Forum - Reservoir Dogs - La vermine est dans la cale
Accueil
Forum : Reservoir Dogs

Sujet : La vermine est dans la cale


De Impétueux, le 9 novembre 2018 à 15:38
Note du film : 4/6

Je suivrais assez sur ce coup le point de vue de Bertrand Tavernier dans 50 ans de cinéma américain qui, en admirant profondément la maîtrise et la vivacité du film précise toutefois qu'on sort avec un léger malaise, l'impression d'avoir été bluffé par un brillant joueur de poker. Et de fait, le premier film de Quentin Tarantino s'apparente avant tout à un brillant, très brillant exercice de style où un brillant, très brillant jeune réalisateur présente à un jury charmé tout ce qu'il sait et peut faire : audaces de construction, de ruptures rythmiques, d'images violentes, de séquences difficilement soutenables au service d'une conclusion totalement macabre. On applaudit et on dit bien fort Bravo l'artiste !.

Avec la pire mauvaise foi du monde, qu'il me fait rarement peur d'employer, je ne pourrais assurément pas dire que je me suis ennuyé une seule seconde ; et je reconnais bien volontiers aussi que ce qui a pu apparaître comme une complexité de récit est si parfaitement maîtrisé qu'on ne perd jamais le fil et que la structure faite d'allers-retours est assez virtuose. La clarté, dans une histoire complexe, est une gageure difficile à tenir et que Tarantino réussit complétement. En plus, si, finalement, on sait assez peu de ses personnages, de leur passé, de leur environnement, de leur histoire, de leur (éventuel !) environnement familial, ils sont si bien typés qu'on les distingue sans difficulté, ce qui n'est pas si facile, lorsqu'on présente, au fond d'une cave, une bande de rats haineux.

Sans doute le film ne manque-t-il pas d'un parti-pris de sauvagerie débridé qui est un peu trop facile : le découpage au rasoir de l'oreille du malheureux policier Marvin Nash (Kirk Baltz) par le psychopathe sanguinaire Mr. Blonde (Michael Madsen) et son arrosage à l'essence, dont on attend un beau brasier, puis – coup de théâtre ! – le réveil bienvenu et un peu miraculeux de Mr. Orange (Tim Roth) qui abat Mr. Blonde et sauve – très provisoirement – la vie du pauvre flic est une astuce scénaristique assez complaisante. Je ne suis nullement ennemi de la violence brutale et répugnante au cinéma, mais là, elle tient un peu trop de l'esprit de système. Et puis on a vraiment l'impression qu'il n'y a pas la moindre goutte d'humanité chez les malfrats, ce qui schématise le propos. Et enfin – mais cela est peut-être dû à un certain manque de moyens financiers – on a une dimension un peu trop théâtrale, avec plein d'entrées et de sorties qui interviennent avec un mouvement trop horloger.

Cela étant, c'est admirablement interprété et, donc, admirablement dirigé. Les protagonistes portent dans leur regard l'étincelle de folie et d'égoïsme que la logique du scénario leur demande. Les pseudonymes colorés qu'ils portent accentuent évidemment leur distance avec le spectateur en les confinant dans le quasi anonymat. (Pour autant, le procédé n'est pas une innovation de Tarantino : on trouve, ces noms, Blue, Brown (mais aussi Grey et Green) dans un film bien antérieur, Les pirates du métro de Joseph Sargent en 1974 où quatre voyous prennent en otage des voyageurs). Une excellente idée est de ne pas montrer, ou de montrer seulement la périphérie du hold-up, ce qui permet de focaliser le propos presque exclusivement sur les relations internes de la bande et de ses commanditaires Joe Cabot (Lawrence Tierney) et son fils Eddie, admirablement interprété par Chris Penn avec un mélange, finalement glaçant, de bonhomie et d'absolue cruauté.

Dialogues vigoureux et réussis (Il y a deux façons d'avoir ce boulot : la mienne ou la porte), musique Seventies en parfait contrepoint, et fin presque ouverte : car qui peut dire, sur la dernière image que Mr. White (Harvey Keitel) abat effectivement Mr. Orange (Tim Roth), policier infiltré dans la bande, au moment où les forces de l'ordre envahissent l'entrepôt ? Sans doute tire-t-il… Ou non ?


Répondre

De Viator, le 9 novembre 2018 à 20:28
Note du film : 4/6

Il n'est pas incertain que le scénario du film soit inspiré de ces deux films: The League of Gentlemen (Hold-up à Londres) de Basil Dearden (1960) et Kansas City Confidential (Le Quatrième homme) de Phil Karlson (1952).


Répondre

Installez Firefox
Accueil - Version bas débit

Page générée en 0.0022 s. - 5 requêtes effectuées

Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter