Tant d'années après, la force du concept demeure encore vivace, mais les failles du scénario aussi. Les idées sont survolées pour la plupart, les situations inexploitées (quand Blier dit "Il est très fort" en espionnant Perrin faisant n'importe quoi, on aimerait en avoir plus : le coeur du film était là), les seconds rôles trop envahissants (Carmet et sa femme). Et puis le film, bien rythmé jusque là, s'effondre lors de l'interminable séquence de séduction avec Mireille Darc. Heureusement, Rochefort en super espion vaguement gay et Blier en intrigant bougonnant sont excellents et toujours dans le ton. Le personnage de Pierre Richard est mal défini, oscillant selon les scènes entre le naïf et le séducteur. Côté technique, l'image "Gaumont" n'a pas bien vieilli non plus. Malgré tout, Le grand blond fonctionne encore par l'évidence de sa logique interne et par sa BO aussi incongrue qu'inoubliable.
Et pourtant, Doux Jésus !, qu'est-ce que c'est décevant lorsque c'est revu, à quarante cinq ans de distance, à l'occasion de la mort de la charmante, délicieuse, séduisante et sexy Mireille Darc ! Qu'est-ce que c'est poussif, anémique, burlesque, clownesque, maigrelet ! On se demande comment ça a pu avoir tant de succès et demeurer durablement dans les mémoires jusqu'à presque devenir culte. C'est farfelu sans folie, languissant sans souffle, échevelé sans rythme ; on s'ennuie ferme en contemplant, un peu gêné, les efforts de quelques acteurs de qualité à mettre en valeur le sinistre Pierre Richard, gugusse majuscule qui joue de ses boucles folles et de ses yeux en billes de billard sans jamais mettre deux sous d'esprit dans son interprétation. Il est vrai qu'on n'a jamais vu ce pitre essayer de dépasser, ne serait-ce qu'un instant, l'emploi dans quoi les producteurs et réalisateurs l'ont confiné et dont il a fait un fond de commerce durable et rémunérateur : celui de l'ahuri irrémédiable et sympathique qui finit, par sa naïveté même à s'en sortir toujours. Ce genre de nullité rêveuse rassure tant de monde !
En fait, je sais bien ce qui a capté l'attention des spectateurs et fait du Grand blond avec une chaussure noire un film dont on se souvient malgré sa maigreur : l'extraordinaire, géniale allégresse de son thème musical, créé par Vladimir Cosma et interprété par Georges Zamfir à l'étrange flûte de Pan. Et puis l'image bluffante de Mireille Darc extraordinairement colletée dans sa robe Guy Laroche, se retournant et dévoilant une chute de reins à couper le souffle.C'est tout. Pour être tout à fait honnête, je pourrais ajouter – mais simplement perçues lors de ma récente vision – les obsessions homosexuelles du colonel Toulouse (Jean Rochefort) dont l'appartement, qu'il partage avec sa mère, est constellé de torses de statuaire hellénistique. Mais sûrement pas les pénibles jappements de Jean Carmet, cocu ridicule et moins encore les appétits goulus de sa femme Paulette (Colette Castel). On ne peut pas dire que Bernard Blier soit mauvais, parce qu'il ne l'a jamais été, mais enfin il fait vraiment le minimum syndical.
Et puis il y a des trucs infâmes, comme la chasse d'eau qui détrempe Pierre Richard, ses pitreries et sursautements, le coup des cigares explosifs, la scène de bête à deux dos enregistrée, la séquence branquignolesque de l'orchestre dirigé par Yves Robert lui-même (ça trouve parfaitement sa place dans mes chères Ah ! les belles bacchantes, mais pas du tout là…).
Bon. Tout m'a exaspéré dans ce film idiot et m'a mis de mauvaise humeur. Mireille Darc méritait tellement mieux comme hommage télévisé…
Mireille Darc méritait tellement mieux comme hommage télévisé…
Assez d'accord. C'est typique des programmateurs dont la cinéphilie doit se résumer à "Le Cinéma pour les Nuls" (et je ne dis rien de Le retour du grand blond ; vraiment consternant).
Après, qu'aurait-on pu programmer ?
Autant de titres "jamais" diffusés ! (le genre de chose qui fait penser : "J'ai vu tous les films et la chair est triste, hélas !")
Je passe sur les films à sketches des années 60 ou le sympathique Monsieur. Je passe aussi sur Les Seins de glace (pénible) ou les navetons du genre A belles dents (vraiment pas bon) et Fantasia chez les ploucs (exécrable, lui).
Et je me dis qu'on aurait pu tenter de diffuser Galia. Mais Le Grand blond, quelle imagination !
Page générée en 0.0026 s. - 5 requêtes effectuées
Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter