! Ozu nous explique ainsi que quand un couple est menacé de désintégration, les entités qui lui sont proches doivent venir à son secours ! On doit nécessairement modeler son comportement en fonction de son entourage explique un personnage du film !

Le film est admirablement construit (ah, les belles synthèses progressives qui précèdent la conclusion !), le propos parfaitement argumenté. Ozu pratique une rhétorique qui s'exerce sur toute la gamme des sentiments humains. Il montre, démontre, suggère parfois (par exemple, le bruit des enfants que l'on ne voit pas) pour imposer au final, tout en finesse, une morale humaniste qui semble couler de source : respect des autres et intégrité personnelle sont des principes à mettre en œuvre par chacun dans la société.

La conclusion du film impressionne : un plan fixe montre un couple immobile et muet décalé sur la droite du cadre. A cette image se superpose l'image de deux cheminées dans le ciel. Puis filmée en contre-plongée, une seule cheminée, plus massive, dressée vers le ciel. Enfin, comme dans la prisonnière du désert, quelques notes de musique qui concluent le film dans une sorte de battement de cœur extatique.

Un chef-d'œuvre absolu, et sans nul doute aussi un des plus grands films de tous les temps.


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De vincentp, le 12 janvier 2008 à 20:08
Note du film : Chef-d'Oeuvre

A noter que ce film bouleversant et indispensable est diffusé ce dimanche 13 janvier 2008 au cinéma Action École à Paris, dans le cadre d'une rétrospective des oeuvres majeures de Ozu.

Quant au cinéma l'Arlequin, toujours à Paris, dans le cadre du ciné-club animé par Claude-Jean Philippe, il diffuse ce dimanche, à 11 heures, Il était un père de ce même Ozu.

Des initiatives bienvenues qui permettent de faire mieux connaître l’œuvre de cet auteur majeur du cinéma, qui a été ignorée en France jusqu'au début des années 1970.


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De vincentp, le 1er février 2018 à 20:17
Note du film : Chef-d'Oeuvre


Ozu appuyé par son scénariste Kogo Noda réalise Soshun (Printemps précoce), produit par la Shoshiku, sorti en salles au Japon le 29 janvier 1956. Soshun raconte un épisode de la vie de jeunes gens, des cols blancs employés au sein d'une entreprise située à Tokyo, avec un focus sur le couple formé par Ryo Ikebe et Chikage Awashima. Les décors extérieurs sont stylisés (poteaux, cheminées, trains), peu visibles, à l'opposé aux longues déambulations urbaines proposées par Kurosawa (Chien enragé, …). L'essentiel des faits se produit en intérieur (restaurants, domicile, bureau,…). Le tout est filmé en plans fixes, avec les face à face orchestrés par une caméra située en position basse, fixant le narrateur. L'affiche grand format de Marianne de ma jeunesse réalisé par Duvivier en 1955 se situe en arrière-plan, montrant l'intérêt de Ozu pour le cinéma occidental, suggérant que son portrait de la jeunesse teinté de mélancolie ne concerne pas que le cadre japonais.

J'ai découvert ce mardi sur grand écran Phamtom Thread (2017) dernier opus de Paul Thomas Anderson oeuvre centrée sur les difficultés rencontrées par un couple improbable. L'oeuvre américaine contemporaine est de qualité, formellement réussie alors que l'oeuvre japonaise est un chef d'oeuvre absolu, à mon sens le meilleur film réalisé sur le couple, la jeunesse, la société. Ozu, après une maturation artistique de près de trente ans (il a commencé sa carrière en 1927), est en 1956 à son sommet et déroule son savoir-faire comme Roger Federer manie sa raquette en 2018. Rythme, plans, dialogues, direction d'acteur, puissance du propos : tout est parfait, avec l'impression d'un accomplissement artistique total. Soshun dure 144 minutes, nécessite un investissement intellectuel du spectateur, une ouverture d'esprit de sa part. Cet effort est susceptible de le faire avancer dans sa maîtrise des relations humaines, au quotidien, sa compréhension des rouages de la société.


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