__''Il existe trois sortes d'hommes. Les vivants, les morts et les marins__ Platon''

Le film connut bien des difficultés à sortir, le producteur ayant déposé le bilan et le film se retrouvant bloqué en post-production. Tourné en 2001, le film n'est sorti qu'en 2003, pour un succès public et critique qui ne furent pas au rendez-vous.

Pourtant au départ, il y a de bien bons éléments dans ce film. Tout d'abord une histoire très solide et bien construite, celle de trois marins qui se retrouvent bloqués à quai car leur navire a perdu son affréteur. Ces trois marins perdus, interdits par la force des choses de naviguer sombrent peu à peu dans une folie qui risque de les détruire. Ces trois marins représente chacun un stade différent d'espoir. Le capitaine est déjà mort, sans famille (si ce n'est trop loin pour pouvoir réellement exister), sans rêve, rempli de désillusions. Il reste d'ailleurs tout le temps ou presque dans le navire, sauf pour voir quelques prostitués. A l'autre bout, le marin, plein de vie, ne se souciant (un peu trop) de rien, embrassant la vie à chaque instant et affichant un sourire impossible à défaire qui devient vite une injure pour le capitaine. Cette force de vie, cette insouciance lui seront vite insupportables. Entre les deux, le personnage forcément le plus intéressant (car le plus susceptible d'évoluer), celui de Diamantis. Durant tout le film, il pourrait basculer soit vers l'un, soit vers l'autre. Tout dépend de la quête nostalgique de la jeune femme qu'il avait jadis aimé. A la fois cynique, mais actif, c'est un personnage d'une belle profondeur, d'une humanité intéressante.

Derrière cette construction, il y a un maître du polar. Il ne faut pas s'en étonné, car si l'histoire n'a rien du polar (pas de flic, pas d'enquête, pas de flingue), l'ambiance elle est totalement celle du film policier : lourde et tendue. Ce maître, c'est Jean-Claude Izzo à qui on doit de bien belles pages et de bien pauvres adaptation.

La seconde force du film réside dans ces personnages. Le casting masculin est parfait. Bernard Giraudeau vieillit décidemment bien, offrant enfin depuis quelques années une profondeur et une humanité passionnante. Miki Manojlovic abandonne pour l'occasion Emir Kusturica mais nullement son talent pour jouer le capitaine libanais qui sombre dans la folie. Le petit jeune est joué par Sergio Peris-Mencheta qui malheureusement ne convainc par encore forcément dans ce rôle.

Côte femme, on est également bien nanti avec deux personnages construits encore une fois à l'opposé l'un de l'autre. Marie Trintignant qui joue la femme mûre, solide, presque maternelle, et Audrey Tautou qui joue l'inverse, la femme-fille sans vraiment de moral, naïve et profiteuse de la vie.

Que du bon? Non, il y a malheureusement la mise en scène et le montage du film qui ne trouvent pas leurs marques. Le film aurait pu être noir, profond, on sent au contraire que la mise en image est bâtarde, n'osant aucun parti pris, aucun point de vue. Du coup, c'est neutre, distant. Presque une mise en scène de téléfilm TF1 : surtout ne rien oser, ne pas choquer par des choix forts. Bref, c'est la mise en scène qui ne fallait pas pour ce film. Le montage n'aide pas, ne réussissant nullement à rythmer le film qui passe, lentement, quelques fois péniblement (la scène de danse au début). Même la musique est insupportable. Est-ce que Gabriel Yared a été choisi pour ses origines libanaises, comme le capitaine du navire? On l'ignore. Ce que l'on sait c'est qu'on l'a connu mieux inspirer que là. La partition est mièvre, tartinée durant tout le film avec des choix qui sont très souvent des erreurs. Un exemple parmi d'autre : im suffit que Diamantis parle de son enfance pour qu'on est droit à une musique "style grecque". Lourd.

Je l'avais entendu attribué à P. Valery également.

C'est dans quel Platon déjà? Atlantide?